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Salle de conso : Comité de voisinage n°2

La deuxième réunion du Comité de voisinage dans le cadre de la salle de consommation à moindre risque (SCMR) s'est tenue le lundi 21 novembre dernier (voir notre article du 10 octobre dernier sur la première réunion de ce comité).

Comme vous le montre la photo, l'assiduité des différents organismes membres du comité est réelle et les débats de très bonne tenue. L'ordre du jour de la réunion était particulièrement chargé, aussi vous ne trouverez dans cet article qu'un résumé aussi complet que possible de ce qui s'y est dit.

Allons d'abord à l'essentiel : depuis son ouverture le 17 octobre dernier, la vie du quartier n'a pas été bouleversée et tout se passe relativement bien. Chacun reconnait tout au long de la réunion qu'il est beaucoup trop tôt pour tirer quelque conclusion que ce soit de ce mois d'opération. Un renforcement de la présence policière a été notée.

La Charte du comité de voisinage a été définitivement adoptée au cours de la réunion. Celle-ci intègre les demandes de modifications qui avaient été faites au cours du premier comité. Sa lecture fixe bien les domaines de compétence du comité et son fonctionnement. Vous pouvez la télécharger : Charte du comité de voisinage.

L'association GAIA qui gère la salle a donné des informations à propos de son fonctionnement depuis son ouverture : ...

... 60 passages le premier jour et 160 au 20 novembre. Sachant qu'une personne peut passer plusieurs fois dans la journée, GAIA estime que 120 personnes viennent chaque jour. Ceci est dans la droite ligne des prévisions de GAIA qui se montre donc satisfaite de ces six premières semaines. L'association précise que les règles de fonctionnement sont bien acceptées par les usagers de drogue. L'équipe qui gère la salle, une première en France, se "rode" petit à petit. On compte 358 inscrits à mi-novembre, la grande majorité déjà connue de GAIA qui a eu aussi la surprise de voir venir des gens qui avaient juré de ne pas y aller. "Le bouche à oreille fonctionne bien" précise Elisabeth Avril, Directrice de GAIA. Les maraudes dans le quartier continuent néanmoins afin d'y maintenir une présence. Par contre, les antennes mobiles de GAIA ne stationneront plus dans le quartier du fait de l'installation de la SCMR. Important pour le quartier, GAIA assure que les personnes qui ressortent de la salle de consommation sont en capacité de le faire sans problème. Sur le plan médical, il n'y a rien de particulier à signaler si ce n'est quelques bobos sans gravité soignés dans la salle (des abcès, par exemple), mais aussi dépistage des virus HIV et Hépatite C. Importance donnée à l'hygiène. Sur le plan social, l'essentiel des demandes concerne le logement et l'ouverture des droits qui y sont liés, tant la population qui fréquente la salle est la plus démunie et souvent SDF. GAIA reconnait que certains usagers sont "très abimés", ce qui a un impact sur l'espace public. La forte présence de la police, si elle rassure les riverains, fait un peu fuir quelques usagers.

A la suite de cet exposé assez complet, quelques sujets sont venus en débat.

Si on reconnait que l'ouverture de la SCMR n'a pas créé "l'appel d'air" redouté (en clair une arrivée massive d'usagers de drogue), quelques personnes nouvelles accompagnées de chiens sont apparues dans le quartier. GAIA assure que ces personnes, même si elles sont inconnues dans le quartier, ne le sont pas de l'association. Néanmoins, Rémi Féraud, maire du 10e, demande à GAIA de travailler sur cette question, notamment sur le comportement dans la rue, ce que GAIA accepte.

Deborah Pawlik, conseillère de Paris (LR), demande quelques chiffres à propos des bénéficiaires des soins sociaux et des appels téléphoniques. GAIA précise qu'elle a reçu six appels de riverains pour intrusion dans des immeubles. Il y a eu pendant les six semaines 350 entretiens sociaux et 200 entretiens médicaux.

La question de la présences de chiens est soulevée. GAIA précise que les chiens sont d'une très grande importance pour les usagers de drogues et que la très large majorité des chiens, si ce n'est la totalité, sont en règle (tatoués, vaccinés). La salle dispose de muselières si nécessaire et bien sûr les chiens ne pénètrent pas dans la salle. Le Maire du 10e précise que la présence de chiens ne doit pas être dissuasive pour les autres usagers de la salle. 

Est-il normal que soit délivré du matériel qui n'est pas utilisé dans la salle ? Elisabeth Avril rappelle que la SCMR est un CAARUD et qu'en conséquence il n'est pas anormal qu'elle fournisse du matériel pour l'injection. Il est également rappelé que le cahier des charges de la salle ne stipule pas que tout le matériel doit y être utilisé. 

Des riverains signalent qu'il y a encore des seringues usagées dans le quartier et qu'il semble que la présence de dealers soit plus importante. Tout ne peut pas disparaitre d'un seul coup, se défend GAIA. Le grand nombre d'injections qui ont eu lieu dans la SCMR (plus de 3000 en six semaines) a quand même un impact. L'association SAFE qui gère les distributeurs de seringues, dit qu'il est trop tôt pour tirer des conclusions sur ce point, même s'il semble que certains comportements aient changé. Il semble qu'il y ait eu un report des usagers sur la rue Saint-Vincent-de-Paul suite aux travaux de la SNCF au carrefour Maubeuge/Ambroise-Paré. Rémi Féraud demande des éléments chiffrés sur ce point pour le comité n°3.

La Police précise qu'il y a eu un renforcement de sa présence tant avec des équipes VTT en tenue que des policiers en civil (BAC10). Elle n'a pas noté d'incidents particuliers liés à l'ouverture de la salle et confirme son souci d'adapter son travail notamment en fonction des heures d'ouverture de la SCMR. Elle est particulièrement vigilante le matin et en début de soirée, aux heures où la salle est fermée. GAIA ajoute que les rapports avec la police sont constants, que des réunions régulières se tiennent pour la formation des policiers qui viennent également visiter la salle. Des renforts sont prévus pour décembre.

Le Maire du 10e indique qu'un périmètre de "tolérance" a été défini par le Procureur de la République afin de tenir compte des dispositions légales concernant le port et l'usage de drogue. Néanmoins, ce périmètre reste une information confidentielle, à la demande du parquet. Il souligne aussi que la plupart des personnes fréquentant la salle sont des utilisateurs de Skénan, médicament qui n'est pas illégal.

Déborah Pawlik souhaite avoir un complément d'information sur la présence des dealers qui semble plus importante depuis l'ouverture de la salle, sur la sanisette devant l'hôpital qui est une vraie "salle de shoot", sur la présence de toxicomanes dans les parkings et sur les bagarres dans le quartier. La présence des dealers fait l'objet d'une attention particulière de la BAC10 en civil répond la Police. Le Maire précise que si la fermeture de la sanisette de la rue Ambroise-Paré a bien été envisagée, une expérience antérieure a montré que ce n'est pas une bonne idée à cause du report que cela crée. En ce qui concerne les parkings, là encore il est trop tôt pour tirer des conclusions. Ce qui est constaté est une nette augmentation de consommation de krach, sans rapport avec la salle.

Prochaine réunion le 26 janvier 2017.

 

Commentaires

  • Un très grand merci à Action Barbes pour ce compte-rendu et surtout pour votre travail de terrain depuis des années. Efficace, juste et pertinent.
    Bien à vous

  • Curieuse remarque du maire du 10e : "le Skénan, médicament qui n'est pas illégal". Ce médicament est un dérivé de la morphine détourné de son usage qui fait l'objet de trafic, ce qui vaut régulièrement à des médecins et pharmaciens d'être condamnés pour leur implication dans ce trafic qui, lui, est illégal. A ce compte -là on pourrait aussi bien dire que les opiacés, la morphine voire l'héroïne ne sont pas des produits illégaux, puisque leur utilisation est permise dans un cadre pharmaceutique ou expérimental bien défini... Un petit reportage parmi d'autres sur le Skénan, qui commence par une jolie vue du viaduc de la ligne 2 : http://www.m6.fr/emission-enquete_exclusive/videos/11248641-le_skenan_une_nouvelle_drogue_qui_fait_des_ravages.html

  • @JD : comme pour tout, les amalgames sont dangereux et induisent en erreur. La liste des substances interdites (détention et usage) telles que le stipule la très répressive loi de 1970 ne comprend évidemment pas ce que la loi considère comme un médicament, ici en l'occurence le skenan. Une rapide recherche sur un moteur de recherche en situation de quasi monopole le montre très facilement. Donc le port de ce médicament n'est pas illégal puisque médicament légal. La morphine et autres opiacées sont illégaux au regard de la loi de 1970 (détention et usage de substances interdites) mais pas dans le cadre de traitements dans des structures habilitées à faire ces traitements.

  • Eternelle histoire du verre à moitié plein ou à moitié vide... :-) Exemple à propos d'un trafic de Subutex, médicament légal et remboursé par la Sécu (3 millions de boites en 2012, dont 750 000 auraient fini chez les dealers) : "25 personnes, trafiquants, médecins et pharmaciens, sont impliquées dans le dossier parisien, qui, à lui seul, aurait coûté 4 millions d'euros à l'Assurance-maladie. C'est que les sept généralistes mis en examen n'y sont pas allés de main morte : en deux ans, ils ont prescrit environ 130 000 boîtes de Subutex. Ils risquent cinq ans d'emprisonnement pour infraction à la législation sur les substances vénéneuses." Ci-dessous un article intéressant sur le statut de ces drogues légales. Problème qui ne nous éloigne pas du sujet de la SCMR puisque la question de fond est : "Faut-il médicaliser et assister la toxicomanie aux drogues dures ; dans quelle mesure la société doit-elle ou peut-elle organiser et financer cette addiction ; certaines solutions comme la distribution gratuite de drogues pas illégales ou les SCMR n'ont-elles pas au moins autant d'effets pervers que de bénéfices ?" (l'avenir le dira, peut-être). http://www.lexpress.fr/actualite/societe/sante/subutex-trafic-sur-ordonnance_1503099.html

  • @JD : vous transportez le sujet sur un autre problème, celui des trafics. Restons-en à la SCMR. L'objectif est la réduction des risques liés à l'usage de drogue . Qu'il y ait SCMR ou pas SCMR, les trafics existent, vous le dites vous même. La présence de la salle ne change rien au problème et dire qu'il y aurait des effets pervers 1/ n'est pas prouvé 2/ ne change pas la nature du problème de santé publique.

  • Je ne transpose pas : ces trafics concernent principalement des médicaments substituts aux drogues interdites, qui deviennent eux-mêmes des drogues dures, avec tout cela implique (trafics, conséquences pour les usagers, etc.). Ce qui est paradoxal, quand même...! Par ailleurs je connais et respecte votre position sur les SCMR, même si je suis pour ma part dubitatif, entre autres parce que toute rupture du principe d'égalité des citoyens devant la loi me paraît dangereuse (or dans le cas des SCMR il s'agit de déroger, pour un lieu précis et pour les gens qui le fréquentent, à la loi qui définit la détention et la consommation de drogues comme un délit, pour tous et sur tout le territoire).

  • @JD : mais le principe d'égalité de chacun devant la loi n'est absolument pas rompu. Je vous assure que si vous allez dans la zone de la SCMR avec 1gr d'héroïne, vous serez traité comme tout le monde. Et je vous assure aussi qu'un usager de drogue avec 10g d'héroïne dans ses poches en dehors du périmètre retenu sera traité comme tout le monde. Il n'y a pas de rupture d'égalité.

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