Dans notre bulletin d’information, nous nous sommes fait l’écho plusieurs fois de l’expérimentation intéressante des salles de consommation, sous-entendu de drogues, à moindres risques dans des villes étrangères, comme Genève et Bilbao. (Voir bulletin n°23 de mars 2010, page 5 et bulletin n°25 de novembre 2010 page 4)
Nous avons aussi participé à des conférences, des colloques, des réunions sur ce thème (à l'Hôtel de Ville sous l'autorité de Jean-Marie Le Guen, adjoint au maire chargé de la Santé, dans le 18e, animée par Coordination Toxicomanie, à la mairie du 10e pour une restitution d'enquêtes très complètes sur la jeunesse et ses comportements face aux drogues une autre fois...) et enfin, lors de notre assemblée générale de novembre 2010, nous avions invité des experts parisiens pour présenter à nos adhérents un état des lieux : Marguerite Arène, Pierre Leyrit et le directeur de cabinet de Jean-Marie Le Guen (Mission de prévention des toxicomanies-Dases / Coordination Toxicomanie).
Or depuis l’été 2010, la publication du rapport de l'INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) et les prises de positions de Roselyne Bachelot, notamment, vivement recadrée par le gouvernement Fillon, nous assistons à une mise sous le boisseau de toute la problématique. Pourtant les différents rapports publiés par l'OEDT (Observatoire européen des drogues et des toxicomanies) ne laissent pas beaucoup de doute sur la progression du mal. Alors quoi ? On oublie ou on regarde ?
Il ne faut rien attendre du côté de l’état qui est farouchement opposé à toute avancée dans ce domaine. Jean-Marie Le Guen évoquait un mur idéologique en juin dernier lors d’une conférence à la Bourse du Travail sur les salles de conso. Ce gouvernement est opposé à l’idée même que la toxicomanie existe et existera, qu’elle est inhérente à la condition humaine, que jamais on ne parviendra à l’éradiquer. Mais qu’en revanche on puisse la circonscrire, diminuer le calvaire des toxicos, limiter les risques qu’ils courent et qu’ils font courir, réfléchir aux conditions qui conduisent à la prise de psychotropes, remonter les filières qui dispensent la petite mort, qu’on observe le mal sereinement au lieu de le criminaliser d’entrée de jeu…
Ce gouvernement préfère faire l’autruche et regarder ailleurs. Chacun tentant de protéger ses propres rejetons. Restent ceux que personne ne protège. Ils sont de plus en plus nombreux. Ils errent dans nos rues, un chien en laisse, les yeux troubles. Les habitants du quartier, dont nos adhérents, nous le disent tous. Le marasme de l’emploi des jeunes ajoute son quota de désespoir. Puis ils vieillissent, car les toxicomanes vieillissent aussi, quand ils ne meurent pas d’une overdose ou du sida. Et toujours la rue. Bien entendu nous parlons ici de la situation des toxicomanes « confirmés », pas des fêtes du week end avec cannabis à volonté et alcoolisation souvent excessive, bien que… il faille toujours rester vigilant. On ne tombe pas dans la drogue sans signes avant-coureurs.
La Ville nous invitait à nouveau à participer à une conférence débat hier à l’Hôtel de Ville sur ce même thème : « Les salles de consommation à moindres risques pour usagers de drogues ». Il est louable, et nous l’en remercions, de continuer à organiser des conférences qui réunissent les experts, les médecins spécialisés, les associations qui travaillent sur le sujet, en somme un public convaincu, mais si nous voulons que l’opinion publique parisienne se familiarise avec cette idée, avec cette expérimentation qui a fait ses preuves ailleurs, il faut venir la lui présenter dans les quartiers, où en toute logique ces salles devront être implantées. Faute de quoi, en tant qu’opinion publique, elle ne pourra jamais faire pression sur les autorités nationales qui s’opposent au processus et à l’ouverture de tels lieux. C'est la position que nous n'avons cessé d'affirmer auprès des élus et notamment dès notre première entrevue avec le directeur de cabinet de J.M Le Guen.
Entretien avec Jean-Marie Le Guen en mai 2011
Dans notre quartier, c'est une nécessité. N'attendons plus.