Le 11 janvier dernier, se tenait à l'Institut des Cultures d'Islam rue Léon une réunion organisée à l'initiative de l'Hôtel de ville sur les problématiques rencontrées sur le secteur Dejean-Château Rouge. Cette rencontre, qui fait suite à celle de décembre dernier en présence d’Anne Hidalgo, a réuni des représentants du cabinet de la maire de Paris, Michel Neyreneuf et Sandrine Mees (conseillers du 18e), les services de la ville (Direction de la Prévention, de la Sécurité et de la Protection -DPSP-, Services de propreté et de la voirie, Équipe de Développement Local), l'agence Ville Ouverte, des représentants associatifs (La Vie Dejean, Action Barbès) et quelques habitants.
Dans un premier temps, la parole a été donnée aux représentants de l'Hôtel de ville pour présenter la méthode et le calendrier de l'opération de reconquête de l'espace public sur le secteur Dejean-Château Rouge. L'idée est faire travailler assez rapidement et de concert l'ensemble des services de la ville concernés, en concertation avec les commerçants, les associations et les habitants du secteur. La mise en œuvre de cette approche participative est pilotée par une agence de concertation « Ville Ouverte » (ville-ouverte.com) avec l'appui de l'Équipe de Développement Local (EDL). Pour sa part, L’EDL mène des rencontres avec les commerçants ; une première rencontre a eu lieu le 14 décembre dernier mais pour un secteur limité à la rue Dejean pour l’instant. Des groupes thématiques doivent se mettre en place avec les associations et habitants pour faire émerger des propositions. L’ensemble de ces groupes et les commerçants vont se rencontrer le 6 février prochain pour faire remonter les premières actions /aménagements à mener. Une nouvelle réunion avec Anne Hidalgo est prévue mi-février. L'Hôtel de ville souligne que, dès à présent, un effort est mené par la DPSP notamment avec l’arrivée des nouveaux effectifs. Des aménagements seront assez vite entrepris, par exemple avec l'implantation de bacs végétalisés et il est proposé que ces plantations soient aménagées avec la participation des habitants. Nous avons souligné qu'il faut veiller à ce que l’entretien et le nettoyage soient réguliers pour ne pas donner un sentiment d’abandon, et l’expérience montre que s’il est nécessaire que l’entretien soit régulier pour que cela fonctionne, on ne peut pas se reposer uniquement sur les particuliers pour l'assurer.
Dans un second temps, la parole a été donnée aux associations et habitants pour une série de remarques et de questions. Les premières remarques ont d'emblée pointé la sous représentation des associations et des habitants (seulement 7 personnes sur la trentaine présente à la réunion), il est répondu que la rapidité d'organisation de cette réunion n'a pas permis de faire venir plus de personnes mais que Ville Ouverte va élargir la base d'habitants consultés, notamment par une présence sur l’espace public pour prendre des contacts directement avec les riverains. Les habitants et commerçants du secteur intéressés à participer à cette concertation sont invités à prendre contact avec l'agence Ville Ouverte en envoyant un mail à cette adresse : tousmobilises@chateaurouge.info
Les habitants ont dit leur lassitude de voir défiler les expérimentations et les interventions de la ville depuis des années sans qu’une amélioration se fasse réellement sentir. Beaucoup de remarques ont porté sur les difficultés de la vie au quotidien pour les habitants de ce secteur. Il a été soulevé la question des commerçants dont la plupart de la clientèle vient de l'extérieur du quartier et du peu d'intérêt qu'ils portent à la qualité de vie du quartier ; des riverains ont évoqué la complicité active de certains commerçants avec les vendeurs à la sauvette ; beaucoup se demandent comment travailler avec eux. Il a été également rappelé que lors de la dernière tentative de réaménagement de la rue Dejean, les commerçants avaient fait preuve d’une opposition farouche à tout changement, défendant leur pré carré.
Du côté sécurité, il a été demandé que le champ d'action de la Direction de la Prévention, de la Sécurité et de la Protection (DPSP) soit plus étendu dans le temps, le soir et le week-end en particulier. La DPSP et la préfecture travailleront en ce sens et de concert a répondu la ville. Plusieurs habitants s'inquiètent du développement de la prostitution de rue, de jour comme de nuit, qui entraîne beaucoup d’intrusions et d'effractions dans les immeubles et les parkings. Ils ont rappelé qu’il faut agir avant tout sur les réseaux qui organisent cette activité et "tiennent" les rues. Plus généralement, les habitants ont donc demandé de faire appliquer la loi, plutôt que de chercher de nouvelles méthodes. Une demande entendue par les élus : "il est important et nécessaire de faire respecter la loi mais il faut aussi agir sur d’autres leviers pour faire perdre les vieilles habitudes".
Michel Neyreneuf est intervenu pour demander que l’on précise le secteur concerné et a proposé un élargissement du périmètre qui pourrait descendre jusqu'à la rue Marcadet.
Des habitants ont également proposé que soient menées des actions positives afin de montrer ce qui va bien dans le quartier ; les habitants veulent aussi une meilleure image de leur quartier.
La position d'Action Barbès
Nous avons rappelé que le secteur de Château Rouge est un centre d’attractivité commerciale à vocation régionale mais totalement sous-dimensionné pour absorber une partie de l'activité commerciale qui s'y développe, celle du commerce de gros et demi-gros. Les locaux sont souvent trop petits pour l’activité de gros et demi-gros qu’ils abritent et les rues saturées de véhicules de clients, notamment le week-end. Le projet du "Marché des Cinq continents" étant tombé dans l’oubli, cette activité ne sera pas déplacée et il faut donc aborder l’amélioration du cadre de vie du quartier en intégrant cette problématique. Si le commerce est libre, il faut aussi savoir le réguler et en l'occurrence ne pas favoriser ici le développement du commerce de gros. Restreindre l’accès automobile qui participe aux nuisances subies (stationnement anarchique, en double-file ou sur les passages piétons, pour chargement…) est une piste à renforcer sachant que le quartier est très bien desservi par les transports en commun. Au-delà du bien être des riverains, c’est aussi un pas vers le respect des accords de Paris sur le climat. Et un autre pas dans ceux d’Anne Hidalgo pour améliorer l’air que respirent les Parisiens. Il faut aussi être ferme avec les commerçants quant à l’usage qu’ils font de l’espace public : des containers de poubelle et des palettes de produits sont entreposés à longueur de journée sur les trottoirs considérés comme des annexes de boutiques trop étroites. L’idée de mettre à disposition des compacteurs de cartons pour les professionnels, idée qui a été évoquée lors de la première réunion, nous semble contre-productive. En effet, si un commerçant veut établir une activité de gros, il est dans son bon droit, mais c’est à lui seul de veiller à trouver un local adéquat avec un local poubelles suffisant et correspondant aux besoins de son activité, et non à la ville de pallier ces manques. Il ne s'agit évidemment pas de transformer Château Rouge, de changer son identité à laquelle les habitants sont très attachés, mais de pouvoir y vivre et y circuler comme dans n'importe quel autre quartier de Paris.