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Mais qui est SOS Paris ?

Dès 2001, Action Barbès a tout de suite été sensible à la valeur du patrimoine puisque la protection du cinéma Le Louxor était, dès le début, une des raisons de sa création. Notre intérêt pour la sauvegarde de ce patrimoine et de sa problématique spécifique a  décuplé au contact de l'historien de très grande importance qu'est François Loyer puisque c'est lui qui nous a conseillés et aidés dans notre tentative, hélas vouée à l'échec, de sauver l'intérieur du cinéma, une fois celui-ci racheté par la Ville de Paris (voir dans la colonne de droite de ce blog dans la catégorie Histoire Louxor).

paris,patrimoine,sos-parisLes polémiques à propos de la sauvegarde du patrimoine parisien se sont multipliées ces derniers mois. Que ce soit le projet d'extension du stade Roland Garros et du sort réservé au serres d'Auteuil, celui de création de la tour Triangle porte de Versailles ou bien encore celui de LVMH à l'emplacement de l'ancienne Samaritaine rue de Rivoli, sans oublier celui de restructuration de la poste centrale de la rue du Louvre pour ne parler que des projets les plus médiatisés, les articles de presse et les prises de positions n'ont pas manqué. Au centre de tout cela, outre les acteurs impliqués, on retrouve l'association SOS Paris. Nous avons voulu en savoir plus et comme son Secrétaire Général, Jan Wyers, habite le 9e, il nous a été facile de l'interviewer.

 

Action Barbès (AB) : Quand SOS Paris a-t-il été créé et dans quels buts ?

Jan Wyers SOS Paris (JW) : En 1973, avec comme but la protection du patrimoine et le cadre de vie des Parisiens. C’était la période Pompidou : la tour Montparnasse, les voies sur berges, le projet d’autoroute urbaine traversant Paris du Nord au Sud en passant sous des gratte-ciel …

AB : Comment percevez-vous le comportement des Parisiens par rapport au patrimoine et sa préservation ? Pensez-vous que ce soit un réel souci pour eux, qu'ils y portent suffisamment d'attention ?

JW : Les Parisiens sont mal informés. Les communications de la mairie manquent de précision, d’objectivité et parfois même de vérité. Si les Parisiens nous paraissent malheureusement très passifs, c’est qu’ils ne perçoivent pas que leur mobilisation personnelle ou à travers nos associations peut leur permettre d'exercer une réelle influence sur leur ville.

AB : Au-delà des grands édifices et de l'urbanisme parisien si caractéristique, certains disent que le patrimoine architectural de Paris est exceptionnel. Partagez-vous cette affirmation et ce patrimoine est-il préservé comme il le faudrait ?

JW : Je réponds ‘Oui, tout à fait’ à la première question, mais pour la seconde, je dois hélas dire ‘non’ ! Depuis longtemps, ni la mairie ni le ministère de la Culture ne donnent suffisamment d’importance au patrimoine unique de Paris qui est une ressource non renouvelable. Et je parle là non seulement du ‘grand’ patrimoine, bien protégé, mais aussi des ensembles architecturaux homogènes et des petits détails (statues, décors, espaces verts…) qui ajoutent au charme de la ville. Ils clament leur volonté de moderniser Paris, ce qui revient en réalité à détruire ce qui fait son caractère.

AB : Le Plan Local d'Urbanisme de Paris est très protecteur du patrimoine nous dit la mairie de Paris. Partagez-vous cet avis ?

JW : En principe, il est fait pour protéger la forme urbaine de Paris, mais à condition d’être bien appliqué. Or en permanence, la mairie le remet en question pour permettre les projets qu’elle veut promouvoir. La modification actuelle du PLU est à ce propos très inquiétante. La priorité de la ville de Paris étant le logement, des modifications du PLU sont envisagées pour augmenter la volumétrie des immeubles par création de logements sous les toits. Or même si le plafond de hauteur des immeubles ne change pas, le paysage des toits est aussi sensible que celui des façades.

AB : Et puisqu'on parle de PLU, on ne peut pas ne pas évoquer les polémiques liées au projet de la tour Triangle ou celui de LVMH rue de Rivoli. SOS Paris a été extrêmement actif en se battant contre ces deux projets, avec quelque succès en ce qui concerne le projet rue de Rivoli. Sans revenir sur les arguments des uns et des autres, quel bilan pouvez-vous tirer aujourd'hui de vos actions qui pourraient vous aider à l'avenir ?

JW : Ces succès très médiatisés ont montré au public que la persévérance paie et lui ont donné une vision plus claire du patrimoine et des dangers qui le menacent.

AB : Les architectes contemporains se comportent un peu comme des rock stars à l'ego démesuré. Ils ne supportent pas la contestation de leur travail. Que penser de cette volonté de faire ce qu'ils appellent des «gestes architecturaux» et de cette façon de présenter Paris comme une ville-musée ?

JW : Absolument d’accord. Les architectes sont toujours ‘prestigieux’ ; tous ou presque ont le Prix Pritzker (le Nobel des architectes) et leurs projets sont nécessairement ‘merveilleux’. Le jugement sur l’esthétique d'un bâtiment est évidemment subjectif, mais celui sur son intégration dans le tissu urbain ne l’est pas : il est décrit en détail dans le PLU que la mairie de Paris a elle-même écrit, ne l’oublions pas ! Ville-musée, certainement pas : nous sommes des millions à aimer y vivre. Cet art de vivre mérite d’être protégé.

AB : Comment appréciez-vous la politique de la mairie de Paris en matière de patrimoine ? On a beaucoup parlé des églises parisiennes en mauvais état et aussi par exemple du projet de la poste rue du Louvre et également des serres d'Auteuil, résultat, disent certains, d'une politique pas assez rigoureuse en matière de préservation du patrimoine ou politique trop liée à certains intérêts financiers, disent les plus méchants. Qu'en penser ?

JW : Je dirais d’abord que le budget d’entretien des églises, propriété de la ville, est très insuffisant ; le projet de la poste du Louvre est victime de la recherche de rendement de la filiale de la Poste qui en est propriétaire. Son classement a été demandé mais le ministère de la Culture l’a refusé… paris,patrimoine,sos-parisDans l’affaire Roland-Garros, la mairie et la Fédération Française de Tennis (FFT) montrent un mépris total pour la triple protection dont bénéficient le jardin et les serres d' Auteuil : ils sont classés monuments historiques et jardin remarquable (‘espace boisé classé’). La propriété intellectuelle de l’architecte des Serres, Camille Formigé, est imprescriptible. La Mairie a organisé une enquête publique dont le rapport semble avoir été écrit par la FFT elle-même. Ce simulacre de concertation et de démocratie a provoqué la fureur des 60.000 signataires de la pétition ainsi que tous les amateurs de patrimoine.

AB : Y a-t-il des situations qui vous préoccupent concernant la préservation du patrimoine dans les arrondissements qui intéressent Action Barbès, à savoir les 9e, 10e et 18e ? Par exemple, la reconstruction de l'Elysée Montmartre se fait-elle dans de bonnes conditions ? Le projet de réhabilitation de l'hôtel Cromot du Bourg rue Cadet dans le 9e est-il satisfaisant ? A l'avenir, comment éviter des désastres comme par exemple la rénovation de la place Pigalle ?

JW : La reconstruction de l’Elysée-Montmartre me semble respectueuse de l’histoire de ce lieu (grâce à vos efforts ! ndlr Action Barbès n'est pas intervenu dans ce dossier). Nous travaillons à la protection du petit bois de la Cité des Artistes, rue Norvins à Montmartre. Hélas 90 grands arbres y ont déjà été abattus. Sur l’hôtel Cromot du Bourg nous avons un dialogue constructif avec la mairie du 9e ; quant à la place Pigalle, avec sa fontaine dont ne jaillit que rarement de l’eau, le charme qui devrait être le sien est largement enfoui sous le bitume. Avec un peu de verdure, quelques arbres et une restauration de l‘horrible façade des Folies Pigalle, elle aurait une autre allure. Pour éviter ce genre de désastre, nous avons besoin de toutes les bonnes volontés, adhérentes à SOS Paris ou non !

AB : Enfin, une question plus sensible pour SOS Paris. Vos détracteurs vous accusent de conservatisme. Comment prenez-vous cette critique ? Est-elle fondée ?

JW : Absolument pas ! Tous les adjectifs ont été employés pour nous qualifier de vieux croûtons et nous traîner dans la boue : c’est la rançon du succès ! Si nous réussissons à empêcher la mairie, les promoteurs et les architectes de ‘bétonner en rond’, de construire sur chaque espace vert, de dénaturer l’harmonie, la beauté architecturale, le charme, le profil urbain, en résumé tout ce qui nous fait aimer Paris, eh bien nous aurons fait notre travail et nous en sommes fiers !

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Le projet LVMH rue de Rivoli contesté par SOS Paris

 

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