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Le projet de SCMR prisonnier de la politique politicienne

paris,scmr,samedis-politiques,salle-de-consoLe projet de salle de consommation à moindre risques (SCMR) du boulevard de La Chapelle est un projet de santé publique s’inscrivant dans la politique de prévention des risques liés à la toxicomanie. Chaque mot a ici son importance car il définit très clairement le cadre dans lequel le projet s’inscrit : prévention des risques et toxicomanie. Ce sont deux sujets difficiles à aborder par les politiques, surtout à l’approche des élections, car ils sont à la fois chargés d’un certain flou mais surtout de beaucoup d’a priori, les deux perturbant d’abord une approche puis ensuite un jugement sereins du sujet. La situation actuelle du projet de SCMR à Paris en est le reflet parfait.

La gauche au pouvoir (socialistes et écologistes), tant au niveau national que municipal, s’est rangée à l’idée qu’une SCMR pourrait être une approche raisonnable et efficace du problème de prévention des risques liés à la toxicomanie. Elle a lancé le projet parisien de manière assez volontaire mais son élan a été brisé net par l’avis négatif émis par le Conseil d’Etat. Certes les déclarations de la ministre de la Santé sont là pour nous dire qu’il ne s’agit là que d’une péripétie juridique qui n’altère en rien la volonté du gouvernement de réaliser ce projet. C’est ce que nous croyons comprendre de la déclaration de Marisol Touraine devant la représentation nationale le 15 octobre dernier.


Question de Philippe Goujon à Marisol Touraine par MarisolTouraine

Anne Hidalgo, elle, n’a pas oublié qu’elle est candidate à la mairie de Paris et probablement pour ne pas s’aliéner une partie de l’opinion publique qu’elle pense sans doute, mais sur quelle base, plutôt réticente au projet, s’est empressée de reporter celui-ci pour l’après élection.

Disons tout net que les déclarations de Mme Touraine relèvent de la méthode Coué et ne donnent aucune garantie sur la volonté réelle du gouvernement de mener ce projet à son terme dans des délais raisonnables et que, parallèlement, les propos de Mme Hidalgo relèvent clairement du manque de courage politique et d'une certaine hypocrisie, un report post-élection pouvant devenir un report aux calendes grecques !

La droite elle (UMP et centristes), toujours aux niveaux national et municipal, s’est déclarée avec force opposée au projet. Nathalie Kosciusko-Morizet (NKM), candidate à la mairie de Paris en a fait un court paragraphe dans les « 7 progrès majeurs de la vie des Parisiens » qu’elle entend développer et ce dans la rubrique « sécurité, première des libertés ». C’est l’engagement numéro 4 « Refuser la salle de shoot ». L’intitulé de l’engagement et le choix de placer ce sujet dans cette rubrique « sécurité » est déjà une indication intéressante de l’approche que la candidate a du sujet. Que préconise NKM ? Augmenter les crédits à la prévention contre les addictions, multiplier les campagnes de prévention. Outre que les campagnes de prévention contre la drogue en général et les risques associés n’ont pas manqué ces dernières années avec le peu d’efficacité que l’on constate, on peut déjà noter que cette focalisation sur la prévention ne règle pas la question des toxicomanes qui ont besoin d’être soignés au même titre, par exemple, que le sont les alcooliques dans notre pays. NKM fait carrément d’emblée l’impasse sur le sujet.

Au risque d’être un peu brutal, disons que le plus critiquable reste  quand même la malhonnêteté intellectuelle de l’approche de la candidate. Les termes utilisés (salle de shoot avec tout ce que cela comporte de péjoratif dans l’esprit de l’opinion publique alors qu’il ne s’agit pas de cela), les approximations tendancieuses (le Conseil d’Etat ne s’est pas opposé au projet, il a dit qu’il n’était pas conforme à la législation en vigueur), les fausses informations (l’Académie Nationale de Médecine n’a pas condamné le projet comme l’indique un article publié dans la revue Médecins de janvier/février 2013) et enfin la peur (faire du quartier le rendez-vous des toxicomanes, comme si cela n’était pas déjà le cas), tous les ingrédients d’une déplorable instrumentalisation politicienne du projet sont là pour encore une fois satisfaire une partie de l’opinion publique jugée plutôt hostile au projet (sur quelle base ?) et faire jouer les a priori idéologiques.

Les deux attitudes sont à des degrés divers condamnables. Il s’agit d’un problème grave qui mérite mieux que des postures politiciennes, à commencer par une pédagogie dégagée des positions de principe et autres jugements moraux qui n’ont jamais réglé aucun problème de santé publique.

Commentaires

  • Ne pas oublier les communistes du 10ème favorables au projet scmr.

  • Les déclarations de Mme Hidalgo lors du Grand Jury RTL du 24 - http://www.rtl.fr/actualites/info/politique/article/anne-hidalgo-on-a-besoin-d-une-salle-de-shoot-a-paris-7767255791 - et quelques messages reçus suite à la publication de cet article nous amène à préciser les points suivants :

    Il n'aura échappé à personne que cet article est avant tout politique (comme nous en publions tous les samedis sur notre blog) et qu’à ce titre il est une analyse de la situation telle que nous la percevons au sein de l’association.

    Il nous faut constater deux choses. D’abord, si la volonté du gouvernement de réaliser ce projet avait été forte, il ne serait pas passé par un projet de décret avec les risques encourus côté Conseil d’Etat ou il aurait pu passer outre cet avis comme cela a été fait maintes fois sur le même sujet par d’autres gouvernements, l’avis du Conseil d’Etat n’étant que consultatif. Il ne l’a pas fait et se résout à suivre l’avis du Conseil d’Etat. C’est un choix politique que nous critiquons car conditionnant le projet à beaucoup d’aléas, à commencer par une refonte de la Loi de 1970 qui n’est pas sans risque dans le contexte politique que nous connaissons aujourd’hui. Pas mel de professeurs de Droit ont eux-mêmes critiqué les options du gouvernement et nous publierons sous peu une conférence sur le sujet.

    Ensuite il ne nous a pas échappé que Mme Hidalgo n’a pas manqué de déclarer que le projet serait repoussé après les élections municipales dès l’annonce de l’avis du Conseil d’Etat, repousser c’est un peu comme créer une commission, on sait ce que cela peut vouloir dire. Procès d’intention direz vous ? Peut-être mais nous savons aussi que Mme Hidalgo ne manque pas de relais au sein de l’exécutif et du législatif pour maintenir la nécessaire pression pour la réalisation de ce projet. Or que dit-elle ? On verra plus tard. Action Barbès a salué le courage politique de Rémi Féraud lors de la tumultueuse réunion en mairie du 10ème sur le sujet. Il ne nous semble pas que sur le même sujet, Mme Hidalgo soit sur cette ligne.

    Dans sa déclaration du 24 novembre au Grand Jury RTL, Mme Hidalgo ne dit que des généralités, certes utiles pour la pédagogie du public, mais ne dit pas ce qu’elle à l’intention de faire ni dans quels délais.

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