" Plan vélo, piétonisation, restrictions des voies… les travaux entamés pour chasser les automobilistes rendent la ville impraticable." C'était le gros titre d'un article du Figaro le week end dernier. De la part du Figaro, on ne peut s'étonner que le parti des automobilistes soit bien défendu, et que les décisions de la Maire de Paris soient, disons... pourfendues.
Le Figaro, ce jour-là, entérinait avec amertume la décision du préfet de police de Paris, Michel Delpuech, de valider la fermeture définitive des voies sur berge, une décision de la maire de Paris pour promouvoir les circulations douces, d'une part, et lutter contre la pollution, de l'autre, dans la continuité du Plan Climat de Paris.
On connaît assez bien les arguments des lobbyistes de la route, de la voiture et de la droite. "On n'a pas le droit d'entraver la liberté des automobilistes de se rendre sur leur lieu de travail avec leur véhicule". Et, circulez, il n'y a rien à voir ! Mais peut-être bien que les temps changent et qu'on entend un peu plus la voix de tous ceux qui souhaitent respirer librement, sans dommage pour leurs poumons, y compris dans les villes. Or, cela devient de plus en plus compliqué. Il n'est qu'à observer les alertes de Air Parif' et les nombreuses journées de stationnement gratuit dans nos rues parce que les limites maximales fixées sont dépassées par la pollution. Quant à demander gentiment sur le boulevard périphérique que chacun réduise sa vitesse pour moins polluer.... voeu pieu.
Alors, oui aux décisions d'Anne Hidalgo de réduire la circulation automobile dans notre ville.
Cela fait plus de 15 ans qu'on réduit, qu'on aménage... Souvenez-vous de l'introduction des axes civilisés ! Certains riverains près des entrées de la capitale ont vu, avec terreur d'abord, le passage à une seule voie, puis se sont habitués. Des exemples ? l'Avenue Jean-Jaurès à l'Est, à partir de la Porte de Pantin, avec quelques bizarreries en cours de route comme les bus, un coup au milieu, puis un coup à droite... A côté, l'avenue Corentin Cariou a maintenu ses deux voies étroites à partir de la porte de la Villette mais c'est bien parce que l'avenue de Flandres, en poursuivant vers le centre, est plus large que large ! On ne parlera pas de la rue d'Aubervilliers, qui affiche toujours complet avant de passer sous le pont de la Petite ceinture... Réduite ou pas, la voie est bloquée. Au Nord, porte de Clignancourt, le boulevard d'Ornano affiche aussi une seule voie de circulation... officiellement, car la voie de droite est en principe réservée aux bus, mais sans séparateur, on reste là encore dans le voeu pieu, en attendant des aménagements plus efficaces. On y reviendra. Idem pour la porte de La Chapelle et l'avenue de La Chapelle, qui est au coeur de nos débats dans le cadre de la "promenade urbaine de Barbès à Stalingrad". Vous comprenez que nous sommes POUR la réduction de la place de la voiture dans Paris ?
"Pour" mais critique aussi. Tout ne va pas dans le bon sens. Nous n'avons parlé ci-dessus que des grandes voies d'entrée dans Paris par le Nord-Est et le Nord. Celles que nous connaissons le mieux, celles qui apportent la majorité des flux automobiles dans notre quartier. Pour autant, d'autres voies très larges existent, n'ont pas subi de réduction de circulation, et continuent à alimenter allègrement la densité automobile intra muros... Les maires d'arrondissement qui règnent sur l'avenue de la Grande Armée ou l'avenue Foch n'ont pas collaboré avec le même enthousiasme (mais ce n'est que supposition de notre part..) à la réduction des voies de circulation sous l'ère Delanoë. Or ces flots de voitures viennent s'agglutiner sans limite à l'encombrement parisien, quand on pourrait fort bien privilégier les transports en commun et les pistes cyclables dans ces quartiers aussi.
Ce n'est pas le seul souci. La critique du Fig' n'est pas sans fondement. On a voulu rendre plus "vivable", moins pollué le centre de Paris, les arrondissements centraux, pas seulement pour les "bobos" comme le suggère le journaliste, mais aussi pour le tourisme, le patrimoine, le rendre plus accessible, le valoriser dans un environnement apaisé. Très bien. Mais depuis plus de 15 ans, on ferme — ou l'on réduit — petit à petit la circulation des quartiers du centre sans réduire en amont. Alors, oui, ça s'entasse aux portes des zones bénéficiant des aménagements décidés par la mairie. Est-ce bien raisonnable ? La politique de la Ville n'a pas su améliorer de façon sensible le réseau de transport en commun, entre ses banlieues et la capitale, pas plus que la Région entre les banlieues entre elles, si bien qu'elle hésite à filtrer les flux entrants.... Le risque est grand d'être clouée au piloris pour excès de protectionnisme parisien.
Ajoutez à ces encombrements déjà difficilement supportables les cars de tourisme — dont le nombre avait diminué un temps à la suite des attentats — qui déversent leurs passagers (environ 12 millions par an) sur les sites les plus attractifs de la capitale puis tournent ensuite au ralenti pour économiser la taxe de stationnement (130€/j.), ou bien se garent sur des espaces miraculeusement trouvés ça et là, comme par exemple les ponts au-dessus des réseaux ferrés. En voici une illustration ci-dessous qui se passe de commentaire. Que fait la mairie pour en réduire le nombre, ou pour organiser leur circulation et leur stationnement (450 places autorisées à Paris) sans nuisance pour les habitants ?
Pont Saint-Ange, au-dessus du réseau ferré de la gare du Nord.