ROSEN SURVIVANTE DE LA PROSTITUTION AVEC http... par osezlefeminisme
> Signez et relayez l'appel signé par plus de 1000 jeunes !
L'appel paru dans Libération en septembre dernier a recueilli plus de 1000 signatures ! Avez-vous pensé à le signer ? Retrouvez-le et signez-le sur le site du collectif jeunes
Huit organisations de jeunesse s’associent pour mener campagne pour l'abolition de la prostitution.
Dans un appel intitulé « Génération Abolition de la Prostitution » signé par plus de 1000 jeunes et à l’aide de plusieurs supports d’information et d’argumentation, l’Union Nationale des Etudiants de France (UNEF), le Mouvement des Jeunes Socialistes (MJS), l’Union Nationale Lycéenne (UNL), Osez Le Féminisme ! (OLF), Les EfFRONTté-e-s, le Mouvement des Jeunes Communistes Français (MJCF), l’Union des Etudiants Communistes (UEC) et La Mutuelle Des Etudiants (LMDE) s'expriment collectivement et publiquement pour la première fois en faveur de l’abolition du système prostitueur.
Commentaires
Ce sujet de l'abolition de la prostitution est complexe, sensible, voire polémique.
Il y a sans aucun doute beaucoup de souffrance et de violences dans les témoignages des prostitué(e)s, le plus souvent des femmes. La vidéo présentée dans le blog, avec l'interview de Rosen, illustre ces blessures morales et ces épreuves.
La position des associations (féministes) souhaitant cette abolition peut parfois être polémique en opposant les deux genres: d'un côté les femmes, prostituées et victimes, et, de l'autre, les hommes, clients, proxénètes.
Outre la tribune "Génération Abolition de la Prostitution" que nous trouvons dans l'article de ce jour, il y a eu également la tribune du Collectif Femen dans Libération Next: "L'Europe doit se défaire de sa vision romantique de la prostitution"
http://next.liberation.fr/sexe/2013/10/10/l-europe-doit-se-defaire-de-sa-vision-romantique-de-la-prostitution_938371
Mais l'approche défendue par Aides, le Planning Familial, HES et les Jeunes Radicaux de Gauche, défend l'idée qu'une tentative d'abolition de la prostitution rendrait moins visibles les prostituées, favoriserait leur clandestinité et les sortirait donc du champ de la prévention. Un tel projet de loi serait totalement contre-productif, en aggravant la détresse des prostituées et en ne contribuant certainement pas à une meilleure santé publique.
Voici cette tribune publiée dans Libération du mardi 24 septembre:
http://www.liberation.fr/societe/2013/09/24/pour-une-approche-realiste-de-la-prostitution_934057
Nous devons aussi relayer le communiqué du STRASS (Syndicat du Travail Sexuel) appelant à l'abrogation du délit de racolage public, afin de ne plus pénaliser les prostituées. Le STRASS insiste sur le risque accru de précarisation des prostituées, car la pénalisation des clients accentuera leur clandestinité.
http://site.strass-syndicat.org/2013/09/manifeste-contre-la-penalisation-des-prostituees-et-de-leurs-clients/
Nous reviendrons certainement sur ce thème. Merci à tous ceux qui ont bien voulu nous alerter.
Voici un article additionnel publié par l'association AIDES en mars 2013, qui fait le point sur le délit de racolage public, qui est étendu au "racolage passif" depuis 2003 ("Loi sur la sécurité intérieur" ou LSI):
http://www.aides.org/prostitution-et-delit-de-racolage-les-risques-du-metier-1882
AIDES et les autres associations de prévention sur le terrain font le constat que la loi, loin de faire reculer la prostitution, a en fait détérioré ses conditions d'exercice, avec plus de clandestinité et d'isolement des prostituées, et des conséquences regrettables sur leur santé et la santé publique.
A lire donc!
Personne ne conteste l'absolue nécessité de combattre la prostitution et les violences faites aux femmes. La question est de savoir si l'interdiction de cette prostitution est une mesure efficace ? Et utile pour protéger ces femmes ?
Puisqu'on élargit le débat et qu'on livre des témoignages divers :
Pour se faire une idée du syndicat des travailleurs du sexe, le Strass, et de ses adhérents, il n'est pas inutile de regarder la vidéo qui est en ligne sur leur page Facebook au 14 septembre ou sur YouTube
http://youtu.be/cig60zVcQW8
Il s'agit de relater les rencontres nationales des 1er et 2 juin de cette année.
Les déclarations et interviews sont diverses et parfois émouvantes, toutefois on ne sent pas, à de rares exceptions, la fierté mise en avant de faire ce métier ... En revanche, une angoisse que les conditions d'exercer se détériorent, oui, surtout chez les garçons, celui qui anime des groupes Porte Dauphine, chez les Chinoises qui avouent que les besoins financiers les ont conduites à se prostituer.
Quant aux photos faites lors de la manifestation Place Clichy ce samedi, on voit de nombreuses Africaines malgré les masques, je ne suis pas sûres qu'elles soient venues à Paris avec l'objectif de vendre leur corps. La remarque n'est pas morale du tout, j'imagine toutes les illusions perdues, même si comme le dit l'anthropologue belge et ses 35 années de vitrine à Bruxelles,on peut aussi y prendre son pied" . Oui, pourquoi pas ? Mais combien prennent leur pied pour de si nombreuses qui sont laminées ?
Au moins, on en discute.
Autre ajout, cette contribution à la rubrique Le Plus du Nouvel observateur:
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/960915-prostitution-la-penalisation-des-clients-nuira-a-tous-en-particulier-aux-femmes.html
Pour les courageux :rapport d'information du Sénat sur la situation sanitaire et sociale des personnes prostituées - 115 pages
http://www.senat.fr/rap/r13-046/r13-0461.pdf
l'article du Nouvel Obs, l'apport de Peggy Sastre :
un discours excessif, qui extrapole complètement les intentions des mouvements féministes, en leur prêtant des propos qu'ils ne tiennent pas, facile de les traiter de bourgeoises soixante-huitarde dévoyées !! discours qui ne tient pas compte des réalités de terrain, mais de la seule liberté de celles et de ceux qui assument et y trouvent leur compte.
Toujours la même question : combien sont-ils, combien sont-elles ?
je conserve ce paragraphe :
"Du côté des abolitionnistes, personne ne m'a jamais dit 'Madame, votre choix de vie n'est pas le mien, mais je le respecte, le problème, c'est qu'il y a des femmes qui ne sont pas aussi libres que vous et qui sont victimes de la traite', ce à quoi je pourrais répondre que des lois sur la traite et le trafic des êtres humains existent et qu'il suffit de tout mettre en œuvre pour les faire appliquer', mais jamais je n'ai eu à faire à ce genre de discours nuancé, généreux et surtout prenant la réalité et la diversité de la prostitution en ligne de compte."
C'est pourtant cet argument qu'on entend partout !!! On n'écoute pas la même chose.
Par mes recherches (en science politique) sur les questions de genre et de sexualité, je me suis beaucoup intéressé à la question de la prostitutions et particulièrement aux différents discours féministes sur le sujet. Il me semble qu'il faut regarder cette question dans toute sa complexité. En effet, il faut d'emblée tenir compte de la diversité de la prostitution en France. Tout d'abord en distinguant les personnes forcées à le faire et celles qui revendiquent un droit à le faire librement. Si certaines personnes pratiquent leur activités sous la coupe de souteneur, parmi elles certaines voudraient continuer leur travail sans proxénètes, d'autres souhaitent pouvoir en sortir définitivement (notamment les filles qui vivent un véritable esclavage sexuel). Il existe plusieurs mode de pratiques, des plus sordides en maison d'abattage aux plus correctes dans des conditions matérielles et sanitaires "acceptables". Il faut savoir aussi qu'il existe une prostitution occasionnelle et/ou passagère qui s'inscrit plus en complément de revenus, et dont les profils socio-économiques ne cadrent pas avec ceux plus habituellement observés dans le monde de la prostitution. Il ne faut pas oublier qu'il existe aussi une prostitution masculine (homosexuelle et hétérosexuelle), loin d'être anecdotique, pour laquelle les arguments féministes abolitionnistes n'ont aucun sens.
Partant de là, intéressons nous aux différents arguments avancés en la matière. Il est un point qui semble mettre tout le monde d'accord, c'est sur la nécessité de faire cesser le proxénétisme et l'esclavage sexuel. Pour se faire, l'arsenal législatif est largement suffisant, pas sûr que les moyens consacrés soient suffisants.
Sur le choix dicté par des motifs économiques, pourquoi distinguer le travail du sexe d'autres emplois entendus comme "avilissants", une femme migrante et/ou pauvre choisit-elle réellement de nettoyer la merde des autres (au sens littéral du terme) si elle n'y était contrainte par nécessité économique? ne se sent-elle pas humiliée et contrainte? Ne choisirait-elle pas de "s'en sortir" si elle le pouvait? Il faut entendre aussi les prostituéEs qui revendiquent un plaisir à exercer leur métier (loin d'être majoritaires, il faut l'admettre), qui nous montrent que l'acte sexuel tarifé n'est pas forcément une épreuve pour toute personne offrant cette prestation. La négation de cette parole par certaines féministes est une violence symbolique qui m'est personnellement insupportable : on ne "délivre" pas des personnes contre leur gré. Les féministes radicales abolitionnistes prétextent que ces personnes prostituées ont intégré leur domination donc que leur parole est invalide, contrairement à celles qui acquiescent à leur discours.
Dans son dernier commentaire, Lise évoque l'aspiration de Peggy Sastre à ce que la complexité des situations soient prise en compte par les féministes abolitionnistes en arguant que "pourtant cet argument qu'on entend partout". J'aimerais avoir des exemples concrets de politiques et/ou féministes abolitionnistes qui tiennent ces discours ; d'ailleurs, la loi proposée va totalement à l'encontre de cette demande. Le féminisme n'est pas monolithique et des courants très opposés y débattent. Depuis les années 1980 aux USA et 1990 en France, se déroulent les "guerres du sexe" (sur des sujet come le BDSM, le porno ou la prostitution) entre "anti" et "pro" au sein des mouvements féministes, ces querelles intellectuelles et militantes ont souvent emmené les "belligérants" à des discours et des positions très radicaux. c'est dans ce contexte que Peggy Sastre s'exprime. Elle parle au nom des travailleurSEs du sexe qui revendiquent un exercice libre de leur métier, et tout comme le STRASS elle n'a jamais nié la dure réalité de la prostitution de beaucoup de femmes, de trans et d'hommes et de la nécessité d'y mettre fin. Je passe sur la remarque sur des femmes "d'apparence africaine derrière leur masque", donc migrantes, en rappelant simplement qu'il y a des personnes noirs françaises (et pas seulement les Ultra-marins).
Sur la question des conséquences d'une telle loi (pénalisation des clientEs), il ne faut pas oublier qu'elle va renforcer la précarité de la pratique de la prostitution en éloignant les prostituéEs des lieux relativement sécures vers des zones marginales et dangereuses comme l'a déjà fait la loi Sarkozy de 2003 sur le racolage passif. Évidemment cette situation va aggraver également la situation sanitaires des prostituées et rendre difficile le travail des associations comme AIDES.
À mon sens, il serait plus judicieux d'avoir un vrai courage politique et de se donner les moyens de lutter concrètement contre les proxénétisme et l'esclavage sexuel en appliquant les lois existantes, plutôt que de produire une loi plus idéologique qu'efficace dont la première conséquence sera la précarisation de touTEs les prostituéEs qu'on prétend"sauver".
Pour celles et ceux qui désireraient approfondir leurs connaissances en la matière, je me permet de conseiller quelques lectures scientifiques :
CHAPERON Sylvie et BARD Christine (dir.), Clio, « ProstituéEs », n°17, 2003, URL : http://clio.revues.org/index713.html
DESCHAMPS Catherine, Le Sexe et l’argent des trottoirs, Paris, Hachette littératures, 2006
HANDMAN Elisabeth et MOSSUZ-LAVAU Janine, La Prostitution à Paris, Paris, Éditions de la Martinière, 2005
LE CORRE Lionel, Les Publications françaises sur les prostitutions (1975-2008), préface de Gabrielle Houbre, Paris, L’Harmattan et Pepper, 2011
MATHIEU Lilian, Mobilisations de prostituées, Paris, Belin, 2003
OUTSHOORN Joyce, The Politics of Prostitution: Women’s Movements, Democratic States and the Globalisation of Sex Xommerce, Cambridge, Cambridge University Press, 2004
PHETERSON Gail, Le Prisme de la prostitution, Paris, L’Harmattan, 2001
TARAUD Christelle, La Prostitution coloniale : Algérie, Tunisie, Maroc (1830-1962), Paris, Payot, 2003
TABET Paola, La Grande Arnaque : Sexualité des femmes et échange économico-sexuel, Paris, L’Harmattan, 2004
J'ajouterais à la bibliographie un auteur venu en parler il y a quelques temps déjà au Centre Barbara :
OLIVIER ENOGO, Les filières africaines de la prostitution, Mémoires d'une enquête, Collection Sambela, Paris, Edition Ccinia Communication, 2007.
Très intéressantes contributions.
Pour votre information, nous avons animé dans le 10ème en mairie plusieurs coordinations sur la prostitution liées aux 3 lieux où des personnes exercent : quartier Strasbourg St Denis, Belleville et les gares (dans le cadre du contrat de sécurité d'arrondissement). Je pourrai vous en reparler à l'occasion plus en détail.
Nous avons eu aussi l'occasion d'héberger des réunions très intéressantes de diverses associations , particulièrement de l'association bien connue Charonne (qui a eu particulièrement comme mérite d'essayer de donner la parole aux personne en situation de prostitution, particulièrement des chinoises de Belleville, grâce au Lotus Bus en particulier) et aussi du collectif Droits et Prostitution. Des comptes-rendus sont disponibles sur Internet je crois, j'essaierai de vous indiquer les liens.
En tout cas, dans le débat actuel, ce sont les réalités réellement vécues qui manquent souvent à l'appel. Et ce ne sont pas des rapports de l'AN biaisés qui vont aider...