Un lecteur du blog, André, nous transmettait lundi 22 avril ses interrogations sur les vitraux qui occupent les lucarnes du dernier étage du Louxor. Collés par la précision de la question, nous avons rapidement contacté qui de droit... et voici la réponse de Christian Laporte, architecte du patrimoine, qui a participé au projet Louxor avec l'atelier de Philippe Pumain.
Philippe Pumain m’a transmis votre courriel sur les interrogations suscitées par la création des vitraux des oculi, pour lesquelles je tenais à vous apporter les précisions suivantes :- Les vitraux conçus pour les oculi ne doivent en aucun cas être considérés comme une restitution fidèle de ce qu’il y avait à l’origine, pour deux raisons au moins : aucune archive, écrite ou iconographique, n’a permis d’identifier la teinte et la nature des verres de ces oculi, seule l’iconographie du visage (celui des années 20 et celui des années 30) était connu, grâce aux cartes postales anciennes, d’une part, et, d’autre part, malgré le travail d’agrandissement des clichés anciens, nous n’aurions pas pu prétendre être fidèle à l’original, il valait donc mieux réinterpréter le vitrail,- Les vitraux actuels sont donc tout au moins une évocation, et au mieux une réinterprétation de l’iconographie originelle, qui représentait une tête de pharaon, avec sa coiffe,- Après de nombreuses études et agrandissement des cartes postales anciennes, il s’est avéré que le panneau central de l’oculi n’était pas en verre, mais plutôt en matériau opaque (tôle avec bas-relief, type métal repoussé par exemple), que nous n’avons pas reconduit, pour rester dans l’esprit d’une composition en matériau verrier. C’est la raison pour laquelle l’atelier Vitrail France nous a suggéré un verre thermoformé, permettant de créer des reliefs sur le verre, notamment pour marquer les plis de carnation du visage. Seuls les panneaux latéraux étaient donc des vitraux au sens strict du terme, avec réseaux plomb.- Je vous confesse que la reproduction des traits du visage du pharaon est à la fois perfectible et pas assez lisible, nous allons voir avec l’atelier comment accentuer justement le caractère plutôt graphique du visage, dans un esprit plus art déco.Meilleures salutations.C. Laporte
Commentaires
Intéressantes précisions de Christian Laporte !
Le fait que la partie centrale des oculi était faite dans un matériau opaque, explique sans doute que cette décoration ait disparu dès les années 30 ou 40, probablement pour faire entrer davantage de lumière à cet étage du bâtiment.
J'ai observé à la loupe un détail d'un cliché montrant le Louxor au début des années 1930, et reproduit dans l'ouvrage de Francis Lacloche "Architectures de cinémas". A vrai dire, le style des visages des oculi faisait davantage penser aux masques précolombiens qu'à l'art de l'Egypte antique... La fantaisie des créateurs des années 1920 les a fait s'affranchir de la précision historique, pour édifier un bâtiment original, à la décoration unique et métissée.
La minutieuse enquête, quasiment archéologique, qu'a menée l'équipe de l'architecte du patrimoine Christian Laporte en amont de ce projet, est réellement passionnante. J'attends avec impatience la sortie de l'ouvrage qui retracera l'histoire du Louxor, de sa décoration et de sa renaissance.
Bonsoir,
L'article d'aujourd'hui vous était tout particulièrement destiné ! Mais puisque vous vous intéressez de près à l'histoire du Louxor, avez-vous lu sur le site des Amis du Louxor une autre enquête minutieuse, celle de Marie-France Auzépy à Istanbul, sur les traces de l'architecte du Louxor, Henri Zipcy ? Elle est passionnante.
voici le lien : http://www.lesamisdulouxor.fr/2013/01/enquete-a-istanbul/