Web
Analytics

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : conseils de quartier

  • Huit mois déjà que la Zone est Sous les Projecteurs : ZSP

    C'est une boutade qui illustre malgré tout la situation : mardi dernier, le maire du 18e, dans sa mairie, le préfet de police, le commissaire central, le procureur et l'adjointe au maire de Paris nous ont brossé le tableau de la ZSP Barbès Château Rouge Goutte d'or après 8 mois de traitement particulier.

    Les habitants étaient conviés à entendre la restitution d'un questionnaire distribué à 1200 exemplaires dans le but de recueillir les premières impressions des principaux intéressés. Un bilan des actions et des résultats tant de la police que de la justice devait être présenté à la suite. Nous n'aborderons pas aujourd'hui le nombre de PV ni celui des fermetures administratives. En revanche, nous vous livrons nos propres impressions dans l'ordre : sur la ZSP, sur la méthode et sur la réunion.

    P1060459.jpg
    Myriam El Khomri, adjointe au maire de Paris chargée de la sécurité et Daniel Vaillant, maire du 18e.

    Sur la ZSP 

    La zone de la Goutte d'or Barbès est la première de ce genre que Manuel Valls ait mis en place. Le secteur le méritait bien tant les revendications locales disaient clairement le besoin de tranquillité, le retour au respect des règles et des lois, une amélioration des conditions de vie simplement. Souvenons-nous des conseils de quartier rue Budin chaque fois que ces problèmes faisaient l'objet de réunions plénières, et même quand ils n'étaient pas à l'ordre du jour (voir nos articles).

    Tous les intervenants ont souligné le caractère le plus important de ce dispositif : il est inscrit dans la durée ! ont-ils tous répété. On sait que souvent les interventions policières ont laissé le même chaos après qu'avant, faute de pouvoir changer en profondeur un état dégradé du milieu urbain. Ici, la police est seulement un des acteurs du P1060458.jpgdispositif, certes le plus visible et du même coup le plus critiqué. Que n'a-t-on pas entendu que les CRS regardaient passivement les dealers et receleurs de tout poil agir sans broncher. Pour entendre plus tard qu'il était indigne de boucler le quartier sur deux heures pour prendre dans la nasse les mêmes receleurs. On ne peut pas vraiment reprocher tout et son contraire... Quant à dire que les contrôles ont été fait au faciès... ? en l'occurrence, dans les rues Charbonnière, Caplat, des Islettes et de la Goutte d'Or, ce n'est pas exagéré de dire que la majorité des personnes que l'on y croise sont d'origine africaine, du nord ou subsaharienne. Dans ces conditions, oui, sans doute, les hommes contrôlés ont-ils été majoritairement de type nord-africain ou africain, selon la définition juridique. Pourtant nous avons entendu M. Massena, de l'association Paris Goutte d'Or, se plaindre de bousculade lors de contrôles, lui qui a pourtant le teint clair. Nous croyons comme l'a dit le préfet Boucault que « tout le monde a été contrôlé » entre 14 heures et 16 heures environ et qu'à l'heure de la sortie des écoles, les rues étaient de nouveau libres à la circulation. (voir la réponse du Préfet de police dans notre article du 29 juin) Photo ci-dessus : Bernard Boucault, préfet de police, et Nelson Bouard, commissaire central du 18e et coordonnateur de la ZSP. 

    Pour avoir déjà assisté à des interventions de policiers en faible effectif qui tournent mal, nous comprenons que ce type d'opération ait été montée, et même qu'elles soient renouvelées. Ce n'est pas cautionner la brutalité policière, au contraire nous exigeons que les personnes soient traitées avec dignité et humanité, c'est simplement démontrer que les principes républicains et le respect des lois ont un sens. On ne peut pas vendre à ciel ouvert des produits sous blister ou cellophane, neufs, venus on ne sait d'où... sous les yeux de cars entiers de policiers, qui rongent leur frein et se demandent quel rôle on leur fait jouer. Des habitants ont insisté sur ce questionnement des CRS, notamment, qui ne comprennent pas pourquoi ils sont là... De là, à en découdre, non ! Mais le principe de la saisie, des contrôles et des réponses judiciaires adaptées, oui !

    Sur la méthode

    Elisabeth Carteron a posé la question de la distribution du document dont on faisait là l'étude des réponses. 1200 questionnaires ont été distribués, mais précisément à qui ? Car si le retour n'est pas très satisfaisant, on nous a dit 184 questionnaires retournés, le problème de leur représentativité est encore plus préoccupant. En effet, comment traiter de la même manière un questionnaire envoyé par un particulier habitant et un autre qui fait la synthèse des avis d'une association (c'est ce que nous avons fait) ou d'un professionnel qui rend compte de sa propre analyse. Car le but était « d'obtenir une évaluation de la perception de la sécurité ou de l'insécurité des habitants et des professionnels du quartier Goutte d'Or – Château rouge de façon à prendre en compte les préoccupations des habitants ». Les analystes nous ont donné les caractéristiques du panel ainsi constitué : les répondants sont pour 54% des femmes, 59% d'entre eux ont entre 30 et 60 ans, vivent en couple pour 48% et pour 41% sont des cadres ou des professions intellectuelles, 21% sont des retraités, ce qui n'exclut pas qu'ils aient appartenu à la même classe socio-professionelle. En effet, qui répond à ce genre de questionnaire, surtout s'il est adressé aux intéressés par l'Internet ? Peu d'employés ou d'ouvriers, peu de commerçants, peu de chômeurs.... pourtant nombreux dans ce quartier que l'on dit « populaire ». En effet, 8% seulement des répondants sont locataires de logements sociaux dans ce secteur qui en possèdent tant. D'où la question de la représentativité du panel.

     

    P1060461.jpg
    Le procureur Molins, l'adjoint au maire de Paris Mao Penninou et Philippe Chotard, secrétaire général de l'Hôtel de Ville

    Est-il bien représentatif des habitants de la Goutte d'or ? De ces derniers, comment sait-on ce qu'ils pensent des conditions de vie dans le quartier ? Leur perception de la sécurité ou de l'insécurité, quelle est-elle ? N'auront-ils pas une fois de plus l'impression d'être des habitants de second ordre ? N'est-ce pas pourtant avec eux qu'on doit renouer le contact et notamment retrouver le chemin du vivre ensemble et inventer des solutions aux problèmes de parentalité ? On y vient.

    Sur la réunion

    Après la présentation des résultats, chacun des intervenants a donné son bilan ou son commentaire sur la partie qui lui revient, police ou justice, et vision politique par le maire lui-même et son adjointe à la sécurité. Nous y reviendrons dans un autre article ultérieurement. Toutefois, plusieurs des participants dans la salle ont fait remarquer qu'il était dommage que le volet éducatif du dispositif n'ait pas son représentant à la tribune. Comme si l'on faisait trop de place à l'aspect répression. En effet, Myriam El Khomri a reconnu ce manque et a senti la nécessité de mettre en lumière une approche nouvelle qui permet de répondre vite et autrement à des actes de délinquance ou à des comportements délictueux, notamment chez les mineurs. Chacun le sait, les jeunes sont de plus en plus jeunes à être mêlés aux affaires... vol à l'arraché, vol et recel de téléphones mobiles, vente à la sauvette, dégradations, etc. Le procureur a complété le
    P1060460.JPGpropos en décrivant les réponses judiciaires adaptées, parmi celles-ci les mesures de réparation dont l'objectif est de faire prendre conscience à l'auteur de l'infraction des conséquences de son acte. Le mineur va devoir réparer directement ou indirectement, par une remise en état du bien dégradé, ou un travail compensatoire au profit de la victime ou de la collectivité. Une convention a été signée avec JC Decaux pour réparer les Vélib' détériorés. Voilà pour les délits, mais dans le secteur, les jeunes sont nombreux aussi à manquer de repères, ou carrément en manque d'autorité parentale. Ce sont les parents qu'il faut aider. Le dispositif comprend aussi cet aspect. On nous a promis que la prochaine réunion, dans environ six mois, ferait une part plus grande au volet éducatif. Nous le souhaitons aussi.  
    Photo ci-dessus : François Molins, procureur de la République. 

  • BST Gare du Nord: rencontre avec le commissaire du 10e

    Pas de trêve des confiseurs ni pour le commissaire ni pour Action Barbès. Le rendez-vous avait lieu pendant le match France Nigéria ! Plus sérieusement, les échanges ont permis d'y voir un peu clair sur la Brigade spécialisée de terrain (notre article en mars sur la BST) mise en place depuis février de cette année. Rappelons que pour mieux connaître ce dispositif, la brigade et ses missions, son fonctionnement et son histoire, nous avions présenté un vœu au conseil d'arrondissement du 10e le 10 juin. (voir notre article avec la réponse de Rémi Féraud).

    Le commissaire Frédéric Ségura, adjoint du commissaire Grinstein jusqu’au départ de ce dernier, assure actuellement l'intérim en attendant la nomination du commissaire central. Il a répondu à nos questions avec simplicité et bonne humeur : voici l'essentiel des échanges, qui ne sont toutefois pas un verbatim. Nous le remercions ici.

    Pourquoi une BST gare du nord?

    On a souhaité apporter une réponse globale aux problèmes des abords de la gare signalés par la SNCF, mais aussi une réponse politique avant l'ouverture de la SCMR et une réponse à l'occupation débordante de l'espace public par les "marchés de pauvres" des mercredis et samedis. Les BST se rapprochent des UTEC (Unité territoriale de quartier) créées en 2008 par la ministre de l'Intérieur de l'époque, Mme Alliot-Marie. Elles interviennent là où il y a de la délinquance de voie publique. Le recrutement des policiers par un jury s'est fait sur la base du volontariat. Il était impératif d'avoir des policiers motivés, sportifs pour une bonne cohésion du groupe, qui comprend aussi trois femmes. Ils disposent d'un car en soutien et de moyens de lutte contre les violences urbaines. 

    Leur mission première est de renouer le contact avec la population, sur un secteur bien délimité (voir la carte ci-dessous), et de recueillir les doléances des habitants, particulièrement des personnes qu'on entend peu comme les personnes âgées. (voir ci-dessous la présentation faite par le Préfet Boucault le 6 février 2014) Une bonne connaissance du terrain est indispensable. Des contacts ont déjà été pris avec des commerçants et des associations comme Gaia et Coordination Toxicomanies et d'autres associations d'habitants. Dans le secteur de la Goutte d'or, la brigade côtoie les policiers de la ZSP, ils se reconnaissent, ils échangent. 

     

    Capture d’écran 2014-07-03 à 14.43.13.jpg

    Carte extraite du site de la Préfecture de Police

     

    On avait annoncé une brigade de 25 policiers. Combien sont-ils réellement sur le terrain ?

    L'effectif sera au complet en septembre. Les policiers de la BST travaillent 4 jours et ont ensuite 2 jours de repos. En tenant compte des stages de formation, des congés et des repos, ils sont donc entre 11 et 14 sur le terrain, dont un groupe de 6 ou 7 agents autour de Barbès le soir en mission pédestre. La brigade est en service 7 jours sur 7 de 14h30 à 22h30, avec parfois même des horaires décalés.

    Sur le chemin du retour, nous avons croisé sous le viaduc un groupe de policiers qui correspondaient assez bien à la description du commissaire. Bingo ! Nous en avons profité pour faire la connaissance du major responsable de la BST et de ses collègues, et accessoirement de nous présenter à eux.

    Comment les identifier si on ne les connait pas? Jusque là, ils n'ont pas contacté notre association.

    En effet, on ne les distingue pas des autres policiers. Ils ne sont pas encore identifiables, toutefois un logo propre à la brigade devrait arriver et permettre de les reconnaître. Certes, il y a eu un manque de communication mais ils n'ont pas pu faire tout en même temps. Ils ont traité d'abord le problème n°1 qu'est l'alcool. Ils disposent de cartes de visites qu'ils peuvent confier à certains habitants ou commerçants, notamment, pour une réponse urgente en direct. Évidemment, il ne s'agit pas de les donner à tout le monde. Ils le font à bon escient et avec parcimonie, aussi pour renouer les liens entre police et population. C'est un travail qui va se pérenniser. On vise l'intérêt collectif et non particulier.

    (F. Ségura souhaiterait développer cette unité pour avoir des équipes dès le matin, quand les trafics ne sont pas encore installés, mais nous avons bien compris que cela ne dépend pas de lui!)

    Sur le terrain, quelles actions? 

    Nous travaillons autour de 5 thématiques:

    - l'alcoolisation aux abords des épiceries, bars et lieux de consommation

    - les stupéfiants (surtout le trafic de Skénan)

    - les vols de bagages à l'arraché, vols de bijoux...

    - la prostitution et le proxénétisme y compris de très jeunes garçons près de la gare

    - l'escroquerie à la mendicité

    Les interpellations sont nombreuses, mais les délinquants se renouvellent aussi. Dans le cadre du Groupe local de traitement de la délinquance (GLTD) — qui s'arrête au boulevard de la Chapelle, contrairement à la zone d'action de la BST —, il y a eu des fermetures administratives de débits de boissons. Le vendredi soir, nous menons des actions anti-alcool dans le secteur des agences d'intérim. C'est au moment du versement des salaires que l'alcoolisation est la plus visible. 

    En ce qui concerne le trafic de Skénan, c'est un vrai trafic qui génère une vraie économie; on en définit deux modes:

    - le dépannage entre usagers ou petits dealers-consommateurs qui ne nécessite pas une prise en compte judiciaire même s'il faut contrôler.

    - d'autres usagers pour subvenir à une toxicomanie coûteuse ont recours à des trafics plus structurés et importants (recherche de produits, trafic d'ordonnances). Ils doivent être combattus en premier lieu.

    Pour les vols, il faut se méfier de la technique du "dos à dos" — le voleur se colle au touriste qu'il veut dépouiller — qui se pratique beaucoup près de la gare du nord devant les hôtels et les restaurants. Ces formes de délinquances sont à rapprocher de la situation actuelle de chômage important, de travail "au noir", de l'importante circulation d'argent due aux paiements en liquide.

    Vous connaissez la position d'Action Barbès sur le projet de SCMR. Quelle est votre opinion ?

    Ce qu'on n'arrive pas à contrôler, il vaut mieux l'encadrer dans une surface limitée, avec des règles et l'espoir qu'on réduise les risques. Il peut y avoir un appel d'air, on ne l'ignore pas mais on peut aussi entrer dans un cercle vertueux.  Il faut surtout être pragmatique et tenter l'expérimentation plutôt que de voir les seringues sur la voie publique, les retrouver dans les sanisettes, que l'on doive supprimer des bancs parce que les riverains le réclament... Certains usagers de drogue sont dans un état catastrophique. On imagine les fractures familiales, les mauvais choix... Au bout l'extrême précarité.

    Le 10e concentre des problèmes qui se cumulent : toxicomanies, marchés de la misère, population en errance, sauvettes, trafics de toute sorte. 

    Pour conclure, c'est le commissaire qui nous a posé une question sur notre vision des actions de la police, de ses résultats. Nous avons répondu en fonction des retours de nos adhérents et de notre perception (relative et partielle, certes). Les dispositifs mis en place sont visibles et les actions reconnues même si les résultats ne sont pas toujours à la hauteur de ce que souhaitent certains riverains. Reste l'aspect malpropreté qui n'évolue pas vraiment et contribue au sentiment d'insécurité. Mais la propreté n'est pas l'affaire de la police !

     

    Lors de son installation, le 6 février 2014, la brigade avait été présentée par le Préfet de police, Bernard Boucault, en ces termes : 

    Une brigade spécialisée de terrain (BST) est une unité de voie publique, composée d’effectifs dédiés et fidélisés opérant en tenue d’uniforme et intervenant sur un territoire clairement identifié. Elle a pour objectif de lutter contre la délinquance tout en oeuvrant au renforcement des échanges et des liens de confiance entre la police, les commerçants et la population. 

    La BST « Gare du Nord » couvre une partie de trois arrondissements (10e, 18e et 19e) afin d’apporter une réponse plus efficace à des modes d’occupation de la voie publique qui perturbent depuis des années le quotidien des résidents du quartier ou des personnes qui le fréquentent : mendicité agressive, rassemblements de jeunes en errance, alcoolisation, commerces en infractions, trafics et consommation de produits stupéfiants, vols à la tire ou à l’arraché, vente à la sauvette, etc. 

    La BST vient compléter le dispositif policier renforcé mis en place dans le cadre des deux zones de sécurité prioritaires des 18ème et 19ème arrondissements. 

    La nouvelle brigade, dirigée par un major de police, compte 25 fonctionnaires de police, qui constituent autant de renforts pour appuyer le travail quotidiennement mené par les fonctionnaires de police des arrondissements riverains de la gare du Nord et des unités d’appui fréquemment engagées sur ce secteur (forces mobiles, compagnie de sécurisation et d’intervention, etc.). Outre un rôle dans la sécurisation de l’espace public, les fonctionnaires de la nouvelle brigade s’attacheront à renforcer les liens entre la police et la population sur le territoire de leur ressort, au moyen notamment de fréquentes prises de contact. 

    Cette présence policière renforcée sur la voie publique se double d’un renforcement des moyens d’investigation affectés à la zone, pour consolider et prolonger les résultats de la BST : inclusion du secteur de la gare du Nord dans le plan stupéfiants de la préfecture de police ; création par le procureur de la République de Paris d’un groupement local de traitement de la délinquance (GLTD). 

     

    voir aussi site de la Préfecture de Police.  

     

  • Auvents: objet d'une attention accrue!

    paris,10e,auvents,marquises,commerces,rémi-féraudNous avions déjà évoqué le sujet des auvents, ces avancées, le plus souvent en béton, parfois avec un habillage métallique, qui ont été arrimées aux façades de certains immeubles anciens ou haussmanniens, généralement au cours du 20e siècle. Le béton prenait alors son essor en architecture, grâce à des architectes renommés qui ont su l'utiliser pour jouer avec les lignes des bâtiments et les effets d'ombres et de lumières.

    Dans notre précédent article sur ce sujet, nous avions utilisé un titre provocateur: "La guerre aux auvents est-elle déclarée?". Nous avions en effet montré à quel point ce sujet n'est pas anodin, mais était au contraire devenu un sujet de crispation pour certains riverains et certains services municipaux.

    Loin désormais de servir à leur fonction initiale, celle de protéger des éléments climatiques (pluie, ensoleillement, température) les badauds ou les clients des vitrines au dessus desquelles ils étaient accrochés, les auvents sont de plus en plus fréquemment décriés.

    Des auvents triplement décriés...

    1ère raison: ces éléments ne sont pas d'origine mais ont été couramment ajoutés bien postérieurement à l'édification de l'immeuble.

    2ème raison: ces auvents récents n'apportent pas de valeur ajoutée aux immeubles sur le plan architectural; ils sont habituellement très communs et manquent d'élégance (à la différence de certaines marquises de style, au-dessus des portes d'entrée et en harmonie avec leurs bâtiments classiques); ils n'ajoutent généralement rien à la valeur patrimoniale de l'immeuble et peuvent, au contraire, la desservir.

    Et 3ème raison, qui est l'argument le plus souvent invoqué actuellement: ces auvents attirent une population sans-abri, parfois en errance, voire marginalisée qui y trouve un espace abrité ou un semblant de refuge. On a même assisté à certains phénomènes de sédentarisation sous ces auvents, somme toute ponctuelle, de personnes défavorisées, préférant parfois y demeurer et sortant alors du champ assistanciel. Dans ces cas, la cohabitation entre ces personnes sans domicile et les habitants se révèle habituellement difficile, ce qui conduit à des plaintes répétées des riverains auprès des élus et des pouvoirs publics.        

    Pour illustrer ces tensions, nous avons déjà cité l'exemple quelque peu emblématique de la Gare du Nord, dont la facade a été récemment restaurée. Au cours des travaux de ravalement en 2009 et 2010, la Ville de Paris et le Maire du 10e, Rémi Féraud, ont ainsi fait pression sur la SNCF afin qu'elle supprime l'auvent existant, sous lequel se réfugiait une population de personnes sans-abri et marginalisées. C'est donc en réponse à certaines nuisances, vécues comme telles par les riverains, que l'auvent fut déposé, permettant par ailleurs à la façade monumentale de la gare, d'inspiration romaine, de retrouver son aspect d'origine, sans cet auvent ajouté postérieurement à sa construction par Jacques Hittorff. On peut voir le changement sur cet assemblage de photos prise avant/après la dépose de l'auvent:           

    paris,10e,auvents,marquises,commerces

    Outre cet exemple, nous avons depuis peu un nouvel exemple dans nos quartiers, avec la dépose très récente de l'auvent qui entourait l'immeuble du 99 boulevard de Magenta (formant l'angle avec la rue Lafayette) au dessus du magasin Leader Price. Pour les habitués des séances plénières du Conseil de Quartier Lariboisière Saint-Vincent-de-Paul, l'évocation de cet auvent rappellera des souvenirs de débats animés, tant les nuisances relatives à la présence de cet auvent avaient été maintes fois et vivement discutées.

    En décembre 2011, lors d'une rencontre avec le cabinet du Maire du 10e, nous avions appris que le Maire cherchait à convaincre l'OPAC, propriétaire et bailleur de cet immeuble, de déposer son auvent imposant, sous lequel des jeunes gens marginalisés et très souvent en état d'ébriété avaient pris l'habitude de se retrouver, avec les nuisances propres à ces comportements (trottoirs transformés en urinoir, bouteilles cassées, canettes à l'abandon etc.).

    C'est donc désormais chose faite: l'auvent a été déposé au cours des mois d'octobre et novembre 2013, comme en témoignent ces deux photos prises respectivement avant et après l'enlèvement:                

    paris,10e,auvents,marquises,commerces

    paris,10e,auvents,marquises,commerces

    La dépose de l'auvent incriminé ravit certainement les habitants de ce quartier aux abords de la Gare du Nord. C'est plutôt également bienvenu à quelques mois du premier tour des élections municipales, même si la fixation du calendrier de dépose n'a certainement pas été maîtrisée et calculée à des fins électoralistes par le Maire du 10e, candidat à sa réélection...

    Nous manquons évidemment de recul pour dire si la suppression de l'auvent contribuera à terme à l'amélioration du cadre de vie pour les riverains.

    Toujours est-il que, dorénavant, cette placette, avec les 3 grandes jardinières en forme de pots de fleurs (comme celles installées place du 8 novembre 1942 et sur la placette paré-patin) fait bonne figure, au pied d'une façade haussmannienne débarassée de cet élément architectural peu esthétique.

    Dans le 1er arrondissement, en plein coeur de Paris, nous avons également découvert un autre exemple confirmant l'accélération de la tendance visant à supprimer les auvents modernes accrochés aux immeubles anciens. Il s'agit de l'auvent situé au dessus du magasin Minelli à l'angle du 132 rue de Rivoli et 17 rue du Pont Neuf, face à La Samaritaine, supprimé à la fin de l'été 2013:

    paris,10e,auvents,marquises,commerces

    Malgré les suppressions de plus en plus souvent observées, tous les auvents, ajoutés aux immeubles anciens, ne connaissent pas cette fin accélérée, notamment du fait des contraintes financières résultant du coût pour entreprendre une telle dépose ou liées aux divers accords et autorisations nécessaires (AG copropriété, urbanisme etc.).  

    paris,10e,auvents,marquises,commerces

    Et certains de ces auvents qui demeurent, vieillissent mal faute d'entretien... Comme celui situé au 151 boulevard Magenta. 

    Cet auvent identifié a la particularité de ne pas être en béton mais constitué de panneaux de verres sur une armature métallique. C'est peut-être la raison pour laquelle il montre des signes accentués de fatigue.

    Les photos que nous avons prises (cf. ci-dessous) témoignent d'un état qui nous laisse plus que dubitatifs: carreaux de verre brisés et fissurés, armature métallique rouillée et se rompant à quelques endroits, risquant de se décrocher.

    Bien évidemment, cet état problématique nous semble présenter des risques pour les passants du boulevard Magenta.    

    paris,10e,auvents,marquises,commerces

    En conséquence, nous avions déjà alerté en novembre 2012 le cabinet du Maire du 10e et son adjointe en charge de l'aménagement de l'Espace Public, Elise Fajgeles. Un architecte de sécurité de la Préfecture de Police de Paris (via son Bureau de la Sécurité de l'Habitat) devait donc se rendre sur le site pour étudier la situation.

    Mais plus d'un an après, nous n'avons pas de nouvelle et avons donc relancé les services concernés à la mairie du 10e et à la Préfecture de Police. A suivre...

  • Château Rouge, ça bouge...

    Le 11 janvier dernier, se tenait à l'Institut des Cultures d'Islam rue Léon une réunion organisée à l'initiative de l'Hôtel de ville sur les problématiques rencontrées sur le secteur Dejean-Château Rouge. Cette rencontre, qui fait suite à celle de décembre dernier en présence d’Anne Hidalgo,  a réuni des représentants du cabinet de la maire de Paris, Michel Neyreneuf et Sandrine Mees (conseillers du 18e), les services de la ville (Direction de la Prévention, de la Sécurité et de la Protection -DPSP-, Services de propreté et de la voirie, Équipe de Développement Local), l'agence Ville Ouverte, des représentants associatifs (La Vie Dejean, Action Barbès) et quelques habitants.

    Dans un premier temps, la parole a été donnée aux représentants de l'Hôtel de ville pour présenter la méthode et le calendrier de l'opération de reconquête de l'espace public sur le secteur Dejean-Château Rouge. L'idée est faire travailler assez rapidement et de concert l'ensemble des services de la ville concernés, en concertation avec les commerçants, les associations et les habitants du secteur. La mise en œuvre de cette approche participative est pilotée par une agence de concertation « Ville Ouverte » (ville-ouverte.com) avec l'appui de l'Équipe de Développement Local (EDL). Pour sa part, L’EDL mène des rencontres avec les commerçants ; une première rencontre a eu lieu le 14 décembre dernier mais pour un secteur limité à la rue Dejean pour l’instant. Des groupes thématiques doivent se mettre en place avec les associations et habitants pour faire émerger des propositions. L’ensemble de ces groupes et les commerçants vont se rencontrer le 6 février prochain pour faire remonter les premières actions /aménagements à mener. Une nouvelle réunion avec Anne Hidalgo est prévue mi-février. L'Hôtel de ville souligne que, dès à présent, un effort est mené par la DPSP notamment avec l’arrivée des nouveaux effectifs. Des aménagements seront assez vite entrepris, par exemple avec l'implantation de bacs végétalisés et il est proposé que ces plantations soient aménagées avec la participation des habitants. Nous avons souligné qu'il faut veiller à ce que l’entretien et le nettoyage soient réguliers pour ne pas donner un sentiment d’abandon, et l’expérience montre que s’il est nécessaire que l’entretien soit régulier pour que cela fonctionne, on ne peut pas se reposer uniquement sur les particuliers pour l'assurer.

    Dans un second temps, la parole a été donnée aux associations et habitants pour une série de remarques et de questions. Les premières remarques ont d'emblée pointé la sous représentation des associations et des habitants (seulement 7 personnes sur la trentaine présente à la réunion), il est répondu que la rapidité d'organisation de cette réunion n'a pas permis de faire venir plus de personnes mais que Ville Ouverte va élargir la base d'habitants consultés, notamment par une présence sur l’espace public pour prendre des contacts directement avec les riverains. Les habitants et commerçants du secteur intéressés à participer à cette concertation sont invités à prendre contact avec l'agence Ville Ouverte en envoyant un mail à cette adresse : tousmobilises@chateaurouge.info

    paris 18e,paris,commerces,chateau rouge,ventes-à-la-sauvette,propreté

    Les habitants ont dit leur lassitude de voir défiler les expérimentations et les interventions de la ville depuis des années sans qu’une amélioration se fasse réellement sentir. Beaucoup de remarques ont porté sur les difficultés de la vie au quotidien pour les habitants de ce secteur. Il a été soulevé la question des commerçants dont la plupart de la clientèle vient de l'extérieur du quartier et du peu d'intérêt qu'ils portent à la qualité de vie du quartier ; des riverains ont évoqué la complicité active de certains commerçants avec les vendeurs à la sauvette ; beaucoup se demandent comment travailler avec eux. Il a été également rappelé que lors de la dernière tentative de réaménagement de la rue Dejean, les commerçants avaient fait preuve d’une opposition farouche à tout changement, défendant leur pré carré.

    Du côté sécurité, il a été demandé que le champ d'action de la Direction de la Prévention, de la Sécurité et de la Protection (DPSP) soit plus étendu dans le temps, le soir et le week-end en particulier. La DPSP et la préfecture travailleront en ce sens et de concert a répondu la ville. Plusieurs habitants s'inquiètent du développement de la prostitution de rue, de jour comme de nuit, qui entraîne beaucoup d’intrusions et d'effractions dans les immeubles et les parkings. Ils ont rappelé qu’il faut agir avant tout sur les réseaux qui organisent cette activité et "tiennent" les rues. Plus généralement, les habitants ont donc demandé de faire appliquer la loi, plutôt que de chercher de nouvelles méthodes. Une demande entendue par les élus : "il est important et nécessaire de faire respecter la loi mais il faut aussi agir sur d’autres leviers pour faire perdre les vieilles habitudes".

    Michel Neyreneuf est intervenu pour demander que l’on précise le secteur concerné et a proposé un élargissement du périmètre qui pourrait descendre jusqu'à la rue Marcadet.

    Des habitants ont également proposé que soient menées des actions positives afin de montrer ce qui va bien dans le quartier ; les habitants veulent aussi une meilleure image de leur quartier.

    La position d'Action Barbès

    Nous avons rappelé que le secteur de Château Rouge est un centre d’attractivité commerciale à vocation régionale mais totalement sous-dimensionné pour absorber une partie de l'activité commerciale qui s'y développe, celle du commerce de gros et demi-gros. Les locaux sont souvent trop petits pour l’activité de gros et demi-gros qu’ils abritent et les rues saturées de véhicules de clients, notamment le week-end. Le projet du "Marché des Cinq continents" étant tombé dans l’oubli, cette activité ne sera pas déplacée et il faut donc aborder l’amélioration du cadre de vie du quartier en intégrant cette problématique. Si le commerce est libre, il faut aussi savoir le réguler et en l'occurrence ne pas favoriser ici le développement du commerce de gros. Restreindre l’accès automobile qui participe aux nuisances subies (stationnement anarchique, en double-file ou sur les passages piétons, pour chargement…) est une piste à renforcer sachant que le quartier est très bien desservi par les transports en commun. Au-delà du bien être des riverains, c’est aussi un pas vers le respect des accords de Paris sur le climat. Et un autre pas dans ceux d’Anne Hidalgo pour améliorer l’air que respirent les Parisiens. Il faut aussi être ferme avec les commerçants quant à l’usage qu’ils font de l’espace public : des containers de poubelle et des palettes de produits sont entreposés à longueur de journée sur les trottoirs considérés comme des annexes de boutiques trop étroites. L’idée de mettre à disposition des compacteurs de cartons pour les professionnels, idée qui a été évoquée lors de la première réunion, nous semble contre-productive. En effet,  si un commerçant veut établir une activité de gros, il est dans son bon droit, mais c’est à lui seul de veiller à trouver un local adéquat avec un local poubelles suffisant et correspondant aux besoins de son activité, et non à la ville de pallier ces manques. Il ne s'agit évidemment pas de transformer Château Rouge, de changer son identité à laquelle les habitants sont très attachés, mais de pouvoir y vivre et y circuler comme dans n'importe quel autre quartier de Paris.

  • ZSP élargie: un mois plus tard

    Le dispositif se nomme désormais "Cellule d'écoute et d'évaluation", une cellule qui se réunira une fois par mois. Nous vous renvoyons à notre article du 14 février sur la précédente réunion pour connaître la liste des participants. Ont été associés pour la première fois, des représentants du collectif "riverains-Lariboisière-gare du Nord" opposé au maintien de la salle de consommation rue Paré, et du collectif Marcadet. La réunion du 5 mars fut intéressante mais longue... On peut regretter l'absence d'élus ou de représentants des mairies concernées : certes, dans le 10e se tenait le conseil d'arrondissement  mais dans le 18e, tel n'était pas le cas. Personne non plus pour représenter la DPSP 10e. Côté police, nous avons fait la connaissance des nouveaux commissaires adjoints : Jérémy Ransinangue pour le 10e et Mathieu Debatisse pour le 18e (arrivé le matin même !).

    paris,paris 18e,paris 10e,zsp-barbès-chateau-rouge-lariboisière,police de securité du quotidien

    Les quatre quartiers de la ZSP bénéficient tous de renfort de police notamment avec les  compagnies de sécurisation, notamment pour la rue Ambroise Paré. La Brigade spécialisée de terrain (BST) est également renforcée depuis la semaine dernière. Les policiers sont progressivement équipés de smartphones (nouveaux équipements opérationnels - NEO) et de tablettes numériques (une par équipage) permettant ainsi l'accès rapide et direct à l'ensemble des fichiers et des applications professionnelles. D'où des contrôles modernisés et très raccourcis.

    Quelques chiffres

    Il s'agit des chiffres à compter du 22 janvier de cette année depuis la mise en place  officielle de la nouvelle ZSP 10-18. Ils sont répartis en 4 points.

    - police de contact : comme son nom l'indique, il s'agit d'aller à la rencontre des habitants, des commerçants, particulièrement dans les secteurs "chauds". 3 200 prises de contacts ont déjà eu lieu et 780 prospections dans les halls d'immeubles.

    - amélioration de la physionomie visible : l'objectif est de lutter contre toutes les formes d'incivilités et sur la délinquance de voie publique qui nuisent au quotidien et ce, en partenariat avec la Direction de la Prévention, de la Sécurité et de la Protection (DPSP). Plus de 3 000 évictions pour ventes illégales de cigarettes ont eu lieu à Barbès et place de la Chapelle qui ont donné lieu à 435 procédures simplifiées, des interpellations avec judiciarisation à la clé. A noter, une saisie de 174 cartouches rue de la Chapelle et 13 tonnes de marchandises parties à la benne.

    D'autres évictions et saisies ont également eu lieu avec les diverses ventes à la sauvette (jours de marché, rue du faubourg Saint-Denis).

    L'arrêté anti-alcool sur l'ensemble de la ZSP élargie a permis de nombreuses verbalisations (48 sur le secteur Château Rouge). Toutes les infractions sont cernées que ce soit en matière de prostitution (clients verbalisés) ou encore de stationnements gênants qui ne manquent pas côté 18e.

    - Lutte contre la délinquance : 485 arrestations dont 29 pour vol à la tire,  27 avec violence,  10 vols à la portière, 10 pour cambriolages et 79 pour recel. Il y a eu 137 arrestations pour infraction à la législation en matière de stupéfiants. C'est le secteur Barbès- Goutte d'Or qui remporte la palme !

    - Opérations coup de poing : 46 en tout avec contrôles de commerces, opérations de lutte contre les sauvettes, contre la prostitution et contre l'immigration irrégulière. Le partenariat avec la société Autolib continue pour empêcher l'occupation et la dégradation des véhicules à raison d'une opération par mois. La dernière intervention concernant le trafic de cigarettes a débouché sur 29 arrestations et 29 déferrements, donc un durcissement des réponses judiciaires. Les douanes vont être associées, ce qui permettra la saisie des espèces et la destruction des paquets.

    Le partenariat avec la DPSP

    Dix-huit opérations conjointes ont été menées sur les rues Cail et Perdonnet. Sur Château Rouge, elles ont lieu deux fois par semaine et des agents sont présents tous les jours rue Dejean. Pour permettre une meilleure  fluidification des sorties de métro, les stations Barbès et Chapelle bénéficient chacune d'une opération par semaine en fin de journée.

    Les arcades de la rue de la Goutte d'or, que nous avons très souvent évoquées pour leur saleté récurrente ont droit à minima à une opération par semaine pour mettre fin aux occupations illicites.

    Au mois de janvier : 672 PV sur Barbès et Château Rouge dont une majorité pour dépôts  et jets de mégots (435) pour seulement 43 PV pour épanchements d'urine. Une cartographie qui précisera par quartier, nombres et types d'infractions, sera disponible le mois prochain. D'ores et déjà, le 18e est le gagnant pour l'ensemble des arrondissements parisiens. Il restera à se déployer davantage sur le secteur Lariboisière. Coralie Lever-Matraja, responsable de la DPSP 18e a tenu à préciser que la verbalisation n'était pas toujours simple face à certains contrevenants récalcitrants. En cas de refus de présentation de papiers d'identité, il est fait appel à la police. Rappelons que les agents de la brigade de lutte contre les incivilités sont en civil.

    Du côté des associations

    Les échanges ont eu lieu par quartier. Pour les environs de la salle de consommation, les représentants du collectif contre la Scmr ont pu amplement s'exprimer. Pour eux, la délinquance visible rue Paré n'existait pas avant l'ouverture, une vision que nous ne partageons pas, même si nous ne contestons pas les nuisances subies et la nécessité d'améliorer la vie dans ce quartier.

    Pour le secteur Gare du Nord, l'association Vivre gares du Nord et de l'Est a insisté sur les problèmes de mendicité "agressive" notamment par des enfants, des vols de bagages..."La maire du 10e est très vigilante en ce qui concerne les enfants afin que ceux-ci soient rapidement pris en charge et placés" a précisé le commissaire du 10e.

    En ce qui nous concerne, nous constatons une présence policière bien visible sur l'ensemble du périmètre et une amélioration notable de la situation du côté de  la placette Polonceau, de même pour  Château Rouge, ce qui est confirmé par l'association Vie Dejean. Par contre, le marché est toujours difficilement praticable à certains moments, l'entrée de la station de métro parfois complètement bouchée et des ventes ont toujours lieu à l'intérieur de l'espace Ratp. Des mineurs isolés sont encore dans le quartier Goutte d'Or et particulièrement rue des Islettes mais nous savons aussi que l'association Casp (Centre d'action social protestant) diligentée par la ville, est présente sur le terrain pour aller à leur rencontre et tenter des prises en charge.

    Du mieux aussi rue Myrha, rue de Panama. Pour la rue des Poissonniers, il y a encore une bonne marge d'amélioration... tant pour les ventes à la sauvette que pour la propreté (mais là, c'est le domaine des services de la ville). Les interventions conjuguées de la police et la DPSP ont apaisé la rue Dejean du côté des sauvettes mais le non-respect de certains commerçants en matière de législation n'en est désormais que plus flagrant. L'association Vie Dejean continue à demander plus de contrôles,  particulièrement pour les heures de livraison.

    Du côté de la Chapelle, des efforts conséquents sont mis en place. Mais pour les associations, le secteur reste difficile et dès que la police quitte les lieux, les activités illicites reprennent. SOS La chapelle déplore, une fois de plus, l'état de la rue Pajol après les distributions  alimentaires de rue organisées par des associations qui ne dépendent pas de la ville et qui ne gèrent pas le  nettoyage des trottoirs.

    Côté 10e, de nombreuses saisies de chaussures vendues ont été effectuées sur le trottoir de la rue du Faubourg Saint-Denis. L'association Demain La Chapelle estime le bilan de la DPSP plutôt négatif car pas d'amélioration visible en matière d'incivilités. Souhaitons que le responsable du 10e soit présent lors de la prochaine réunion.

    On a également évoqué le mauvais éclairage à certains endroits et particulièrement la rue Marx Dormoy. Des demandes ont déjà été faites à la ville...

    La liste des points abordés n'est pas reprise dans son intégralité, ce serait bien fastidieux pour les lecteurs ! Prochain rendez-vous en avril.

  • Un projet d'agriculture urbaine non compris

    Vous qui lisez régulièrement notre blog, vous savez que notre dossier phare, celui qui nous tient le plus à coeur, celui qui galvanise nos énergies depuis 2013, qui a été reconnu par la Mairie de Paris au point de l'inscrire au Plan d'investissement de la mandature (PIM) pour un budget de 8 millions d'euros, que ce dossier porte le doux nom de Promenade urbaine. Se promener où ? de Barbès, notre terre natale, dirons-nous, à Stalingrad, la terre de nos voisins à l'Est. 

    Nous suivons de près les progrès du dossier. Revenons rapidement sur les grandes étapes :

    L'inscription au plan d'investissement de la mandature 2014-2020 arrive en décembre 2014. 

    "4M € sont également inscrits pour l’opération de réaménagement de la zone (carrefour et boulevard) de La Chapelle. Le même montant est affecté au 18ème arrondissement, portant à 8M € le budget consacré à la « promenade urbaine » du boulevard de la Chapelle. "

    (Extrait de BP 2016, pour rappel, Communication sur la programmation des opérations de travaux, conseil d'arrondissement du 10e du 30 novembre 2015)

     

    L'Atelier parisien d'urbanisme, l'Apur, planche sur le dossier : 

    Dans un premier temps, nous avons été invités à participer à des ateliers collaboratifs, puis à entendre la restitution des études menées par l'Apur : nous étions en mai 2015 quand nous vous rendions compte de ces travaux et c'est ici dans notre article.  Prenez le temps de le relire, vous serez comme nous, étonnés du caractère positif avec lequel nous avons abordé ce grand chantier et accueilli les priorités que dégageait l'APUR à la fin de sa réflexion : " faire émerger de nouveaux usages pour une réappropriation collective des espaces publics "

    C'est bien ce que nous souhaitons. 

    Puis nous avons attendu la suite. Comme vous.

    images.jpeg

    En octobre 2016, la délibération 2016 DVD 169 au Consell de Paris décrivait la situation du boulevard de La Chapelle, avec justesse, et nous reprenions courage. L'espoir de tenir le bon bout cette fois...

    Prenez encore le temps de cette lecture car elle est instructive. Un peu d'histoire ne fait pas de mal !

    Le boulevard de la Chapelle fait partie du réseau de voies dites des Fermiers-Généraux, qui ont remplacé vers 1864, l’enceinte du même nom correspondant aux limites du Paris de 1789. La vocation initiale de ces boulevards et de leur terre-plein central planté, outre de créer un réseau périphérique doté de transports en commun (tramway), était d’offrir aux parisiens un espace continu de promenade.

    Cette vision a été fortement remise en cause avec la construction de la ligne 2 du métro en aérien au début du XXe siècle puis avec l’essor de la voiture. Aujourd’hui, la prédominance automobile restreint les espaces dédiés aux piétons. Devant le fort encombrement et la fragmentation des espaces publics qui entravent les cheminements piétons, cette artère est vécue comme une coupure urbaine entre les 10ème, 18ème et 19ème arrondissements.

    L’axe jouit néanmoins d’atouts importants, dont sa situation stratégique aux échelles métropolitaine et locale. Le quartier reçoit 665 000 voyageurs quotidiens via ses gares. Il bénéficie aussi, par la présence de l’hôpital Lariboisière, d’un équipement de santé important. Le Sacré-Coeur, la butte Montmartre, ses artistes et son histoire forment un pôle touristique majeur de la capitale qui participe au rayonnement francilien et à la visibilité internationale du lieu, tout comme le bassin de la Villette, le Louxor et le 104. Par ailleurs, le marché Barbès, qui s’installe 2 fois par semaine sous le viaduc entre Barbès et le carrefour Maubeuge est un pôle d’attractivité fort, engendrant des nuisances récurrentes dont se plaignent les riverains.

    L’ouvrage d’art que constitue la ligne aérienne du métro constitue un intérêt patrimonial, témoin de l’architecture industrielle parisienne par la délicatesse du dessin de sa structure iconique et la prouesse technique du franchissement en particulier. Le boulevard structure le fonctionnement de la vie urbaine du quartier (métro, commerces, services). Il profite aussi de la proximité d’acteurs culturels dynamiques (Bouffes du Nord, Centre Barbara) et de nombreux équipements scolaires.

    P1080226.jpeg

    Le Théâtre des Bouffes du Nord

    L’encombrement de l’espace sous le métro aérien empêche de porter un regard dans l’axe du boulevard et dissuade de l’emprunter comme une promenade. Il contraint les flux piétons et induit des espaces résiduels, dénués de flux et d’usages, qui invitent à l’appropriation par des pratiques marginales. Les piétons n’osent ni emprunter, ni franchir le terre-plein, et restent sur les trottoirs latéraux, de trois mètres, devenus trop étroits, grignotés par les étals des commerces, les livraisons fréquentes et les nombreux regroupements de personnes statiques.

    Au niveau du carrefour de la Chapelle, c’est la question de la sécurité des piétons, cyclistes et autres usagers que posent chaque jour l’encombrement de l’espace et le trafic automobile. L’espace, inconfortable, n’est qu’un lieu de passage et un carrefour routier. Cela lui confère une faible mixité d’usages et d’usagers. Par ailleurs, les nuisances telles que le bruit ou la pollution influent négativement sur la qualité de vie des habitants. Enfin des problématiques de genre se posent dans la fréquentation de l’espace public.

    La linéarité du boulevard, la présence du métro aérien, fort marqueur de l’identité et de l’histoire du lieu et l’horizon dégagé qu’offre les grandes perspectives des deux faisceaux ferrés sont des éléments qui constituent un potentiel majeur de revalorisation du secteur. Le projet d’aménagement d’une promenade urbaine sur cet axe entre les stations de métro Barbès et Stalingrad bénéficie de plusieurs inscriptions budgétaires. Une enveloppe prévisionnelle de 8 M€ répartie pour moitié entre les 10ème et 18ème arrondissements est inscrite au programme d’investissement de la mandature. Lors du vote au budget participatif 2015, le projet « Mieux éclairer le viaduc de la Ligne 2 du métro aérien » a été retenu et est doté d’une enveloppe complémentaire de 0,2 M€. Le budget participatif 2016 vient de retenir le projet «oasis urbaine à la place de la chapelle » doté d’un budget de 1,5 M€.

    (source : 2016 DVD 169 Aménagement d’une promenade urbaine du boulevard de la Chapelle au Boulevard de la Villette dans les 10e, 18e, et 19e - Autorisation donnée à la Maire de Paris de prendre toute décision relative à la réalisation de cette opération )

    Si nous calculons bien, l'ensemble du budget serait donc de 9,7 M€ entre le PIM, l'éclairage du viaduc au budget participatif 2015 et l'oasis de La Chapelle dans celui de 2016.

    Depuis l'été dernier, un nouvel acteur est entré dans le dossier, c'est l'Atelier d'architecture autogérée (AAA). Depuis lors, nous avons régulièrement suivi les ateliers de l'AAA, installé d'abord dans le conteneur à côté au square Louise de Marillac, place de La Chapelle, puis depuis janvier de cette année, dans le nouveau centre d'animation du 18e, 26 bd de La Chapelle. Nous avons même tenu, à l'automne, une réunion de notre commission ad hoc, dans le Civic Lab, comme nous l'avait suggéré le directeur de l'AAA, Monsieur Constantin Petcou. 

    Et maintenant...., comment le dire ? Nous ne sommes pas tout à fait convaincus par la méthode employée par l'AAA. Nous sommes trop classiques ? Pas assez ouverts aux méthodes collaboratives prônées par cette équipe ? Nous ne comprenons pas l'efficacité des réunions en plein air, l'ouverture aux passants, aux usagers, la cartographie émaillée de post-it de couleur ? Peut-être. Nous voulons voir des cartes, des propositions, des aménagements de voirie et d'espace public, noir sur blanc, sur des schémas ou des écrans. En discuter avec les habitants, peser le bien fondé de telle ou telle idée, juger de l'opportunité de telle transformation, apprécier l'introduction d'actions culturelles nouvelles.... Le tout étayé sur les bases solides des techniciens de notre Direction de la voirie, des comptages qui permettront de détourner les flux automobiles ou de les réduire. Mais rien de tout cela ne vient. Malgré notre assiduité aux présentations de l'AAA, la dernière date du 3 mars, nous restons sur notre faim. La présentation des associés au projet, agences d'architecture, bureaux d'études, constructeurs, recycleurs, agriculteurs, paysagistes, etc., nous a même déconcertés. Les réalisations projetées, et sans doute choisies comme exemple, le 3 mars, ne semblent pas adaptables à un parcours linéaire, situé sous un viaduc de la fin du 19e siècle.

    Alors nous avons cherché à comprendre et à voir qui sont les promoteurs de cette aventure. 

    D'abord, l'AAA et son Civic Lab (c'était aussi le nom du conteneur parti en fumée en décembre). Le Parisien s'autorise le qualificatif "architecte-activiste" pour nous présenter Monsieur Petcou dans un article de mars de l'an passé...., quand la majorité des occurrences de Google convergent vers l'Agrocité de Colombes, démantelé le mois dernier, pour des raisons qui appartiennent aux autorités municipales de cette commune de l'ouest parisien. 

    Pour avoir une idée de ce que sont les orientations de l'Atelier d'architecture autogérée, nous avons visionné un reportage de FR3 récent, suite à la mobilisation en faveur de l'Agrocité, peut-être l'expérimentation la plus poussée dans le temps, et menacée de démantèlement à Colombes : 



    Nous pouvons comprendre la déception des riverains de ce grand carré de jardin, et leur envie de le conserver. Cela semblait être un havre de paix, un point de rencontre, un lieu convivial. Pourtant, au-delà de ces considérations positives, nous voulons souligner le fossé qui existe entre les caractéristiques du site de Colombes et l'axe de La Chapelle. Pour l'un, un environnement situé à mi-chemin entre des zones pavillonnaires et des grands ensembles, à 9 km de la Porte de Clichy et du périphérique, dans une boucle de la Seine, pas vraiment champêtre, puisque nous sommes là à quelques encablures (environ 500 mètres) des bassins du port de Gennevilliers et que le ton est plutôt industriel, locaux professionnels, camions, grues... Très loin du secteur densément peuplé qui se trouve entre Barbès et Stalingrad, pour l'autre. 


    Aussi, avons-nous du mal à comprendre les activités du pôle de concertation citoyenne que nous propose l'AAA. Que viennent faire ici les leçons d'alimentation bio auxquelles nous a invitées l'AAA, les cours de cuisine traditionnelle ou de couture, quelques dizaines de personnes autour d'une crêpe ou d'un vin chaud ? 

    Est-ce bien une ferme urbaine ou un stand de réparation de vélo que nous souhaitons dans notre quartier ? 

    jardins.jpg

    Les plantations près du square Louise de Marillac.

    Pas vraiment. Nous renouvelons notre attente de mesures concrètes d'aménagement de voirie qui rendront la place de la Chapelle plus sûre pour les piétons, la sortie du métro moins chaotique, les trottoirs plus fréquentables, les squares enfin accessibles aux enfants et à leurs familles. Nous voulons des relations entre les acteurs culturels qui jalonnent cette promenade, des animations qui les mettent en valeur et qui incitent les habitants de ce quartier à entrer plus facilement aux Bouffes du Nord, au 104 ou au Louxor. Ce ne sont pas quelques carrés d'herbes folles entretenus difficilement par des personnes trop pressées qui changeront l'image de nos quartiers et feront du boulevard de La Chapelle un lieu de promenade. 

     

    P1080476.jpeg
    Le carrefour Maubeuge-Tombouctou

  • Les samedis politiques d'AB : Myriam El Khomri

    8046669097_1fe2a9f817_s.jpgNous continuons nos interviews de personnalités politiques, présentes dans nos arrondissements autour de Barbès, dans la perspective des municipales de l'année prochaine. Aujourd'hui rencontre avec Myriam El Khomri que nous avons rencontrée à la mairie du 18e. 

    Nous nous connaissons depuis longtemps, fréquentant les mêmes conseils de quartier, les mêmes réunions du comité de Pilotage Barbès, aussi nos questions ne vont-elles pas vous surprendre.

    Mais d'abord quelques mots de présentation pour nos lecteurs un peu éloignés de Barbès, car nous en avons aussi. Vous êtes élue du 18e arrondissement, et adjointe au maire de Paris chargée de la prévention et de la sécurité, depuis 2008.

    Vous êtes très active dans le comité de pilotage Barbès mais aussi dans le comité de suivi de la ZSP Goutte d'Or – Château rouge auquel notre association a participé lors de sa dernière réunion. Maintes fois, nous vous avons contactée pour des problèmes de ventes illicites de cigarettes, ou pour l'occupation de l'espace public par des marchés sauvages, dans les rues situées autour de la station de métro Barbès-Rochechouart. On ne constate pas une amélioration flagrante et nos adhérents ne manquent pas de nous en faire la remarque. Nous entrons en campagne pour les municipales de 2014, vous allez y prendre toute votre place en tant que porte-parole d'Anne Hidalgo et nous allons suivre de près le projet pour la prochaine mandature.

    • Concernant la sécurité justement, comment voyez-vous l'incidence de la récente réorganisation de la DPP (direction de la prévention et de la protection) au niveau de ces objectifs et du redéploiement des moyens sur la vie des Parisiens ? Pouvez-vous nous en dire quelques mots et aussi ce qu'ils peuvent en obtenir au niveau de leur tranquillité, et de la régression des incivilités par exemple ?

    La réforme engagée en 2012 avait pour but un rééquilibrage vers les quartiers populaires. Il y a eu création de 6 circonscriptions au lieu du découpage ancien avec une équipe VTT dans chacune d'elles. Des secteurs ont été définis comme prioritaires, le Nord avec les 9-18 et le Nord-Est aves les 19-20. Le 10e est couplé avec le 11e et forme la zone Centre.

    On a créé un mouvement des postes administratifs vers des postes de terrain. La NBI  ZUS (nouvelle bonification indiciaire de zone urbaine sensible) qui est attribuée à certains personnels travaillant en zone urbaine sensible permet de fidéliser des agents sur le quartier les plus difficiles.

    Les deux objectifs étaient 1° que les forces de la DPP soient plus accessibles pour les parisiens et plus présentes sur le terrain et 2° qu'elles aient recours à davantage de verbalisation, bien sûr en complémentarité avec la police. Un indice est révélateur : il y a eu autant de PV pour les 6 premiers mois de 2013 que pour toute l'année 2012, dont beaucoup concernent l'insalubrité et les terrasses et étalages. Pour vous donner une idée, depuis le début de la ZSP sur le quartier de la Goutte d'Or, les agents ont dressé 353 PV sur terrasses et étalages (une soixantaine pour le seul mois de mai) et 762 PV pour insalubrité, dont 580 pour épanchement d'urine ! On expérimente aussi les urinoirs de rue, à la demande des habitants.

    3455439914.jpgNous avons marqué une certaine distance avec cette « bonne idée » car certains urinoirs sont situés en plein vent, au beau milieu du passage des piétons, et sont peu propices à provoquer des épanchements, justement... Nous avions écrit sur les premiers apparus à l'été 2010 près de la rotonde de La Villette. 

    Les aménagements de voirie sont importants aussi pour améliorer la situation : par exemple, l'élargissement de l'allée centrale du marché de La Chapelle (sous le viaduc du métro) semble donner satisfaction. Elle permet de limiter l'occupation par les volants (petits marchands sans autorisation) et facilite le passage de la clientèle. Pour info, la sécurisation du marché par les ISVP —inspecteurs de sécurité de la ville de Paris— a déjà demandé 495 heures de présence depuis octobre 2012.) De même, la présence de CRS est dissuasive et a toute sa place dans le dispositif en attendant les groupes renforcés. Nous aurons des policiers fidélisés à partir de janvier 2014 avec un gros effort sur les sorties d'école confiées aux gardiens de la paix (2500 policiers supplémentaires sur le national, en priorité sur les ZSP.) L'arrondissement devrait en bénéficier.

    Les ISVP font aussi respecter les autorisations de terrasses et étalages, ils n'hésitent pas à verbaliser en cas de récidive de certains commerçants : le PV peut être requalifié et atteindre 1500 euros sur décision du tribunal !

    Nous évoquons le haut du Magenta qui sur ce plan n'est pas exemplaire. Myriam El Khomri note qu'une intervention peut être demandée. Elle nous fait remarquer aussi que le magazine A Paris consacre un article ce mois-ci aux inspecteurs de la DPP. 

    • Plusieurs fois nous avons eu des échanges au sujet des adolescents originaires d'Europe de l'Est que nous croisons dans les transports en commun, notamment sur la ligne 2, mais aussi près des distributeurs de billets. Ils sont parfois très insistants voire inquiétants pour les touristes, dont la presse dit que certains, notamment les Asiatiques, commencent à craindre les conditions de sécurité à Paris. Quelles mesures peuvent-elles être prises ? Que comptez-vous faire ? Sachant que souvent ils sont mineurs et qu'ils sont sous l'emprise d'adultes organisés...

    paris,myriam-el-khomri,barbès,zsp,sécurité,vol-à-la-tir,dpp,hamidovicOn dit souvent que ces adolescents sont originaires de Roumanie mais ils viennent aussi de Bosnie et des autres pays de l'Est. L'Etat est compétent sur ces jeunes au titre de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) et l'hébergement d'urgence.

    On veut travailler sur 4 axes : le démantèlement des réseaux de traite, une aide à l'enfance adaptée avec protection des mineurs, la recherche des familles, et la création de centres avec un placement transfrontalier quand la famille est au pays.

    Depuis l'automne 2010, cinq réseaux ont été démantelés. Rappelez vous du réseau Fehmi Hamidovic dont la presse s'est fait l'écho en mars à l'occasion de l'ouverture du procès. Quand il est tombé, on a constaté 50% de baisse des vols à la tire ! Il avait des jeunes filles un peu partout dans un réseau ramifié spectaculaire, de l'Italie à l'Espagne. En réalité, je déplore que la traite des enfants semble peu considérée par l'Europe et trop peu sanctionnée pénalement, car Hamidovic avait déjà été jugé et incarcéré en Autriche. Trop peu ! Les réseaux sont extrêmement bien organisés. Ils connaissent parfaitement les dispositifs juridiques européens et s'adaptent rapidement, voire se reforment avec un autre membre de la famille. Une fois qu'on a interpellé les chefs de réseaux, si les jeunes filles sont majeures, elles vont à Madrid où la loi tolère la prostitution. Quant aux mineurs, ils ne restent pas sans « tuteurs » bien longtemps, ils retournent vers leur bourreau ! Dans de rares cas, si l'on réussit à les convaincre de sortir de cette vie de délinquance, ils sont conduits dans des centres éducatifs, des internats, mais ils fuguent très vite. Notre aide à l'enfance est mal adaptée en France pour les enfants victimes de ces réseaux.

    Il faut savoir que la moitié des mineurs incarcérés à Paris sont originaires des pays de l'Est.

    On cherche donc à créer un endroit sécurisé, parallèlement il faut retrouver les familles, puis tenter un retour au pays d'origine. Une autre piste que nous explorons est le placement transfrontalier, c'est à dire à proximité de leur famille d'origine et par conséquent de leur pays d'origine.

    En juin, 20 policiers roumains viennent donner un coup de main à Paris, ce n'est pas la première fois : ils permettent notamment de faciliter l'identification des réseaux.

    Dans le cadre d’une actualisation du Contrat de Sécurité Parisien, le 2 juillet prochain, nous établissons avec le Préfet de Police et le Procureur de la République une fiche action spécifique du Contrat de Sécurité sur ces mineurs victimes de réseaux et autres actes de délinquance 

    • Début juin, le 6 précisément, une opération de police de grande envergure a eu lieu dans la Goutte d'Or, partie sud, la plus proche de Barbès. Nous avons eu des échos divers de la part de nos adhérents. Certains se sont étonnés de la manière, d'autres ont considéré qu'elle s'apparentait plus à une démonstration de force qu'à une opération vraiment efficace. Car la présence de cars de CRS à côté de certains trafics qui se déroulent tout près continue de surprendre. Qu'en pensez-vous ? Quel était le but ? Pouvez-vous donner un premier bilan de cette opération ?

    paris,myriam-el-khomri,barbès,zsp,sécurité,vol-à-la-tir,dpp,hamidovicL'opération du 6 juin s'est faite avec accord du parquet et sur 3 axes : le recel, les cambriolages et le contrôle d'établissements.

    Il a duré une petite heure entre 15h et 16h car il fallait que tout soit terminé avant la sortie des écoles. C'était un engagement très ferme.

    A ce sujet, Myriam El Khomri nous a transmis le courrier du Préfet de police, Bernard Boucault, envoyé à La Ligue des Droits de l'Homme, qui l'avait interpellé. L'association s'était en effet inquiétée du déroulement de cette opération policière. Nous reprenons ici une large partie de ses propos.

    « l'ensemble des personnes contrôlées l'ont été sur la base d'une réquisition du procureur de la République et ont immédiatement disposé de l'ensemble des droits et des possibilités de recours prévus par le législateur.

    Sur le fond, je souhaite vous indiquer que les contrôles réalisés le jeudi 6 juin l'ont été dans un triple objectif.

    En premier lieu, les services de police ont acquis la conviction qu'un certain nombre de cambrioleurs d'habitude, particulièrement actifs sur ce secteur de l'arrondissement, étaient susceptibles de se trouver dans le quartier ce jour-là.

    Le renforcement des opérations de contrôle trouve toute sa place dans le cadre de la mise en oeuvre énergique du plan de lutte contre cette forme de délinquance mis en oeuvre à l'échelle de l'agglomération parisienne.

    En second lieu, cette opération visait à lutter contre un certain nombre de receleurs spécialisés dans la revente immédiate d'objets provenant précisément de cambriolages ou de vols avec violence, ainsi que les constatations policières l'ont établis.

    Enfin, le contrôle simultané de plusieurs établissements, commerces et débits de boissons, qui constitue l'une des priorités des services de la préfecture de police dans le cadre de la ZSP, a constitué le dernier volet de l'opération...

    Deux établissements ont été fermés et deux autres devraient l'être prochainement...

    L'opération a donné lieu à des suites judiciaires, 16 personnes étant placées en garde à vue pour des infractions autres que celles relatives au droit au séjour, notamment pour des faits de recel, de port d'arme prohibé ou en raison de l'existence de fiches de recherche.

    Il est exact que certaines personnes ont vu leur situation administrative contrôlée et ont pu être conduites, en raison d'une infraction à la législation sur le séjour, dans un centre de rétention, d'où elles ont pu faire valoir leurs droits.

    Ces opérations de contrôle, organisées ponctuellement et à bon escient ont vocation à venir en appui du travail de fond des fonctionnaires de police locaux... »

     

    Myriam El Khomri nous a enfin informés de sa visite à Genève, accompagnée notamment du commissaire du 10e, Gilbert Grinstein, pour rencontrer les responsables de

  • Drogues, propreté, réduction des risques

    Deux rendez-vous importants étaient organisés cette semaine dans le Nord du 10e, deux visites de terrain dont l’unique sujet était la propreté et la réduction des risques liés à la consommation de drogues sur la voie publique - scènes en plein air - risques aussi bien pour les riverains que pour les toxicomanes.

    Le premier rendez-vous était lundi 19 mai au matin pour une marche exploratoire permettant de constater une situation qui a, semble-t-il, tendance à se dégrader. Nous vous en faisons un rapport complet tant les informations recueillies sont importantes et vous donneront, mieux que des commentaires, une assez bonne idée de ce qui se passe.

    Visite propreté réduction des risques dans le 10e et le 18e - 19 mai 2014

    Le point de rencontre était devant le parvis de l'église Saint-Vincent de Paul à 9h. Il y avait environ 25 personnes dont des membres de l’association Coordination Toxicomanie qui organisait la marche exploratoire, des membres de l’association GAIA, des membres de la Mission métropolitaine de Prévention des conduites à risques (ex-mission Toxicomanie de la Ville de Paris), des membres de la Direction de la Propreté et de l’Eau (DPE) du 18e, notamment les chefs de zone Goutte d’Or et La Chapelle, et du 9e-10e, des agents du SMASH, des membres de la Direction de la Prévention et de la Protection (DPP), l’association SAFE qui est le gestionnaire des distributeurs automatiques de kits santé pour les toxicomanes et bien sûr des élus des 10e et 18e arrondissements.

    Premier arrêt devant la sanisette de la rue Ambroise Paré. Nous attendait un responsable de la société JCDecaux avec deux agents qui oeuvrent sur place dans le quartier.
    La zone regroupe 14 sanisettes, celle de la rue Ambroise-Paré est au sommet du podium pour le nombre de seringues retrouvées, soit dans la sanisette même, soit dans les réceptacles de la partie technique à l'arrière. C'est après le week end qu'on en retrouve le plus. La moyenne jour s'établit autour de 70 !

    JCDecaux verse une prime à ses agents qui travaillent sur cette zone, ils y restent environ un an, pas plus, et ensuite sont envoyés dans le 15e en général. Ils bénéficient d'une formation ad hoc pour le ramassage des seringues et ont un point de rappel des conduites à tenir tous les 15 jours. Il y a aussi passation des consignes d'un agent à l'autre lors des changements de zone.

    Le groupe a emprunté ensuite la rue Guy Patin : Coordination Toxicomanie a expliqué que la rue était aussi touchée par les seringues usagées mais de façon plus aléatoire. Néanmoins, les agents de la Propreté doivent redoubler de vigilance pour les débusquer notamment à cause de toutes les emprises de l'hôpital, les grilles anti-intrusion, qui rendent la tâche difficile..

    Deuxième halte sous le viaduc au milieu du terre-plein central. On est dans le 18e. Il y là aussi une sanisette qui est en train d'être nettoyée mais l'agent n’est pas au courant de la visite et ne comprend pas cette attention particulière de tous ces gens derrière lui ! La DPE décrit les problèmes que rencontrent ces agents, le marché, l'après-marché, l'occupation par la population du quartier qui a l'habitude de vivre à l'extérieur « plus qu’ailleurs »  (sic), l'occupation par les voitures, surtout le dimanche. A la remarque d’Action Barbès que les grilles sont rarement fermées, la DPE  répond qu'elle sont régulièrement forcées — on évoque aussi les marchés à la sauvette et les distributions de soupe populaire. Tout cela complique la tâche des agents et ne contribue pas à la propreté.

    paris,scmr,prévention,réduction-des-risques,salle-de-consommation,salle-de-consoTroisième arrêt, l'automate de kits de seringues stériles situé le long du mur de l’hôpital boulevard de La Chapelle. SAFE raconte son histoire, et celle de celui implanté rue de Maubeuge, leurs scores : 10 000 seringues distribuées par semaine, un kit contenant 2 seringues stériles. Depuis janvier il y a eu 30 jours de rupture d'approvisionnement des distributeurs ce qui signifie que la fourniture ne comble plus la demande, et qu'un usager qui ne trouve pas de kit là, en soirée ou dans la nuit, va avoir du mal à en trouver ailleurs. Il y a alors une nette augmentation du risque. 

    paris,scmr,prévention,réduction-des-risques,salle-de-consommation,salle-de-consoLe groupe a ensuite pris la rue de Maubeuge. A l'angle se trouve un bâtiment de la SNCF avec de nombreux recoins qui lui appartiennent et qu'elle ne nettoie pas régulièrement. Comme c'est privatif, le balayeur Ville de Paris qui passe ne pousse pas son balai... Toutes les grilles installées pour empêcher les gens de dormir là sont occupées par des bacs à plantes, truffées de cochonneries aussi. Ce manque d'entretien ne contribue pas à donner un aspect soigné de cette rue, même si par ailleurs les agents de la DPE 10e nettoient bien. C'est la limite de la coopération. Interrogée afin de savoir pourquoi la Ville ne nettoie pas tous ces recoins, directement, et ne facture-t-elle pas sa prestation à la SNCF, une élue du 10e répond que les propriétaires des lieux — la SNCF — sont responsables de leur entretien. Des rencontres régulières devront être mises à profit pour rappeler à la SNCF ses obligations. 

    La SNCF a fait une demande à GAIA pour que le bus et l'automate de la rue de Maubeuge soient déplacés, un peu plus loin. L’argument avancé est qu’ils se trouvent sur le chemin de nombreux clients de la SNCF qui circulent entre la gare et la consigne, et qu’il y aurait eu des agressions, ce serait anxiogène. Mais en fait, personne n'a eu d'échos de quelconques agressions sur des voyageurs. La police du 10e soutient cette demande. L'Hôpital, interrogé par nos soins, reste vigilant sur le lieu choisi ou probable, et pour tout dire, circonspect. 

    Quatrième halte, toujours sous le viaduc au carrefour Tombouctou, près de la station Vélib’. C'est le SMASH (Service Municipal d’Actions de Salubrité et d’Hygiène) et la DPE 18e Chapelle qui brossent le tableau. Les points de concentration des seringues sont dans le square de Jessaint, autour et derrière les palissades du terre plein central au-dessus des voies, sans qu'on sache vraiment si elles sont jetées par dessus ou si les usagers s'injectent derrière. Le point de vue évolue en fonction des observations de GAIA et de la DPE-SMASH. D'autres nuisances sont décrites, les points urine, comme le 28 place de La Chapelle, malgré une sanisette sur la place. Coordination Toxicomanie cherche à favoriser des actions spécifiques, avec les habitants, hors conseil de quartier, grâce à l'énergie de quelques uns d'entre eux. La présence de rats  est confirmée, malgré les dispositifs imaginés par le SMASH. Les agents de la déchèterie continuent à s'en plaindre. Le SMASH dénonce aussi la distribution de pain sur la passerelle.  Le square a été fermé plusieurs fois. Coordination Toxicomanie précise que les habitués du quartier ne sont pas tous usagers de drogue, notamment les gens qui se réunissent dans le square ou autour des grilles. Mais ils sont souvent "pisseurs". La DPE Chapelle précise que les agents ne sont pas gâtés à certains endroits et que s'ils comprennent que les SDF sont des très précaires, il n'est pas facile de nettoyer urine et excréments en permanence, c'est la cas sous le viaduc à la sortie du carrefour Tombouctou.

    paris,scmr,prévention,réduction-des-risques,salle-de-consommation,salle-de-consoDernière halte, l'espace derrière la gare où se trouve la fresque London Olympiques. La peinture se fane un peu, quelques écritures dessus, là aussi il faudrait un peu d'entretien de la part de la SNCF. Un point positif, le récupérateur de seringues fait bien son office, et les électriciens de la gare qui faisaient usage de leur droit de retrait régulièrement, parce qu'ils ont leur local tout proche, ne le font plus. Néanmoins on retrouve entre l'arrière des murs peints en fresque et la façade de la gare de nombreuses seringues. Un lavage venait d'être fait, le jet avait repoussé les seringues sous les fenêtres dans un espace protégé par les fameuses grilles, on en comptait une bonne trentaine. Présence aussi d'un homme d'âge moyen, SDF, dormant dans le coin : contacté, il dit qu'il "fait le ménage" et jette les seringues là (sans protection !), il écrit en lettres capitales sur les murs peints de la fresque des demandes bien senties pour que les toxicomanes ne laissent par leurs cochonneries dans le coin (il utilise un autre terme !). Cet espace entre façade de la gare et muret peint est devenu le seul endroit un peu en retrait où l'usager peut pratiquer son injection, caché des rondes de police. Ca peut prendre entre 2-3 minutes et 20 minutes quand la veine est peu apparente ou abîmée par les nombreuses injections.

    A la fin de cet itinéraire, alors que nous étions moins nombreux, une discussion moins officielle a permis de comprendre que la Brigade Spécialisée de terrain (BST) n’était pas composée de gentils policiers compréhensifs et bien formés au contact avec le monde de la toxicomanie. Ils ont des consignes afin de sanctuariser l'espace derrière la gare. L'atmosphère s'en ressent côté usagers de drogues. 

    A plusieurs reprises, l'ensemble des participants s'est déclaré très favorable à l'ouverture de la SCMR.

    Stands d’information de la mairie de Paris

    Après la marche exploratoire de lundi matin, Coordination Toxicomanie et la DPE, en association pour la 3e année consécutive, ont installé deux stands d’information mercredi 21 et vendredi 23, l’un à la sortie Guy-Patin de la station Barbès-Rochechouart et l’autre rue Ambroise-Paré devant l’hôpital Lariboisière, angle rue Saint-Vincent de Paul.

    paris,scmr,prévention,réduction-des-risques,salle-de-consommation,salle-de-consoL’idée est de diffuser de l’information aux riverains pour mieux les sensibiliser aux problèmes du quartier, notamment en ce qui concerne la présence des toxicomanes et les risques liés à la présence des seringues usagées. Mais l'idée est aussi de montrer aux usagers de drogue eux-mêmes quels sont les bons comportements à adopter pour ne pas mettre en danger les autres habitants  via les seringues abandonnées. 

    Un court questionnaire pouvait être rempli afin de voir quelle perception les riverains ou passants ont de ces questions et beaucoup de documentations étaient mises à disposition.

  • Les propositions d'Action Barbès pour la prochaine mandature

    Nous sommes à quelques jours du premier tour des élections municipales, à quelques jours de la fin d'une campagne électorale qui a commencé depuis de long mois. Durant cette campagne, Action Barbès a rencontré de nombreux candidates et candidats à la mairie de Paris et à celle des 9e, 10e et 18e arrondissements, et ces rencontres ont été autant d'occasions pour notre association pour proposer des idées pour la mandature à venir.

    Chacun de ces projets que nous vous présentons plus bas, est une proposition qui, si elle est retenue, devra évidemment faire l'objet d'un débat public le plus large possible, avec un travail de concertation avec tous les habitants et les acteurs des secteurs concernés, sans compter les études techniques préalables. Elle doivent donc être étudiées et discutées ; ce ne sont pas des projets "clé en main", mais des pistes de réflexion et des propositions pour améliorer le cadre de vie de nos quartiers, objectif que s'est fixé notre association. Des candidats ont repris certaines de ces propositions dans leur programmes, partiellement ou dans leur ensemble.

    Nous avons donc accepté de rencontrer tous les candidates et les candidats qui nous ont sollicités ces derniers mois, certains à plusieurs reprises. Action Barbès étant une des plus importantes et anciennes associations de riverains du secteur, il est normal que beaucoup des candidats demandent à nous rencontrer, aussi nous nous sommes prêtés au jeu de bonne grâce.

    Au cours de ces rencontres, non seulement nous avons pu évoquer des aménagements concrets avec nos propositions, mais nous avons également abordé les questions liées au mode de fonctionnement des services municipaux, et à la place des habitants dans les prises de décisions municipales (conseils de quartier, budget participatif, concertation...). Une bonne occasion de mesurer le degré de préparation des candidats à la fonction de maire de Paris ou de maire d'arrondissement. Mais nous nous garderons de porter publiquement une appréciation sur les candidatures, car si l'engagement d'Action Barbès dans la cité est bel et bien un engagement citoyen, il n'en est pas pour autant politicien, et ce ne serait pas son rôle d'association de riverains (ni dans ses statuts) dont la parole engage tous ses adhérents. Chacun saura donner sa voix selon ses convictions et au regard des programmes. Et quelle que soit l'équipe en place au terme des élections, Action Barbès restera toujours dans une posture de critique constructive et toujours attentive à la qualité du cadre de vie de nos quartiers.

     


     

    9e - 10e - 18e :

    Réaménagement du carrefour Barbès-Rochechouart

     

    État des lieux

    Le carrefour Barbès-Rochechouart est un carrefour où les circulations automobiles, piétonnes et cyclistes sont très denses. Son aménagement est déjà ancien et essentiellement pensé pour la circulation automobile au détriment des autres formes de déplacements. De plus, il manque un aménagement urbain qui fasse la jonction entre les aménagements des boulevards Rochechouart et de Clichy à l’ouest et la promenade urbaine à l’est.

    Proposition

    Nous proposons le réaménagement du carrefour Barbès-Rochechouart, du barreau Patin à la place du Delta.

    Les grands principes

    - Circulations piétonnes "priorisées" et sécurisées, création d’un passage piéton est-ouest sous le viaduc du métro.

    - Continuité des circulations des vélos, dans les sens nord-sud (boulevards Barbès et de Magenta) et dans le sens est-ouest (boulevards de la Chapelle et de Rochechouart)

    - Sécurisation de la traversée de la place du Delta pour les cyclistes (est-ouest et ouest-est).

    - Suppression du stationnement au droit des numéros 114 à 126 du boulevard de la Chapelle, création d’un lincoln (emplacement sur trottoir) pour les livraisons.

    - Suppression du kiosque à journaux ou déplacement (si reprise d'activité) boulevard de Magenta, côté 9e arrondissement.

    municipales,propositions,action-barbès,9e,10e,18e


     

    10e :

    Pour une esplanade piétonne devant la gare du Nord

    État des lieux

    La gare du Nord s’apprête à connaître des grandes modifications à l’horizon 2024, l'esplanade est aujourd'hui largement occupée par la circulation de véhicules motorisés et par le stationnement des scooters.

    Proposition

    Création d’une grande esplanade piétonne devant la gare du nord, englobant la place Napoléon III et le boulevard de Denain. Seules les circulations de bus seraient maintenues, l’accès et le stationnement seraient totalement interdits aux automobiles (taxis et VTC compris) et aux deux-roues motorisés. Les terrasses des bars, des restaurants et des commerces pourraient être favorisées.

    Les grands principes

    - Circulations piétonnes "priorisées" et sécurisées.

    - Suppression de la circulation motorisée à l'exception des bus.

    - Végétalisation - par la Ville - en pleine terre quand cela est possible (boulevard de Denain) ou en bacs et en bacs enterrés.

    - Suppression du stationnement des scooters en surface (création de parkings sécurisés en sous-sol).

    - Des aménagements qui respectent le cadre historique et la façade classée MH de la gare.

    municipales,propositions,action-barbès,9e,10e,18e


     

    10e -18e :

    Pour la création d’une zone Paris respire le dimanche sur la Promenade urbaine, la rue Marx-Dormoy et la rue du faubourg Saint-Denis

    État des lieux

    Les boulevards de la Chapelle et de la Villette sont à présent largement remaniés avec la création de la Promenade urbaine. Avec la rue Marx-Dormoy et la rue du faubourg Saint-Denis, ces axes sont particulièrement générateurs de pollution de l’air et sonore que subissent les riverains. La circulation est cependant relativement réduite le dimanche.

    Proposition

    Nous proposons la création d’une zone "Paris Respire" tous les dimanches sur la Promenade urbaine, de Barbès à Stalingrad et la rue Marx-Dormoy et la rue du faubourg Saint-Denis (de la rue de Dunkerque au boulevard de la Chapelle), un bon nombre d’axes secondaires du secteur pourraient être englobés dans le projet. L’idée principale est d’offrir aux habitants et aux visiteurs du secteur une respiration hebdomadaire, c’est aussi l’occasion de pouvoir profiter pleinement de la Promenade urbaine. Mais il ne s’agit pas simplement de couper la circulation automobile (hormis  pour les riverains, les véhicules de police et de secours, les bus et les taxis), mais également d’animer ces axes, en impliquant les acteurs culturels du lieu notamment, mais en créant des animations, particulièrement sur l’espace très important du marché Lariboisière qui offre un potentiel très fort.

    Cette opération permettrait aussi aux acteurs économiques sur le parcours de la Promenade urbaine et la rue Marx Dormoy de développer des activités liés à cet espace apaisé (terrasses, animations commerciales…). Il est à noter que la circulation relativement réduite sur cet axe le dimanche permet d’envisager cette opération hebdomadaire sans que le report de circulation ne puisse saturer les axes routiers aux alentours. Mais il convient d’orienter le flux automobile en amont, notamment porte de la Chapelle, afin d’éviter que les axes secondaires ne soient trop empruntés. La mise en place d’une zone Paris respire sur des grands axes de circulation serait une première et un signal fort pour marquer la transition d’une ville vers des modes de déplacement plus durables.

    Les grands principes

    - Mise en place d’une zone Paris respire sur les boulevards de la Chapelle et de la Villette, de Barbès à Stalingrad, la rue Marx-Dormoy et la rue du faubourg Saint-Denis (de la rue de Dunkerque au boulevard de la Chapelle) et un certain nombre de rues du secteur à déterminer en concertation avec les habitants et les acteurs des secteurs concernés.

    - Maintien de certaines circulations automobiles nord-sud (boulevard Barbès-boulevard de Magenta, rue d’Aubervilliers-rue du Château Landon).

    - Favoriser et inciter les animations de ce secteur par les acteurs culturels situés sur son espace (Le Louxor, FGO centre Barbara, bibliothèque de la Goutte d’Or, bibliothèque Vaclav Havel, Théâtre des Bouffes du Nord, théâtre de la Reine Blanche…), animation de l’espace du marché Lariboisière.

    - Favoriser les terrasses et les animations commerciales (dans le respect de la législation).

    municipales,propositions,action-barbès,9e,10e,18e


     

    10e - 18e :

    Pour la création d’un marché des biffins

    État des lieux

    Cela fait pratiquement vingt ans qu’un marché sauvage des biffins s’implante toutes les semaines, d’abord du côté de Ménilmontant pour finir aujourd’hui entre Barbès et la Chapelle. Un marché ou se mêlent des receleurs notamment. Depuis de nombreuses années, toutes les semaines, les mercredis et samedis, jours de marché à Barbès, un jeu du chat et de la souris se met en place entre les vendeurs et les forces de l’ordre sans que jamais le phénomène ne soit résorbé ; certains fonctionnaires en charge de ces actions rechignant même à "faire la chasse aux pauvres" selon leurs propres mots, et nous pouvons les comprendre. Toutes les semaines ce sont des tonnes de marchandises qui sont confisquées et jetées aux ordures d'où elles venaient pour la plupart. Pourtant cette véritable économie circulaire, qui en d'autres lieux serait mise en valeur et célébrée, devrait selon nous être considérée comme telle et plutôt valorisée plutôt que vainement pourchassée. C’est déjà la cas porte de Montmartre dans le 18e arrondissement, mais également à Montreuil (93), pour citer ces exemples proches, où des marchés des biffins encadrés ont été mis en place depuis plusieurs années.

    Proposition

    Nous proposons la création d’un marché encadré des biffins, à la suite du marché de Lariboisière. Cette organisation de ce qui est aujourd’hui une économie circulaire des plus démunis permettrait de juguler ce phénomène et ses conséquences fâcheuses, comme la malpropreté et l’entrave à la circulation, tout en assurant aux "vendeurs" de pouvoir continuer cette activité qui leur apporte un modeste revenu complémentaire et qui pour certains est un véritable lieu de socialisation. Conséquemment, la brigade "anti-sauvette" nouvellement créée au commissariat du 18e pourrait consacrer son temps et son énergie aux "vraies" ventes à la sauvette (contrefaçons, recel, cigarettes…).

    Les grands principes

    - Organisation d’un marché encadré pour les biffins à la suite du marché Lariboisière, le mercredi et le samedi.

    - Des horaires fixes, un périmètre déterminé et un nettoiement du lieu par les biffins.

    - Encadrement par une association dédiée, qui vérifie la situation sociale des vendeurs, et encadre et assure le bon déroulement du marché.

    - Un suivi social est proposé aux vendeurs du marché qui le désirent.

    - Seuls et uniquement les objets et vêtements d’occasions (de récupération) peuvent y être vendus, cela exclut les produits neufs ainsi que les produits alimentaires, et bien évidemment le recel.

    - Aucune tolérance de vente à la sauvette en dehors de ce marché organisé et en dehors des horaires déterminés.

    municipales,propositions,action-barbès,9e,10e,18e


     

    18e :

    Pour une diagonale verte à la Goutte d’Or

    État des lieux

    Le sud du quartier de la Goutte d’Or subit une circulation automobile "de traverse", alors que ce quartier est celui de Paris dont les habitants possèdent le moins de véhicules. Outre les bruits générés par le viaduc du métro, la circulation du boulevard de la Chapelle et les trains circulant sur les voies des chemins de fer du Nord, le quartier connaît de forts taux de pollution dans un environnement fortement minéral.

    Proposition

    Création d’une diagonale verte, du square de Jessaint à la rue-jardin Richomme. L’idée est de créer un cheminement pour les circulations douces dans un cadre végétalisé, un corridor vert dans un environnement fortement minéral, en reliant les petits espaces verts qui forment l’esquisse d’une diagonale verte dans la Goutte d’Or. Ces espaces reconquis pourraient accueillir des activités sportives notamment, avec par exemple la mise en place d’agrès sur le pont de Jessaint.

    Les grands principes

    - Circulations piétonnes "priorisées" et sécurisées.

  • L’histoire du Louxor

    François Loyer est aujourd’hui Directeur de Recherche au CNRS mais il a été Vice Président de la Commission du Vieux Paris. Historien de grande notoriété, spécialiste de l’architecture parisienne des 19ème et 20ème siècles, son livre, Paris XIXème siècle, l’immeuble et la rue fait autorité.

    François Loyer a bien voulu se pencher sur le cas du Louxor. Dans un premier temps au titre de la Commission du Vieux Paris puis, plus récemment, pour le compte de l’association Action Barbès. Nous publions ici l’intégralité de la conférence qu’il a bien voulu donner lors de la dernière Assemblée Générale de cette association en septembre 2008.

    oOo

    Le Louxor, Palais du Cinéma

    Les plus anciens cinémas de Paris

    En 1906, l’avocat Edmond Benoit-Lévy inaugurait, sur les grands boulevards, la première des salles non foraines du cinéma. Lié à Charles Pathé, le rival de Gaumont, il était le promoteur d’un cinéma éducateur tourné vers les classes populaires. Bientôt, le développement spectaculaire de ce nouveau support allait en faire une des formes modernes de l’art : en témoigne la création, en 1908,....

     

     

    de l’éphémère « Société du Film d’Art »[1], placée sous la direction artistique du jeune Henri Lavedan (appelé à une grande destinée dans l’histoire de l’urbanisme). À la veille de la première guerre mondiale, existaient déjà plus de trois cents salles de cinéma en France (cent mille aux Etats-Unis !). Saluant la reconnaissance du Septième Art, le Guide Bleu de 1923 indique que Paris en possède désormais près de deux cents : la liste mentionne trente-six adresses, dont celle du « Louxor ». C’est dire la réussite foudroyante d’une industrie artistique appelée à un bel avenir.

     

    Il ne reste pratiquement plus rien aujourd’hui d’une telle flambée de constructions. Seuls quatre cinémas parisiens peuvent se prévaloir de l’ancienneté de leur origine : le Panthéon, 13 rue Victor Cousin, (ouvert en 1907, rénové en 1930) ; le Cinéma Palace, 42, boulevard de Bonne Nouvelle (1907, dans sa version de 1921), le Max Linder Panorama, 24 Boulevard Poissonnière (1912, rénové en 1957 et 2007) et le Latina, ancien cinéma de l’Hôtel de Ville (1913, reconstruit en 1995). Encore faut-il remarquer qu’aucun d’entre eux ne subsiste dans son état initial : seul le site s’en est maintenu, la construction ayant été rénovée à plusieurs reprises. Ils n’en constituent pas moins de précieux souvenirs d’une histoire en train de s’effacer sous nos yeux. Rappelons que le dernier cinéma d’avant 1914, le Ternes Palace, 7-9 rue Pierre-Demours, a été détruit il y a deux ans. Créé en 1911 par E. Benoit-Lévy, il était connu pour son toit ouvrant (qui inspirera l’illustre « Maison du Peuple » à Clichy, dans les années trente). Il faut se rabattre sur le Grand Rex (1931, par Auguste Bluysen et Maurice Dufrêne), la Pagode (une ancienne salle des fêtes, transformée en cinéma la même année), ou le Balzac (1935) pour trouver des souvenirs de l’entre-deux-guerres – le Paramount (1927), dans l’ancien théâtre du Vaudeville, ne subsistant qu’à l’état de fragments dans une succession de rénovations qui l’ont peu à peu défiguré.

     

    Tel qu’il nous est parvenu, Le Louxor (1921) apparaît donc comme l’un des plus anciens[2], sinon le plus ancien des cinémas de Paris – voire d’Europe. Cette rareté, correspondant à une période prestigieuse de la construction de salles de spectacle, donne à l’édifice un caractère d’autant plus exceptionnel qu’il n’a subi aucune modification depuis son abandon il y a trente ans. De ce point de vue, l’inscription des façades et toitures au titre des Monuments Historiques est notoirement insuffisante, s’agissant d’un « unicum » dans l’architecture parisienne (et d’une rareté, dans l’architecture européenne).

     

    Le Louxor

     

    « Palais du Cinéma », Le Louxor est une vaste salle - 1.200 places au total (le tiers aujourd’hui, au regard des normes de confort actuelles). La taille est sans comparaison avec les quelques centaines de sièges des cinémas d’avant-guerre[3]. Comme l’écrivait un contemporain, « les scénarios nouveaux et très adaptés au spectacle cinématographique par des metteurs en scène qui se sont révélés des maîtres, viennent de faire du cinéma un cinquième art, l’art muet. Son développement lui interdit désormais une installation précaire ; il lui faut un cadre digne de lui »[4]. Même si nous ne comptons plus tout à fait de la même façon aujourd’hui (et même si le cinéma a depuis longtemps conquis la parole), la spécificité du programme du cinéma de quartier est évidente à travers ces remarques. Et le même auteur de préciser : « il serait superflu de vouloir jouer à la grande architecture, le cinéma devant toujours garder son caractère populaire. Laissons les grandes ordonnances aux établissements des institutions d’Etats pour en souligner la puissance aux yeux du commun, mais restons dans des formes modernes, résultat du système de construction de notre époque dans lequel l’ornement ne viendra remplir qu’un rôle secondaire dans une place voulue mais non créée spécialement pour lui. » De ce point de vue, le Louxor est une remarquable réussite. Pour abondant que soit son décor extérieur de mosaïque, il est soumis à un rôle d’accompagnement, sans versatilité ni pittoresque.

    Salle en 1922.JPG

    L’architecture n’en est pas moins ambitieuse, ne serait-ce que par son échelle. L’auteur (un parisien d’origine levantine et de formation française) réalise une audacieuse construction en portiques de béton d’une grande légèreté, sur de simples semelles de fondation. On pense, en l’observant, au parti que retiendra deux ans plus tard Auguste Perret pour l’église du Raincy – dont Le Louxor est incontestablement le modèle[5] : l’ossature extérieure, les remplissages légers, le système de lanterneaux de ventilation sont communs aux deux édifices, ainsi que la géométrie d’un volume parallélépipédique tout en profondeur, au sol incliné[6]. Pour augmenter la capacité de la salle, deux grands balcons superposés exploitent l’importante hauteur sous plafond. L’architecte s’est inspiré de plusieurs salles de spectacle parisiennes – notamment, la salle Gaveau, transposée ici en ossature de béton. Les contraintes de la projection cinématographique le poussent à développer la superposition des places sur trois niveaux, en renonçant aux balcons enveloppants qui ne permettraient pas la vue frontale. Pour le reste, on est étonné de voir à quel point le traitement décoratif de la structure renvoie au travail de Perret pour le théâtre des Champs-Elysées : triomphe de l’ossature porteuse, système de claustra décoratifs, agencement du proscénium et de la fosse d’orchestre.

     

     

    Un intérieur miraculeusement préservé

     

    Pour autant, est-ce vraiment un cinéma ? A l’époque où se formalise la typologie des salles de projection, la référence au théâtre est encore très présente. Le cinéma muet l’impose : la projection est associée à un accompagnement musical qui justifie la fosse d’orchestre – on n’est pas loin du théâtre de variété ou de l’opéra comique. Cachée par de grands claustras de part et d’autre de l’écran (ce dernier pouvant être occulté par un rideau de scène – toujours en place dans les combles), un étroit volume en hauteur accueille le souffleur, chargé du bruitage et de l’accompagnement parlé. Tout cela fait du Louxor une salle de spectacle ouverte aussi bien à des performances musicales qu’à des conférences ou des débats[7], voire à des spectacles de variété ou de mime sur la petite scène devant l’écran. Soulignons à quel point la conservation de ces dispositifs est devenue rare, donnant à l’édifice un caractère exceptionnel dans l’histoire des cinémas de quartier.

     

    La transformation de la salle en boîte de nuit, à moindres frais, a laissé la quasi-totalité du décor intérieur en place. Derrière l’habillage en moquette, les stucs marbre en ton bleu lapis lazzuli sont toujours là, de même que les grands motifs d’inspiration minœnne des peintures murales. Les décors de staff ont été préservés et l’on garde la trace des luminaires électriques. Une restauration en est entièrement possible, sachant que l’ensemble du dispositif spatial de la salle et de ses accès est toujours en place, avec tous les éléments d’origine. Au total, ce n’est pas un squelette ou une enveloppe qui sont parvenus jusqu’à nous, mais bien la salle entière, y compris son décor[8]. Un tel exemple est unique. Il ne donne pas seulement le souvenir d’une des premières grandes salles de cinéma construites en France, il en donne toute la matérialité, qui n’attend qu’une remise en état pour reprendre vie. L’extrême rareté des témoignages de l’architecture des débuts du septième art justifie qu’une attention toute particulière soit portée à la conservation, la restauration et la mise en valeur de ce bâtiment[9], depuis longtemps identifié comme un exemple majeur dans ce domaine à Paris.

    3. Louxor Ecran 1922.jpg
    Scène, fosse d'orchestre et écran en 1922

     

    Un projet de « façadisme »

     

    La proposition faite par la Ville de Paris va en sens inverse. Tirant parti de la protection partielle, uniquement conservatoire, prise il y a vingt ans pour les façades et toitures du bâtiment, elle ignore délibérément l’intérêt des intérieurs redécouverts depuis 2003 sous le décor de la fin des années 1970. Pour introduire un programme de cinéma d’art et d’essai, sur le modèle des multiplexes de la dernière génération, elle est amenée à détruire les fondations pour creuser deux salles souterraines – on perd au passage la structure des grandes semelles traversant les anciens sous-sols voûtés hérités des constructions du début du XIXe siècle. Les règles de sécurité pour l’accès à ces nouvelles salles obligent ensuite à rogner la grande salle de cinéma, tant du côté de l’entrée que du côté de l’écran – détruisant au passage proscénium, fosse d’orchestre et cage du souffleur. Enfin, il faut isoler : les stucs et le décor d’origine disparaissent sous l’épaisse croûte d’un habillage isolant sur lequel sera imité, avec plus ou moins de bonheur, le décor disparu à cet occasion[10]. Toutes les proportions de la salle en seront bouleversées. Mais ce n’est pas le pire : afin d’éviter la transmission des vibrations de la musique électro-acoustique dans la structure, on scie les deux balcons, qui seront détruits puis reconstruits. Que restera-t-il de la salle après ces interventions ? Plus grand-chose, assurément !

     

    Restauration ou réhabilitation ? Derrière ces deux mots, en apparence synonymes, se cache l’enjeu des projets actuels. Pour les habitants, la sauvegarde du Louxor entraîne sa conservation et sa remise en état – autrement dit, sa « restauration » au sens des Monuments historiques. La protection dont il bénéficie au titre de l’Etat (inscription MH) comme au titre de la Ville (« Protection Ville de Paris » dans le cadre du P.L.U.) leur donne à croire que ce sera la voie retenue. Pour la Ville, il s’agit de tout autre chose : l’ambition est de créer un équipement culturel nouveau, « centre dédié au cinéma et aux musiques nouvelles du « Sud » dans l’ancien cinéma du Louxor »[11]. Le souci majeur de la mission Cinéma du Secrétariat général de la Ville est « de répondre à l’objectif avancé d’équilibre financier de financement et d’exploitation » : « Les simulations des conditions d’exploitation et de fonctionnement (fréquentation, recettes prévisibles et dépenses de fonctionnement) incitent à constituer une offre diversifiée sur le site qui comprendrait au moins 3 salles de projection de jauges décroissantes. » En d’autres termes (et sans langue de bois), il s’agit de créer un multiplexe composé d’« au moins » trois salles. Contrairement aux affirmations de la délibération du Conseil de Paris, il ne s’agit donc pas « de conjuguer la restauration du bâtiment le « Louxor » en valorisant son patrimoine architectural et culturel avec la préservation de l’activité cinématographique », mais d’inclure un équipement nouveau dans un bâtiment ancien, quitte à le transformer radicalement à l’intérieur.

     

    Est-ce comme cela qu’on protège le patrimoine ? Certainement pas ! La règle d’or de la protection est de rechercher un programme adapté à l’édifice et non l’inverse[12]. On peut transformer une cathédrale en grenier à foin, mais pas en faire un blockhaus, sauf à la noyer sous des masses de béton… De la même manière, la seule façon de conserver à un cinéma l’authenticité de sa structure et de son décor serait de trouver une affection adaptée à ses caractéristiques. L’idée qui vient aussitôt à l’esprit est d’exploiter la polyvalence de cette salle, mi-cinéma, mi-théâtre (et un peu salle de concert ou de conférences) pour y implanter des activités allant de la projection de films muets à la variété ou au café-théâtre en passant par les conférences, cours et débats[13]… Passer en force, imposer à l’édifice des transformations irréversibles pour y entrer au chausse-pied un programme inadapté à sa conservation n’est pas seulement une erreur, c’est un crime au plan patrimonial. On n’imaginerait pas de repeindre la Joconde, de l’agrandir ou de la diminuer pour correspondre à une quelconque image, au motif qu’elle trouverait ainsi son utilité économique. C’est pourtant bien ce que l’on ose proposer en la circonstance : dénaturer un édifice, au nom de la rentabilité. La Ville de Paris a déjà sur la conscience le théâtre de la Gaieté Lyrique, honteusement démolie pour en faire un parc d’attraction aussitôt en faillite. Va-t-elle recommencer avec le Louxor ? Les majorités changent, mais pas les pratiques !

     

    Pour tout dire, la Ville de Paris manifeste une singulière incompétence en matière de conservation du patrimoine. Elle semble ignorer les règles de la Charte de Venise, promulguée par l’Unesco il y a près d’un demi-siècle, et s’obstine à maltraiter le patrimoine en fonction de ses besoins immédiats. Lorsqu’il s’agit d’un édifice d’intérêt majeur, comme Le Louxor, l’incompétence tourne au scandale. Il est indispensable que cela soit dit et compris. Car le patrimoine est une ressource rare, d’autant plus rare qu’elle n’est pas renouvelable : un édifice altéré ne pourra plus jamais être ce qu’il était auparavant, quelque argent qu’on y mette. Toute intervention se doit d’être réversible, respectueuse de l’intégrité de l’édifice. Mais peut-être la Ville de Paris ignore-t-elle la notion de patrimoine ?

     

    Cléopâtre

     

    Nous avons laissé de côté le style néo-égyptien, pour le moins inattendu, de cet édifice du début des années vingt[14]. Pourquoi diable avoir choisi l’Egypte plutôt que Rome, l’Antiquité que la Renaissance ou le règne de Louis XVI – alors fort en vogue dans les édifices de spectacle ? Il y a une raison à cela : à n’en pas douter, le bien nommé Louxor renvoie à l’un des films-cultes du cinéma muet. Il s’agit de Cleopatra tourné en 1917 pour la compagnie Fox par J. Gordon Edwards. Non seulement, c’est l’un de ces longs métrages (il dure 125 minutes) qui ont marqué la naissance du cinéma en tant qu’art, après la période des courts documentaires issus de la photographie ; mais ce fut l’un des plus prestigieux, avec un budget d’un demi-million de dollars et plus de deux mille participants. Dans cette veine du « péplum » à l’antique, il aura peu de concurrents avant les années cinquante. Enfin et surtout, le film a été marqué par la participation d’une des premières grandes stars du cinéma, la new-yorkaise Theda Bara, qui inaugure le règne des vamps. « Cleopatra » a été le plus grand de ses succès.

     

    Lorsque le film arrive en France, l’année de l’Armistice, l’industrie française du cinéma a beaucoup perdu de sa superbe. Les années de guerre ont interrompu toute activité et il faudra attendre encore un peu pour que Max Linder relance son entreprise. Les investisseurs américains profitent de ce vide pour importer en Europe un cinéma populaire, dont les stéréotypes laissent une

  • Le cinéma d'antan

    La Construction Moderne était un journal hebdomadaire dont la publication a commencé en 1885. En 1921, le journal décide de s'interesser au cinéma et publie deux articles faisant le point de la situation en parlant notamment de la construction d'un cinéma à Malakoff.

     

    Dans le numéro du 26 mars 1922, la revue décide d’illustrer ces articles sur la construction cinématographique par deux planches qui sont les seules photographies que nous ayons de la salle du Louxor de cette époque et que nous connaissons. Il s’agit de la salle avec la vue de l’écran, et celle du plafond. Un petit texte évoque le lieu et l’architecte de cet édifice :

    « Parmi les cinémas récents, la richesse et l’originalité du Louxor, construit par M. Zipcy, architecte à Paris, à l’angle des boulevards de la Chapelle et Barbès, ont été fort remarquées. Nous sommes heureux de publier la façade et deux vues intérieures de ce bel établissement. »

     

    3. Louxor Ecran 1922.jpg

    Salle en 1922.JPG

     
    Voici les articles de La Construction Moderne.
     

    25 décembre 1921 - Page 97

    On sait le développement extraordinaire pris par le cinéma dont la diffusion et l’attraction font songer à cette puissance que le siècle précédent a vu grandir et qu’est la presse. Spécialement au point de vue architectural, en quelques années s’est construit un nombre considérable de salles destinées à la projection animée et ni nous a semblé qu’on pouvait maintenant essayer de dégager les directives rationnelles qui doivent présider à la construction d’un cinéma.

    M. Vergnes, architecte à Paris, a bien voulu se charger de cette mise au point pour laquelle il était particulièrement qualifié comme architecte de plus de vingt salles de cinéma et comme architecte conseil technique du syndicat des Directeurs cinématographiques.

    Pour illustrer le premier article de notre collaborateur nous publions planches 49 à 52 le dossier de son œuvre la plus récente : le Family-Cinéma à Malakoff.

    Un certain aspect de grandeur résulte de la sobriété du style et de la simplicité des lignes, en harmonie avec la destination de l’édifice qui s’adresse à une clientèle modeste. La décoration intérieure, sobre, mais de bon goût est conçue dans la même idée. Quelques détails de ferronnerie et de menuiserie enfin montreront dans les planches de nos prochains numéros avec quel soin et quelle recherche on peut étudier même si le programme fixé exclut une installation luxueuse.

    NDLR

    L’architecture

    Après avoir pris naissance en public dans les sous sols du Grand-Café, il y a 25 ans, lors de la présentation des premières projections de photos animées obtenues par les frères Lumière inventeurs incontestés maintenant de la cinématographie, le cinéma fut à son début nomade. Accaparé par les forains il put conquérir la popularité dans toutes les villes ou bourgades de France, puis il passa les frontières, mais, comme tous les nomades, il n’eut d’autre abri à ses débuts que la tente avec l’écran volant et une cabine démontable. Puis il commença à se fixer, trouva des hangars, des garages, des remises, des salles de café dans lesquelles il devint une attraction. Regardons ensemble l’aspect de l’une de ces premières salles de spectacles ; il est lamentable : le sol est de terre battue ou constitué d’un plancher délabré, les murs sont sales et lézardés.

     

    Comme siège : des bancs ainsi que dans les plus modestes salles d’école. Un écran de toile presque blanche tendu sur châssis et pendu au fond de la salle. A l’autre extrémité sur des tréteaux, une boite en fer à l’échelle humaine et démontable sert de cabine de projection. L’appareil sur des bases fragiles projette une image tremblante. Au mur, comme décoration, quelques étiquettes : W.C. défense de fumer, puis quelques affiches ; lithographies aux couleurs voyantes ou veules donnant une note décorative. On étouffe dans cette salle, pourquoi ? Toutes les ouvertures ont été calfeutrées pour empêcher l’introduction de la lumière nuisible à la projection. Comme la réalité. Mais le coup de feu part trop tôt ou trop tard, la vaisselle casse avec un bruit métallique trop prononcé, et dans le tonnerre on reconnaît trop la porcelaine. Toutes les erreurs du début ont été petit à petit mises au point ; le spectacle cinématographique rentre carrément dans les mœurs. Son succès va grandissant auprès du public. On commence alors à utiliser des salles de théâtre, ou des salles destinées à des représentations théâtrales, mais un grand nombre d’entre elles ne peuvent recevoir des spectateurs à certaines places, vu la mauvaise ou la non-visibilité de l’écran. On ne peut que difficilement placer la cabine à projection. Nous sommes déjà loin des premières installations décrites tout à l’heure, mais ce n’est pas le rêve. Il gravit maintenant un échelon de plus. Les plus grands artistes de théâtre se mettent à interpréter les chefs d’œuvre de la littérature. Les scénarios  nouveaux et très adaptés au spectacle cinématographique par des metteurs en scène qui se sont révélés des maîtres, viennent faire du cinéma un cinquième art, l’art muet. Son développement lui interdit désormais une installation précaire ; il lui faut un cadre digne de lui. Les salles vont être désormais construites spécialement pour lui. Et c’est un programme nouveau qui s’offre au constructeur, à l’architecte. Et ce programme, ce sont les besoins même du cinéma qui l’ont tracé, car il y a un côté technique de la cinématographie qui est à la base de la conception des salles qui lui  sont destinées.  La visibilité complète de l’écran de toutes les places est une obligation absolue. Le nombre des spectateurs devant être porté au maximum afin que le prix des places soit minime et que le cinéma garde son caractère populaire, se pose impérieusement le problème des larges circulations et des évacuations rapides. Les spectateurs sont facilement sujets à panique au cinéma, vu la fausse réputation faite à celui-ci de créer plus que tout autre spectacle un danger d’incendie. Le nombre des spectateurs a posé aussi un autre problème, celui de la ventilation et de l’aération pour des milliers de personnes placées dans une salle dans laquelle la lumière extérieure ne doit pas pénétrer et gêner la projection et de laquelle le son ne doit pas être gênant pour le voisinage. Et puis, chose bien plus importante encore : le public est devenu difficile. Nous sommes à une époque où le confortable, le luxe dans le plaisir sont devenus des nécessités. Il faut que chacun soir confortablement assis à son aise et qu’il ne soit nullement gêne par les gens placés en avant ou à côté de lui, qu’il n’ait ni trop froid, ni trop chaud, et qu’il ne soit pas placé dans un courant d’air. Toutes ces exigences sont très naturelles, mais posent au constructeur autant de problèmes. Pour le chauffage, ou la ventilation, mêmes problèmes difficiles et délicats afin d’arriver juste à point pour satisfaire une clientèle variée. Nous allons donc énoncer en termes beaucoup plus brefs les nécessités du programme, lequel d’ailleurs doit satisfaire à des ordonnances ou à des règlement de police et d’administration.

    E. Vernes

     

    1er janvier 1922 - page 108

    Comme il n’y avait pas de théâtre à Malakoff ni dans les pays avoisinants, nous avons prévu une scène avec tous ses services accessoires pour pouvoir donner des représentations théâtrales comportant un répertoire d’opérette et même d’opéra-comique. La forme allongée du terrain, le petit côté étant sur une des places principales du pays, imposait l’entrée en bout, la scène étant à l’autre extrémité contre un mur mitoyen. Les services de la scène étaient ainsi rendus commodes puisqu’ils venaient en façade le long de la rue latérale. Les artistes avaient leur loge au sous-sol éclairée et aérée sur rue, leur entrée spéciale se trouvant à proximité. Tous les services de la scène et de l’orchestre étaient ainsi rendus indépendants.

    Le public du rez-de-chaussée qui était entré par la place pouvait s’évacuer en secours sur la façade latérale, celui de la galerie sortait directement par des portes spéciales à la base des escaliers d’accès. Ce système d’évacuation se rapproche le plus possible de ce qui est théoriquement le plus désirable, puisque chaque catégorie de public peut entrer ou sortir sans mélange. Pour d’entrée des spectateurs, il a été prévu pour tout le rez-de-chaussée un contrôle unique placé dans un tambour central ; les portes latérales donnant dans le hall ne servant qu’à la sortie. Les portes d’accès dans la salle et sur le tambour sont placées latéralement afin que la lumière à l’ouverture des portes ne vienne pas jeter un reflet sur l’écran et que le courant d’air ne frappe pas les derniers spectateurs directement dans le dos. Les escaliers latéraux conduisant à la galerie servent l’un pour la première catégorie de places, l’autre pour la deuxième. Lela visibilité. La scène restant au niveau de la rue pour la commodité des décors, chars ou animaux. terrain était du côté de l’entrée déjà affouillé. Pour profiter de cette excavation, nous avons prévu au sous-sol un bar et des lavabos, mais pour que trop enterrées les surfaces de ventilation ne risquent pas d’être insuffisantes, nous avons surélevé le porche d’entrée sur élévation permettant, en outre, d’obtenir une plus grande pente dans la salle facilitant

    Nous nous sommes préoccupés ensuite de la plus importante des questions dans une salle de représentation cinématographique, celle de la position de la cabine pour obtenir la meilleure des projections. Nous l’avons mise à la hauteur du centre de l’écran afin que le faisceau des rayons lumineux soit perpendiculaire à l’écran, le résultat étant une image non déformée qui constitue le but à atteindre pour une projection type.

    Nous avons donc été amenés à mettre cette cabine dans un entresol au-dessus des entrées et au-dessous de la galerie. Cet entresol que nous pourrions presque appeler entrepont est un  véritable poste de commandement. Au centre : la cabine aérée et ventilée par deux cheminées à double enveloppe (ciment armé et métal) allant jusqu’a la toiture. Cette cabine construite en ciment est absolument incombustible, par conséquent. A droite de la cabine, les services électriques : convertisseur transformant le courant alternatif en courant continu, groupe pour la recharge des accumulateurs, tableau de commande pour l’éclairage de la salle, réserve des films. De l’autre côté de la cabine : le bureau du directeur qui, de sa place, par trois ouvertures, peut surveiller l’entrée de la salle ou causer avec l’opérateur. Il a à proximité le tableau électrique de commande générale, le poste téléphonique interurbain et le poste intérieur qui lui permet de communiquer avec la scène, le chef d’orchestre et les caissières. Ce poste de direction à cheval entre le rez-de-chaussée et la galerie est commode pour le contact avec les deux catégories de public. En outre, au même étage se trouvent un lavabo pour l’opérateur et une pièce spéciale pour la réserve des tickets et des affiches. Une autre préoccupation est maintenant celle de la visibilité de la projection.

    Nous avons d’abord déterminé les dimensions de l’écran, vu la longueur de la salle nous lui avons donné 6 mètres de largeur sur 4 m 70 de hauteur. Il est ainsi proportionné avec la salle et serait même presque trop grand pour les premiers rangs de spectateurs.

    Si nous n’avons pas de déformation dans la projection, nous n’en avons aucune par vision oblique, car sur une cinquantaine de spectateurs qui voient sous un angle de 30° au maximum, les 1 350 autres le voient de face. La pente du sol et la hauteur des gradins font que les spectateurs placés en avant ne gênent en rien la visibilité. L’absence de point d’appui dans la salle rend encore cette visibilité plus parfaite. Nous passons ensuite à l’étude de l’acoustique puisque les représentations cinématographiques sont toujours accompagnées d’auditions musicales qui doivent mettre le public dans l’ambiance ; nous savons, en outre, que le film parlant absolument au point grâce aux efforts de M. Gaumont va être prochainement vulgarisé lorsque le prix de revient sera accessible aux exploitants.

    Pour favoriser l’émission des ondes sonores, nous avons évité les saillies. Un pan coupé entre la partie verticale des murs et la partie horizontale du plafond évite l’angle nuisible à la propagation des ondes sonores. La saillie du balcon est réduite à un minimum qui ne gêne en rien les spectateurs placés au-dessous et pendant les représentations théâtrales avec une émission normale, la voix porte facilement à 30 mètres. Afin d’obtenir le meilleur rendement de l’orchestre, nous l’avons mis dans une fosse à double parement formant véritable boite de résonance. Le dessous du proscénium est incurvé et constitué par une surface élastique en contreplaqué qui remplit le double but d’abat-son et d’abat-jour puisqu’il renvoie les sons dans la salle et empêche les rayons lumineux de l’orchestre de nuire à la projection. Vient maintenant la question de l’éclairage : en façade nous l’avons voulu rutilant ; une rampe accuse au haut de la corniche le motif principal de la façade. Le porche d’entrée est éclairé par trois groupes de lumière venant du plafond, mais le motif principal d’éclairage est constitué par deux lampadaires portant deux grandes vasques éclairées sur la périphérie et au centre desquels deux feux rouges tamisés par un globe donnent l’impression de flammes. Les vitraux placés en haut du porche sont aussi éclairés par la lumière du hall intérieur. Au fur et à mesure que l’on pénètre dans l’établissement, l’intensité de la lumière devient décroissante. Dans le hall cinq points lumineux suffisent. Dans le tambour de contrôle précédent immédiatement la salle : une seule lampe. L’œil s’habitue progressivement à la salle demi-obscure dans laquelle a lieu la projection. Dans cette salle même l’éclairage est bleuté, l’indication de sortie est sur feux rouges. Tous les points lumineux sont placés de la façon la plus judicieuse pour être utiles sans être nuisibles. Pendant les entractes, la lumière vient progressivement au moyen de résistances afin que la rétine ne subisse pas de choc qui amènerait fatalement une douleur, car l’œil pendant les représentations cinématographiques est suffisamment fatigué par le spectacle qui est sur le principe de la persistance de l’image rétinienne. Nous n’avons pas installé l’éclairage par reflet qui est le plus parfait, car il est d’un prix de revient trop fort pour un établissement à petit rendement ; Mais nous n’avons mis aucun point lumineux sur les murs latéraux ; tout l’éclairage vient des plafonds, il est volontairement peu intensif puisqu’il est obtenu par 28 lampes au maximum dont 4 sont fort suffisantes en temps normal. Cette lumière venant du point le plus haut est très douce à l’œil car elle vient d’ampoules dépolies. La question de l’aération, et de la ventilation est une des plus délicates dans un cinéma car il faut faire des ouvertures par lesquelles le cube d’air sera renouvelé une fois et demi par heure, cette aération faite à très faible allure afin d’éviter les courants d’air. Si l’air doit facilement circuler par ces ouvertures, le son par contre ne doit pas sortir pour ne pas gêner le voisinage et la lumière extérieure ne doit pas non plus pouvoir rentrer afin de ne pas venir gêner par des reflets la lumière de la projection. Nous avons prévu un grand lanterneau central muni sur tout son périmètre de persiennes à lames mobiles et à fermetures hermétiques qui permettent par des manœuvres indépendantes, à côté droit ou côté gauche, de régler les ouvertures à volonté et suivant la direction du vent. Le plafond en staff placé à 3 mètres au-dessous et sans ouverture dans la partie centrale protège les spectateurs des coups de froid venant du haut. L’introduction de l’air dans l’inter plafond a lieu sur les faces latérales au moyen d’ouvertures fermant à guillotine. Les pans coupés du plafond dont nous avons parlé au sujet de l’acoustique sont ajourés. L’air chaud vicié et les fumées viennent s’emmagasiner dans les pans coupés entre la plafond et la toiture et le courant d’air établi entre les ouvertures latérales et le lanterneau les chasse dans le sens déterminé par le vent : cet entraînement faisant l’office d’un giffard qui extrait en même temps l’air de la salle. Pour compléter la ventilation au sommet de l’amphithéâtre, 4 ouvertures ventilent le point et ont, en outre, l’avantage d’éclairer pendant le jour la partie haute de l’établissement pour le nettoyage, tandis que 7 petites ouvertures dissimulés dans le haut lambris l’éclairent dans la hauteur du rez-de-chaussée. Le chauffage est assuré par une installation de radiateurs avec circulation de vapeur à basse pression. Le chauffage de la scène et des services de la scène est intensif, vu les spectacles donnés à notre époque ou le demi-nu est en faveur. Les services de chauffage sont placés en sous sol, la réserve de charbon venant directement en façade pour les facilités d’approvisionnement.

    L’étude des sièges a attiré toute notre attention, car il faut dans un établissement populaire qu’ils soient d’une grande solidité. La carcasse en fer plat est trop flexible du fait même de la forme donnée au fer. Nous avons préféré celle à fer à T passant en double T dans les endroits qui reçoivent le maximum d’effort. Les assemblages sont faits au chalumeau oxhydrique au lieu d’être rivés ou vissés et l’étoffe a été volontairement choisie en panne au poil ras pour être plus résistante. La position de ces sièges établie suivant le règlement de la Préfecture de police permet une circulation commode et une évacuation rapide.

    Nous terminons par la décoration qui a été recherchée simple vu la modicité des crédits et que nous avons concentré dans un haut soubassement qui relie la galerie au rez-de-chaussée. L’ouverture de la scène est en proportion avec l’écran et toutes les lignes en accusent encore la proportion par une parallélisme voulu des verticales et des horizontales. Les deux gorges successives reliées par un plan placé en avant de l’écran sont là pour faire ressortir la projection. Ces gorges et toute la décoration surmontant le proscénium étant de tons plus soutenus pour mieux faire apparaître par contraste l’éclat de l’image. La partie haute de la salle est de tonalité claire afin que l’obscurité ne soit pas complète, car l’œil se fatigue moins dans une salle très légèrement éclairée et la circulation pendant la projection en est facilitée pour le spectateur qui va trouver sa place. La police même de la salle est rendue plus commode, la projection n’en souffre pas puisqu’elle est encadrée d’une décoration sombre comme nous l’avons décrit plus haut.

    Nous terminerons cet exposé en disant que le porche d’entré e été largement ouvert pour abriter les spectateurs dans leur attente à l’heure d’ouverture, que les marches utiles pour l’accès lui donnent un caractère plus ouvert, cette façade semblant ainsi mieux attirer la clientèle ; que les panneaux d’affiches placés en façade et à droite du pan coupé retiennent l’attention du passant ; que le guichet de location placé à l’extrémité permet le fonctionnement de ce service sans que le public rentre à l’intérieur tandis que les caisses ordinaires placées dans le hall desservent à droite et à gauche le rez-de-chaussée et la galerie.

    Le cinéma étant un genre de spectacle éminemment moderne, non seulement parce que sa découverte ne remonte qu’à quelques années, mais surtout parce qu’il répond à des goûts, à des besoins, à des curiosités que n’avaient pas nos ancêtres, le cadre dans lequel il est présenté ne doit-il pas aussi répondre à ces goûts-là, à cette façon de voir de nos contemporains, à ce besoin de confortable aussi que ne connaissaient pas les siècles précédents.

    Le système de structure est moderne lui aussi : galerie en ciment armé, murs latéraux en pans de ciment armé, charpente métallique. Aspect général sobre, car il serait superflu de vouloir jouer à la grande architecture, le cinéma devant toujours garder son caractère populaire. Laissons les grandes ordonnances aux établissements des institutions d’Etats pour en souligner la puissance aux yeux du commun, mais restons dans des formes modernes, résultat du système de construction de notre époque dans lequel l’ornement ne viendra remplir qu’un rôle secondaire dans une place voulue mais non créée spécialement pour lui.

    E. Vergnes

     

    Pour la réalisation de cet établissement [ à Malakoff ], j’ai fait appel à la collaboration de

    M. Azam, décorateur,

    M. Binet, sculpteur,

    M. Schenck, ferronnier,

    La Maison Durnerin et Lefort, pour la structure en ciment armé.

     

  • Tout en haut de la rue de Maubeuge

    Il n’est pas certain que tout le monde sache que la rue de Maubeuge s’en va rejoindre le boulevard de La Chapelle, à l’arrière de l’hôpital Lariboisière.

    Encore une modification du sens de circulation
    La modification que nous avons récemment découverte concerne ce tronçon de voirie qui a été au cœur de nos préoccupations il y a longtemps. En effet, cet itinéraire a été pendant un temps le déversoir du trop plein d’embouteillages du boulevard de La Chapelle. Les automobilistes coincés dans leurs boites métalliques envisageaient souvent de faire le tour de l’hôpital pour s’échapper par le boulevard de Magenta. Certains -pas tous !-  respectant l’interdiction au niveau du passage des ambulances se retrouvaient un peu plus coincés dans la rue Guy Patin, et de refaire le tour du terre plein sous viaduc…

    paris, maubeuge, porte-huit, lariboisière, circulationDe fil en aiguille, la situation s’est améliorée, et il a été possible de rendre le panneau plus convaincant et de dissuadre les automobilistes de s'engager dans la rue de Maubeuge.

    Lien permanent  commentaire