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Comité de voisinage de la salle de conso 4e édition

salle-de-consommation,SCMR,Paris10e

Ce fut une longue réunion... 3 heures ! Nous nous y attendions un peu à la suite de la rixe du 26 février et de la vidéo tournée par un voisin qui a fait le tour des réseaux sociaux pendant plusieurs jours. Vous verrez de quoi il s'agit si vous visionnez le documentaire tourné par une équipe du site Allodocteur et dont nous vous donnons ici le lien. (Reprise des quelques secondes de la rixe filmée par un riverain) Vous y retrouverez Elisabeth Avril, la directrice de l'association Gaïa, et Marie Jauffret-Rustide, chercheuse à l'Inserm qui continue à conduire son étude sur l'expérimentation de la salle. Egalement une habitante du quartier qui décrit la situation comme elle la vit, c'est à dire en dégradation constante depuis janvier. 

Les médecins se sont exprimés en premier

L'équipe de Gaïa, d'un côté, est satisfaite de l'évolution de la situation qui a été correctement évaluée avant l'ouverture. La salle est dimensionnée pour environ 200 passages jour et ils y seront bientôt. La moyenne actuelle est 180 avec deux pics par semaine supérieurs à 200. Elle n'ignore pas les conflits qui peuvent exister en dehors de la salle, les usagers de drogue ne sont pas toujours faciles à gérer et les conflits ont lieu parfois à l'intérieur aussi, "dans ce cas, on les gère plus facilement" ajuste Elisabeth Avril, avec un sourire. Peut-être la salle devrait-elle rester ouverte sur une plage horaire plus large, mais c'est une question de financement qui se pose dans cette hypothèse. Gaïa continue ses maraudes pédestres et son travail de médiation dans le quartier : elles donnent de bons résultats et permettent d'échanger avec les commerçants et au besoin de rencontrer des voisins qui peuvent aussi appeler Gaïa pour une visite (15 ont déjà eu lieu). Le médecin de la salle a expliqué son travail au sein de la consultation en donnant des exemples des cas qu'elle a pu traiter. Elle met l'accent sur le dépistage (VIH et Hépatites). Les autres soins sont des pansements, le soin des abcès, la prise d'antibiotique en cas d'infection, et beaucoup d'information pour prévenir les risques de contamination. Elle précise que les usagers de drogue malades, et dont le cas irait au-delà d'un soin classique réalisable à la salle, sont orientés vers le centre de soins de Gaïa dans le 11e, car le service des urgences de Lariboisière n'a pas vocation à soigner les usagers de drogues en particulier, mais en priorité les cas urgents. C'est une précision que donnera elle-même la directrice de l'hôpital, Mme Isabey. 

Les habitants et les associations ont donné leur version de la situation

Les riverains, certains opposés depuis le début à la salle, mais d'autres plus neutres, ont exprimé leur sentiment d'insécurité et leur vision de la situation : un mieux les deux premiers mois, puis depuis le début de l'année, une dégradation, davantage de toxicomanes dans les rues, des consommations sur les rebords de fenêtres quand la salle est fermée, des deals et des trafics très sereins en pleine rue... Au-delà du malaise et de la colère de riverains, qui ont écouté très attentivement les données chiffrées des médecins, et la description de certaines situations personnelles de toxicomanes, les élus présents ont voulu recadrer les circonstances de l'ouverture de la salle. Rémi Féraud a confirmé qu'il entendait la souffrance exprimée, les inquiétudes quant au nombre de toxicomanes qui fréquentent le quartier et la salle, les risques de conflits qui peuvent en résulter. Il a rappelé que la situation avant la salle était déjà problématique, tendue même parfois. La salle n'a pas été créée pour supprimer l'usage des drogues mais pour diminuer les injections à ciel ouvert, dans les entrées de parking, ou les halls d'immeuble du quartier ; pour réduire le nombre des seringues qui traînaient dans les caniveaux et la sanisette (rue Ambroise-Paré). Pour oeuvrer dans le sens de la diminution des risques, en bref. Et non avec la mission de faire disparaitre toute présence de drogue dans le quartier. On ne peut donc pas demander à la salle, au bout de cinq mois, de régler tous les problèmes qu'on n'a pas réussi à régler avec les méthodes de répression classiques en un demi-siècle.

Qu'avons-nous entendu de la part des autorités policières ? 

Le commissaire Vallot, comme lors des premières réunions du comité de voisinage, et comme les médecins, a énoncé des chiffres qui correspondent à des faits. Les policiers sont bien présents dans les rues du quartier, ils maximisent leur présence par des patrouilles pédestres. Ils ont déjà procédé à 600 interpellations pour détention de produits stupéfiants (on se souvient que le procureur a fixé des limites à la détention de drogue sur un périmètre précis, et que ces info  sont non communiquées), sur 2000 personnes contrôlées. 900 ont été redirigées vers la salle, sans être interpelées donc. Le commissaire ne nie pas le trafic de stupéfiants, ses hommes continuent à le traiter, y compris avec des déferrements quand il le faut. 

Le commissaire souligne que le quartier est très bien doté en caméras de vidéosurveillance, elles sont au nombre de sept et fournissent une aide précieuse et instantanée en cas de problème signalé par des habitants, ou une patrouille sur le terrain, par exemple. La police est présente sous toutes ses formes : la BAC, fidélisée sur le secteur, lutte contre les trafics de stup' dans l'espace public, intervient sur les flagrants délits, la BST, en collaboration avec l'opération "Barbès Respire" un peu plus au nord, la brigade de police secours répond à des demandes des patrouilles pédestres ou en VTT et vérifie l'ampleur des problèmes signalés. Notons encore la brigade de soutien des quartiers qui tous les jours vient en appui sur les sites des parkings, et se rapproche des copropriétés pour signaler les failles de sécurité (portails mal ou pas sécurisés).

Notre impression d'association qui a soutenu l'expérimentation

Nous retenons le témoignage d'une habitante de la rue Ambroise Paré, qui se déclare neutre par rapport à la salle, pas opposante de prime abord, parce que les arguments avancés de diminution des risques l'avaient touchée. Elle nous a expliqué que dans les semaines qui ont suivi l'ouverture de la salle, elle avait la possibilité de parler avec les usagers de drogue qui "zonaient" au pied de son immeuble, elle pouvait le faire sans crainte, car elle les connaissait à force de les croiser dans la rue, et eux avaient pris l'habitude d'échanger. Mais depuis janvier, ils sont beaucoup plus nombreux, et elle perçoit cette affluence de nouveaux venus comme un handicap : on ne se reconnaît plus, on se craint d'un côté comme de l'autre, car il est rare que les passants ou les habitants soient aimables ou simplement décontractés au contact de la toxicomanie. Les échanges et même les saluts sont devenus impossibles. La tension est montée d'un cran. Les dealers lui semblent plus présents également.

Le maire Rémi Féraud a déclaré qu'il entendait tout ce qui était dit de part et d'autre, y compris l'insistance de l'opposition municipale à vouloir la fermeture de la salle... mais le comité de voisinage est là pour faire remonter les problèmes et le comité de pilotage pour leur trouver des solutions. Le procureur Molins, qui assistait au dernier comité de pilotage, a bien martelé qu'il fallait une vigilance soutenue et une cohérence dans l'action des pouvoirs publics, de la police et de la justice.

Le maire par ailleurs n'a pas ignoré la demande d'un réaménagement de la rue, peut-être, si cela permet de mieux maitriser la situation. C'est la tranquillité publique qui est en jeu, et la salle à elle-seule ne peut pas résoudre tous les problèmes de toxicomanie. Pas plus qu'elle les rend plus insupportables. En revanche, n'est-elle pas sous dimensionnée pour accueillir tous les injecteurs de Paris... la solution serait-elle une seconde, voire plusieurs autres salles ? 

Commentaires

  • Bonjour et merci pour ce compte-rendu précis. Je n'ai pas vraiment d'avis sur la salle en question, je suis passée par hasard à proximité un soir et j'ai été très surprise par le changement d'atmosphère. Il y avait effectivement un grand nombre de gens qui y zonaient qui s'apostrophaient avec agressivité, ce que je n'avais jamais remarqué avant. Je ne me suis pas sentie menacée mais j'ai plaint le voisinage immédiat. D'autant plus que je n'ai croisé aucun policier et j'ai l'impression que la présence policière est plutôt concertée boulevard Barbès à présent.
    Si je comprends Les raisons qui ont conduit à installer cette salle dans ce quartier, peut-être n'était ce quand même pas judicieux de choisir un quartier qui se débattait déjà avec nombre d'autres difficultés. Il y a quand même des limites à ce qu'un quartier donné et ses habitants peuvent supporter.

  • @famille de Barbès. Bien sûr que tout quartier a des limites de tolérance. Pourtant ce qu'il faut savoir et considérer, c'est que la plus grosse consommation de kits de seringues stériles est dans ce quartier, entre la gare du Nord et la station Barbès ! (statistiques à l'appui de l'association qui remplit les distributeurs). A partir de là, si l'on souhaite oeuvrer dans le domaine de la réduction des risques, apporter information et aide aux usagers de drogues, très précaires, qui "zonent" dans le quartier, rien ne sert d'aller installer une telle salle ailleurs.
    C'est un peu un principe de réalité qui a fait faire ce choix et aussi les plaintes des habitants qui réclamaient la fin des injections en scène ouverte (parking, entrée des immeubles, recoins, etc).
    Rien n'est parfait. Le comité de voisinage est là pour tenter de résoudre les problèmes quand ils se posent.
    Merci de votre lecture attentive du blog.

  • Le petit problème est que les promoteurs de cette opération nous avaient annoncé que la salle ne créerait pas de nuisances, bien au contraire (un seul exemple, ce tweet d'Action Barbès : "La SCMR constituera un progrès pour la tranquillité publique"). Ceux qui disaient le contraire étaient pris de haut et décrits en permanence comme des égoïstes un peu abrutis (je me souviens même d'un article soulignant qu'une élue opposée à ce projet s'exprimait "dans un français approximatif"...). Ne parlons pas des promesses sur les effectifs de police spécifiquement affectés au secteur concerné, qui, au fil du temps, se sont dissoutes dans le réel... Bref, rien de très surprenant dans cette affaire, on peut seulement regretter l'engagement à 100 % d'AB et le fait que l'association se soit fait la propagandiste, au fil d'innombrables interventions, du point de vue officiel, contre l'opinion - finalement pas si idiot que cela - de très nombreux habitants du quartier.

  • Suis 100% d'accord avec @jd. Et quand on se permettait de demander à Action Barbes de prendre en compte les préoccupations des riverains, on avait au mieux de l'indifférence. Je ressens exactement la même chose dans le combat pour la végétalisation du quartier. Et la demande, qui n'est jamais - ou trop peu - relayée par AB, d'arrêter la bettonisation à outrance, par exemple à l'ancien emplacement de Ground Control. C'est dommage parce que, quand les grues seront là (cf feu l'ancienne Goutte Verte) il sera trop tard. En outre, c'est aussi une question de justice. Comment expliquer que le Nord de Paris n'ait pas le droit à la même quantité d'Oxygène et d'espaces verts que le reste de Paris. Pourquoi n'en faites vous pas un combat AB?

  • L'accent devrait être mis effectivement sur la végétalisation du quartier, sur l'éducation pour nos enfants et l'apprentissage du code, sur l'investissement économique en misant sur des espaces de coworking pour montrer que notre quartier vit et que cela ne se résume pas seulement une salle de shoot.

  • @JD : Nous lisons avec surprise votre commentaire qui est une vue très subjective de la réalité. Comme dit le langage populaire, chacun voie midi à sa porte, mais de là à travestir la réalité il y a un pas que vous franchissez et qui implique donc une réponse de notre part.
    Constituer un progrès pour la tranquillité publique ne signifie pas que les problèmes soient résolus d’un coup de baguette magique dès l’ouverture de la salle. Nous n’avons aucune raison de ne pas croire le commissaire de police du 10e qui a répété à maintes reprises que ses effectifs avaient été correctement augmentés. Que vous jugiez cela insuffisant est une autre affaire et vous affirmez un peu rapidement qu’il y a eu dissolution de ceux-ci.
    Enfin, et c’est peut-être le plus injuste de votre commentaire, vous reprochez à Action Barbès son attitude que vous jugez « méprisante » et servant de relais aux autorités. Tout cela ne tient pas, vous le savez très bien. Action Barbès a choisi de soutenir ce projet et d’en expliquer les tenants via ses articles sur ce blog. Nous avons travaillé (et réfléchi, oui cela nous arrive) avant de fixer une position. C’est vous qui êtes méprisant en ne considérant pas l’aspect militant de notre action. Oui, nous sommes convaincus du bien fondé de la politique de réduction des risques.

  • Moins de risques je suis d'accord. Mais la notion de moins de risque est vaste...
    Moins de risques pour les consommateurs des drogues. OK. La salle représente effectivement moins des risques.
    Moins de risques pour la vie quotidienne des riverains? Non décidément non .
    Pourquoi deux poids et deux mesures?

  • @AB : je respecte vos positions et, comme vous le savez, j'ai toujours salué la qualité de votre travail. Cela n'empêche pas d'avoir des avis divergents sur tel ou tel point, surtout quand un projet n'est pas forcément conforme à l'intérêt général. Dans le cas de la SCMR vous avez fait campagne et relayé sans nuance le discours officiel. Vous avez méprisé - je maintiens le mot - le point de vue opposé (ah les posts sur le NIMBY, l'allusion plus que douteuse à l'opposante qui s'exprime "dans un français approximatif", etc.). A ce jour les résultats ne sont pas ceux que vous, vous l'ensemble des promoteurs de cette opération, aviez annoncé, durant des années. A mon avis il ne pouvait pas en être autrement : dès lors que l'on entreprend d'officialiser et de gérer des activités prohibées par la loi (SCMR, "carrés des biffins", etc.) on entre dans les sables mouvants (de même, inversement, quand on entend interdire des activités qui n'ont rien d'illégal comme le fait que des gens parlent dans la rue devant les bars, ce qui peut déranger des voisins "NIMBY"). Toujours à mon avis, une association de quartier ne devrait pas contribuer à imposer aux riverains des projets contestés et contestables, même quand elle estime qu'ils sont pertinents. Entre autres parce que si la réalité s'annonce moins mirifique que ce qui était annoncé, elle risque de se voir demander des comptes, ce qui est légitime me semble-t-il.

  • (Et tandis que j'écrivais ce commentaire je voyais s'afficher dans la colonne de droite, sous la rubrique "SCMR info", les quatorze liens que vous donnez vers des sites qui défendent les SCMR, au point qu'un instant, troublé, je me suis demandé si je n'étais pas en fait sur la page d'une association consacrée à la toxicomanie plutôt que sur celle des habitants du quartier Barbès.)

  • @jd et @ab, Merci pour vos messages.

    Cette histoire de la salle de shoot doit, je pense, nous aider à nous projeter vers l'avenir et sans doute comme le dit @jd, à mieux écouter les riverains. Pour ma part, vous l'aurez compris je pense ;-)
    je ne comprends pas (et j'écris aussi pour plusieurs amis qui habitent dans le quartier), que l'on ne mette pas davantage l'accent sur:

    - la végétalisation et la plantation et la diversité écologique, (cf arbres fruitiers comme le fait Vergers Urbains), marre des particules fines dans le 18ième,
    - l'attraction économique (attirer de nouvelles entreprises), et l'encouragement à grandir des entreprises nées ici
    - l'accession sociale à la propriété,
    - la lutte contre la bétonisation à outrance. On va encore m'accuser de tous les maux mais je ne comprends pas nous ne battons pas pour que l'ancienne zone Ground Control ne devienne pas un parc ou une zone d'agriculture urbaine alors que notre quartier est déjà très dense et pollué.

    Certains membres d'Action Barbes vont sans doute me dire qu'on ne peut rien faire car cela n'a pas été voté en AG, mais j'ai peur que si on attend encore, ce sera trop tard.

    Bon we et vacances à tous. Pour nous, ce sera dans notre bon quartier, nous n'avons pas les moyens de partir.

  • Bonjour,
    L'action d'action Barbès est elle étendue au sud du Xe et notamment au métro Strasbourg Saint Denis?
    Usager de la ligne 4 je ne cesse de voir la situation se dégrader sur le quai direction Montrouge qui ressemble plus à un squat de drogués qu'à un quai de métro. L'odeur est irrespirable et les gens se piquent et prennent du crack à la vue de tous. Bien loin de l'image bucolique dont souhaite se parer la ratp avec ses poèmes.
    La situation se tend entre usagers mal à l'aise et camés livrés à eux mêmes.
    Je n'ai vu aucune intervention à ce jour (police et ratp), peut être attendent-ils que la situation ne se dégrade réellement ce qui risque d'arriver bien vite?
    Merci

  • Vous posez LA grande question : on sait d'expérience que les autorités sont parfaitement informées de ce genre de situation, mais qu'à chaque fois elles laissent faire jusqu'à ce que le problème devienne totalement ingérable. Exemple parmi tant d'autres : le marché sauvage de Barbès : au début il n'y avait qu'une dizaine de personnes, les autorités étaient informées (entre autres par AB), il aurait suffit de la présence permanente d'un ou deux policiers les jours de marché pour juguler le problème, sans violence. Mais on s'est rapidement retrouvés avec des centaines de vendeurs, des trafiquants et voleurs qui ont profité de la situation, des forces de l'ordre en nombre mais débordées, des actions inefficaces, parfois injustes ou brutales, et une tumeur incrustée dans le quartier...

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