Le problème du bruit est important et doit faire l'obet d'une attention particulière. La Mairie de Paris argue, pour défendre son projet, que les travaux d'isolation acoustique, obligatoires, ne permettent pas de conserver la structure de la salle. Mais une solution alternative existe comme le montre les études menées par des architectes qui se sont penchés sur la question.
D'abord quelques précisions concernant l'acoustique
par Stéphane Ricout, architecte
On parle:
- d'isolement acoustique, ou phonique, pour décrire l'état présent ou futur du Louxor (à savoir s'il est bien isolé par rapport à l'extérieur ou non), et
- d'isolation acoustique, ou phonique, pour décrire l'action d'isoler (la manière de s'y prendre, avec quelle technique, quels matériaux etc.)
En somme, il y a la même différence entre éclairement (état) et éclairage (action). Souvent on emploie l'un à la place de l'autre. Si l'on parle de la technique d'isoler, alors en effet, parlons de l'isolation phonique ou acoustique (mais pas sonore, même s'il s'agit d'"insonoriser" le bâtiment). Si l'on parle de l'état dans lequel on voudrait que le Louxor soit ou non, et bien parlons en revanche de son isolement acoustique ou phonique.
Des solutions techniques alternatives existent
par Agnès Cailliau, diplômée des Hautes Études de Chaillot, architecte du patrimoine
Le projet force à démolir entièrement les deux niveaux de fondations et de caves en pierre situés sous le Louxor, que son architecte avait décidé de conserver pour y poser en légèreté le Palais du Cinéma. Cette infrastructure en pierre est en excellent état, ne présente aucune lézarde ou tassement et portait un immeuble en pierre de taille de six étages environ 40 fois plus lourd. Le projet force à refaire des fondations, très complexes, par le dessous, sans anticipation possible de coût et d'impact, en découpant le Louxor hors de son contexte et de son assise. Les nouvelles fondations par micropieux, dans le gypse situé à plusieurs mètres en sous-sol, vont créer des perturbations inévitables sur les deux immeubles mitoyens, et sur le Louxor lui-même.
En effet, la grande salle du Louxor est abritée par une succession de portiques en béton très fins (U renversés), dont le béton a vieilli, et les aciers oxydés crèvent les enduits boulevard de La Chapelle. Pour consolider le Louxor, il faut donc prévoir de dégager impérativement toute la partie externe de la structure en béton hors des enduits qui nappent toute la façade en déposant des panneaux en briques de part et d'autre.
Avec une structure à réparer à l'extérieur, et à reprendre en sous-oeuvre pour pouvoir casser toute l'infrastructure, que restera-t-il du Louxor si l'on rajoute à cela : la perte des stucs de faux marbre, des balcons, de la scène, des escaliers latéraux donc de la distribution, de la décoration du plafond avec partition à caissons réglée sur ses dimensions actuelles avec éclairage naturel, éléments intérieurs de valeur dans la grande salle... Les façades intérieures sont perdues pour des raisons d'isolation acoustique mais aussi à cause des sorties de secours créées en sous-sol par le projet de deux salles.
Pour le sauver, nous proposons de conserver la grande salle en l'état et de la restaurer dans ses proportions actuelles avec sa distribution.
L'isolation contre la transmission du bruit peut être obtenue :
- par des coupures solidiennes dans les façades y compris dans le toit- terrasse : il n'y a pas d'élément structurel lié au pignon mitoyen boulevard de La Chapelle. Les deux "poteaux" intermédiaires collés au pignon, ont été considérés à tort en béton, et ne sont que de simples raidisseurs en briques.
- par une isolation phonique interposée le long des mitoyens, mais prenant en considération les différentes épaisseurs et matériaux constatés lors des tests effectués sur place.
- en substituant des matériaux isolants aux panneaux de brique creuse dans les façades.
Nous proposons également d'abandonner le projet de démolition des deux niveaux de caves et de conserver ainsi les dispositions du dernier cinéma muet parisien.