L'hôpital Lariboisière est actuellement en train de connaître de grands changements avec le lancement du "Nouveau Lariboisière" qui bouleversera à terme la physionomie de cet établissement hospitalier parisien situé au Nord du dixième arrondissement à quelques mètres du carrefour Barbès ainsi que du quartier qui l'entoure. À cette occasion, nous consacrons une série estivale d'articles consacrés à l'histoire de l'hôpital Lariboisière en s'intéressant particulièrement aux bâtiments et à leur environnement urbain.
- Le Clos Saint-Lazare
- Le Versailles de la misère
- 1848 : La République chasse Louis-Philippe
- Une comtesse remplace la République
- Évolutions, extensions, rénovations...
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En 1854, après huit années de travaux, une révolution, trois régimes politiques et une multitude de changements de noms, l'hôpital Lariboisière est à présent ouvert. Inspiré des préceptes du docteur Tenon, l'établissement inaugure le système architectural hospitalier pavillonnaire afin de faciliter la circulation de l'air et d'isoler les services les uns des autres. Les contagions et les infections nosocomiales sont alors un grand problème et cette configuration prétend les résoudre. C'est aussi pourquoi on a isolé l'hôpital du reste du futur quartier environnant en l'encadrant de rues qui longent les bâtiments. Mais cette ceinture de rues ferme toute possibilité d'extension. Or, dès l'ouverture de l'hôpital Lariboisière, on se rend compte de la nécessité d'agrandir l'établissement, notamment pour les locaux techniques, ceux initialement prévus se révélant insuffisants pour le bon fonctionnement de l'établissement.
Faire et défaire
L'hôpital Lariboisière ouvre en 1854. Anticipant cette ouverture, la ville de Paris a entrepris des travaux de voirie et percé de nouvelles artères pour desservir le nouvel hôpital dès 1847. Ainsi, la rue Saint-Vincent de Paul a été prolongée pour créer une double perspective monumentale, avec le chevet de l'église Saint-Vincent de Paul d'un bout et l'entrée de l'hôpital Lariboisière de l'autre. La rue se termine au centre de la rue Ambroise Paré qui se limite à la largeur de la parcelle de l'hôpital. Elle forme le côté Sud du quadrilatère qui encadre étroitement l'hôpital. Le coté Ouest est formé par le prolongement de la rue de Rocroy et le coté Est par la rue de Bouvines, toutes deux finissant sur le chemin de ronde de la barrière de Saint-Denis (ou chemin de ronde de la barrière de La Chapelle), ce dernier fermant le quadrilatère côté Nord. Un peu plus à l'Est, une rue qui doit longer l'embarcadère des Chemins de fer du Nord (la future gare du Nord) est en projet (voir le Tableau de concordance des noms de rue plus bas).
1853
Mais voilà, à peine le nouveau grand hôpital de Paris ouvert, que la configuration urbaine pose problème. En effet, l'encadrement serré des rues autour de l'hôpital lui interdit tout agrandissement, alors qu'on convient vite de la nécessité d'adjoindre de nouveaux locaux techniques et des terrains, notamment pour les activités de blanchisserie. Il faut donc revoir la disposition des rues du secteur.
Tableau de concordance des noms de rue
Ancien nom | Nom actuel |
- Barrière de La Chapelle / barrière de Saint-Denis (1790)
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- Rue des Abattoirs / rue de l'Abattoir / rue des Abattoirs de Montmartre (1827)
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| - Supprimée et remplacée par une partie de la rue de Maubeuge (1855) ouverte plus à l'Est
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- Rue du Delta prolongée (1847 ?)
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| - Absorbée par le boulevard de Magenta (1855)
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| - Partie du boulevard de Magenta (1855)
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- Chemin de ronde de la barrière de La Chapelle / chemin de ronde de la barrière de Saint-Denis (1790)
| - Partie du boulevard de Chapelle (1860)
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| - Place Napoléon III (1987)
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- Rue des Jardins Poissonnière (1827) / Rue de Saint-Omer / Rue de Rocroy (partie entre le boulevard de Magenta et le chemin de ronde)
| - Supprimée et remplacée par la rue Guy Patin (1855) ouverte plus à l'Ouest
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En 1855, un arrêté du préfet de Paris détermine le nouvel agencement des voies du quartier. Cet arrêté prévoit l'élargissement de la rue du Nord pour devenir le boulevard du Nord, boulevard qui prendra le nom de Magenta en 1859. Ce nouveau boulevard absorbe la fin de la rue du Faubourg Poissonnière. La rue des Bouvines est partiellement supprimée entre la rue Ambroise Paré et le chemin de ronde, il en est de même pour la rue de Rocroy. Ces deux rues qui encadraient l'hôpital Lariboisière sont remplacées par la rue Guy Patin plus à l'Ouest et le prolongement de la rue de Maubeuge plus à l'Est. La rue de Maubeuge remplit donc le projet de rue longeant l'embarcadère des Chemins de fer du Nord. La rue Ambroise Paré est élargie et prolongée à l'ouest pour rejoindre le boulevard du Nord et à l'Est pour se connecter à la rue de Maubeuge. Les travaux sont estimés à dix millions de francs et sont réalisés sur plusieurs années.
1856
Un jardin pour le Versailles de la misère
L'hôpital Lariboisière est à présent à son aise sur une grande parcelle et aura tout le loisir de s'agrandir, encadré par les rues Ambroise Paré, de Maubeuge, Guy Patin et le chemin de ronde de la Barrière de La Chapelle.
1868
Et bien vite, en 1860, l'annexion des communes suburbaines à Paris va entraîner la destruction du mur des Fermiers généraux et l'élargissement du boulevard de La Chapelle qui absorbe le chemin de ronde. En 1866, l'hôpital se voit doté d'un prestigieux voisin architectural avec la gare du Nord d'Hittorf qui remplace l'embarcadère des Chemins de fer du Nord (le bâtiment de l'ancienne gare est démonté et reconstruit à Lille). Cette configuration urbaine est celle qu'on connaît aujourd'hui.
Mais les extensions voient timidement le jour, avec la maison du directeur au Nord-Ouest de la parcelle par exemple. L'espace libre est donc consacré à des jardins qui serviront à la promenade des malades, des convalescents en particulier. Deux petits jardins sont implantés à chaque bout de la rue Ambroise Paré et un plus grand au bout de la rue de Maubeuge. De chaque côté des "peignes" de l'hôpital, on crée des préaux plantés d'arbres.
L'espace libre au Nord-Est, entre le mur d'enceinte des bâtiments de l'hôpital, est consacré à l'étendage de la lessive. Notons que c'est dans les fumées des locomotives au charbon de la gare du Nord voisine, rabattues par le vent, que les malades se promènent et que le linge sèche.
Vue sur l'hôpital Lariboisière depuis le boulevard de La Chapelle (1888)
Vue sur les voies de chemin de fer de la gare du Nord, l'hôpital Lariboisière est au second plan (1910)
L'ère des extensions
À partir des années 1870, on constate la fragilité du terrain, d'anciennes carrières rappelons-le, et plusieurs campagnes de consolidation des bâtiments sont nécessaires pour sécuriser les constructions. Les agrandissements devront attendre encore.
C'est à la fin du dix-neuvième siècle que l'hôpital va commencer véritablement à se transformer avec d'importantes extensions. Plusieurs bâtiments vont être adjoints au principal, pour finalement, peu à peu, remplir la quasi totalité de la parcelle. D'abord coté rue Ambroise Paré, avec la construction des deux bâtiments qui longent la rue Ambroise Paré, encadrant le portail d'entrée.
Un grand pavillon, pastiche du bâtiment de Gauthier, est établi au Nord-Est, perpendiculaire au boulevard de La Chapelle. Aujourd'hui, il connait ses derniers jours, étant promis à la démolition comme nous le verrons plus loin.
Vue sur l'hôpital Lariboisière à l'angle du boulevard de la Chapelle et de la rue de Maubeuge, août 2018
Au début du vingtième siècle, deux nouveaux pavillons pastiches viennent remplir le Sud de la parcelle, un à l'angle des rues Ambroise Paré et Guy Patin et l'autre à l'angle des rues Ambroise Paré et de Maubeuge. Ces deux pavillons seront détruits plus tard, le premier à la fin du vingtième siècle et l'autre tout récemment, sa destruction lançant le programme du Nouveau Lariboisière. On ajoute encore deux autres constructions à l'entrée, qu'on adosse au bâtiment originel, formant ainsi une petite cour devant le portail principal.
Juillet 2018
En 1929, l'hôpital se voit doter d'une nouvelle maternité construite sur la partie Nord-Ouest afin de remplacer la précédente devenue vétuste. Cette construction de briques est le premier ajout qui ne s'inscrit pas dans la continuité architecturale de l'hôpital d'origine, il en sera de même pour toutes les constructions qui viendront ensuite.
Ancienne maternité de l'hôpital
L'informateur Médical, 10 mars 1929
Bien vite, le préau coté rue de Maubeuge disparait, les arbres sont coupés au profit de logements pour le personnel, d'ateliers et autres petits bâtiments techniques. Seul le préau longeant la rue Guy Patin perdurera quelques décennies encore.