« Studio 360° », c’est le nom du centre culturel qui devrait, d’ici deux ans, conférer un nouveau visage à l’angle des rues Léon et Myrha, aujourd’hui jardin provisoire et terrain de pétanque. À l’occasion de la réunion organisée samedi 14 mars à l’invitation de l’association Cavé Goutte d’Or, un point a été dressé aux Xérographes sur l’avancement de ce premier projet culturel « 100 % privé » du quartier. Outre ses promoteurs, plusieurs acteurs du quartier étaient représentés, notamment la Table ouverte, le 18e du Mois et Action Barbès.
Porté par le label et maison de production Accords Croisés, ce projet est à dimensions multiples. Le lieu, en effet, accueillera une salle de répétition en sous-sol, un restaurant au rez-de-chaussée, une salle de spectacle d’une capacité variable de 180 places à 300 places sur trois étages, un petit studio d’enregistrement, des bureaux et des loges destinées à des résidences d’artistes de quelques mois aux étages supérieurs, et enfin, un potager sur le toit (conçu par Topager).
Y seront hébergés des artistes en résidence, le festival musical Au fil des voix, une association de formation (Quai des voix) et bien sûr, le label Accords croisés. D’où le choix du nom de « 360 degrés », qui désigne à la fois l’ouverture sur le monde – Accords croisés et Au fil des voix font la part belle à la world music – et l’ensemble de la chaîne musicale, depuis la création (en résidence) jusqu’à la diffusion (salle de spectacle).
En quête d’un modèle économique
Comme l’a expliqué Saïd Assadi, le directeur d’Accords croisés, ce projet vise, dans un contexte de réduction des subventions allouées aux acteurs culturels, « à rassembler les petites structures et les artistes émergents pour les aider à se développer, à créer un modèle économique alternatif, qui ne soit ni une grande structure économique du type Zénith, ni un organisme subventionné : une force horizontale, avec des artistes issus de la diversité ». Sur un coût total de près de 4 millions d’euros (3,2 millions pour la construction et 700 000 euros pour les aménagements intérieurs), 800 000 euros ont été apportés en fonds propres par les structures partenaires, le reste devant être emprunté.
En outre, ce lieu doit faciliter l’activité du label en réduisant les coûts de production. « Pour réaliser un projet, en effet, a expliqué Saïd Assadi, on doit payer le lieu de résidence de l’artiste, la location du studio d’enregistrement etc. Avec Studio 360°, on disposera de toutes les installations sur place. L’idée, c’est donc que le remboursement de l’emprunt soit équivalent aux loyers qu’on paie aujourd’hui pour les bureaux, les studios, locations de salles de spectacle etc. ».
En novembre 2013, l’ouverture de Studio 360° était annoncée pour octobre 2015. Mais c’est sur le bouclage financier que le projet a pris du retard. En cause, a indiqué Saïd Assadi, le refus de la majorité municipale actuelle – contrairement à la précédente – de se porter garante de l’emprunt auprès de la Caisse des dépôts et consignations, soit 75 % de l’emprunt total. « Pourtant, on a fait au moins 25 réunions à la mairie depuis l’identification de la parcelle, en 2010 ! » a-t-il regretté. Cela étant, il s’est montré philosophe : cela fait plus de quatre ans, après tout, qu’il travaille à ce projet ! Et si l’appel d’offres n’a pas encore été lancé pour le constructeur, le permis de construire, lui, a déjà été déposé. Avant de lancer les travaux, il ne reste donc plus qu’à trouver un nouveau garant… Quatorze mois de construction sont prévus et la livraison annoncée pour dans deux ans.
L’architecture, elle, a été dessinée par le studio Engasser. Gaétan Engasser en personne en a assuré la présentation, reconnaissant que concevoir un bâtiment aux fonctions si diverses sur une parcelle si réduite (360 m2) n’avait pas été simple… « Vu le nombre de partenaires, la maîtrise d’ouvrage n’était pas ordinaire, a-t-il expliqué. On a dû organiser des dizaines de réunions, mais du coup, on a réussi à concevoir un projet alternatif et novateur ! » Soucieux de l’inscription dans un ensemble architectural, également : le travail du toit de Studio 360° permet « d’aligner les toitures sur les deux rues » Léon et Myrha.
La façade, a expliqué Gaétan Engasser, « sera composée d’une première coque en béton, peinte à la manière des murs pignons parisiens et qui sera certainement l’œuvre d’un artiste, sur le thème de la diversité culturelle, peut-être un jeu d’écritures sur les alphabets ». Quant à la deuxième peau, métallique micro-perforée, elle sera recouverte d’une peinture laquée : « Cette double peau aura un rôle à la fois décoratif et thermique, avec la réduction de l’exposition au Soleil à l’intérieur des locaux, à la manière d’un moucharabieh ».
Ouverture sur le quartier
Saïd Assadi a enfin insisté sur son souhait d’ouvrir le lieu sur le quartier. Une ouverture qui s’exprime notamment dans la liberté d’accès au bâtiment et les vitres le long du rez-de-chaussée, qui révéleront le restaurant et pourront s’ouvrir l’été. En outre, de grandes fenêtres sur l’escalier d’honneur desservant tous les étages, au coin de l’immeuble, permettront à la lumière naturelle de pénétrer dans l’édifice et aux passants de profiter de l’architecture intérieure du lieu.
De nouvelles réunions seront organisées avec les associations du quartier pour tenir informés les habitants de l’avancement du projet. Avec un grand sourire, Saïd Assadi a conclu qu’à terme, Studio 360° deviendrait peut-être une entreprise d’exportation de spectacles et musique du quartier. Des produits culturels made in Goutte d’Or, en quelque sorte !