Le dernier CICA dans le 10ème remontait à fin mai 2011 sur le thème de la propreté. Il avait attiré un large public qui ne s’est pas déplacé dans les mêmes proportions pour les séniors le 13 février.
Mis à part quelques jeunes gens venus proposer des Ateliers d'initiation aux nouvelles technologies, le public était exclusivement dans la tranche d’âge concernée par la réunion. Plus ou moins vite nous serons tous rattrapés par le temps, pourtant… Ne faisons pas semblant de l’ignorer.
La balle est dans notre camp
Bernard Ennuyer, sociologue, que nous présentions brièvement dans notre article du 13 février, grand témoin de la réunion, a captivé la salle à tel point qu’après sa première intervention les demandes de parole ont été bien timides. L’idée était bien de lancer des pistes, chercher à questionner, faire réfléchir, s’interroger ensemble sur des sujets simples : « A quoi passe-t-on son temps? Est-ce que c'est intelligent? A qui ça peut être utile? » « Je suis moi-même un senior ! Doublé d’un marathonien. »
La question essentielle reste bien : « Comment pouvons-nous vivre demain égaux et différents ? » (un clin d’œil au livre d'Alain Touraine Pourrons-nous vivre ensemble. Égaux et différents.)
Et Bernard Ennuyer de rappeler qu’« Il faut savoir que 90% des plus de 65 ans vont bien et iront bien jusqu'à la fin de leur vie. » et que « Les seniors sont ceux qui inventent de nouveaux modes de vie, des initiatives pour recréer du lien. » Bel enthousiasme !
La vieillesse : un enjeu collectif pour demain?
Une question spécifique qu’on n’a pas voulu voir : la différence de genre.
Les femmes payent très cher leur longévité. On l’oublie souvent. Leurs retraites sont plus faibles que celles des hommes, leur isolement social plus grand et leur état de santé se dégrade dans le grand âge.
Pensons aussi aux différences de territoire, de milieu social. Pensons également aux différentes influences des religions et des philosophies autour de la conception de la vieillesse.
Soignons l’information
« Elle doit être accessible et compréhensible par tous. » Comment? Si on n'est pas capable de se faire comprendre, c’est qu’il y a problème dans la communication, problème de formulation, voire problème de support. Dans ce cas, la balle est dans notre camp, comme l'a martelé Bernard Ennuyer. L'information de base doit être claire pour tous et il faut être compréhensible pour faire participer le citoyen afin qu'il s’implique. » Nous en savons quelque chose à Action Barbès !
Les perspectives du bénévolat
« Les seniors représentent plus de la moitié des bénévoles en France. Il faut le dire haut et fort ! Et il faut montrer ce dont on est capable.» C'est une source de solidarité quasi inépuisable, qu’il faut promouvoir et exploiter, mais qui ne doit pas cacher les manques de solidarité imputables à la collectivité toute entière (budgets d’aides de toutes sortes en baisse ces dernières années).
La dépendance : financement en rade
B.Ennuyer a regretté la promesse non tenue de Roselyne Bachelot, ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale. En effet, en mai 2009, le président de la République avait annoncé un projet de loi visant à créer un « cinquième risque » afin de prendre en charge la « dépendance ». Lors de la nomination de Roselyne Bachelot en novembre 2010, il réitérait sa volonté de promulguer une loi avant la fin 2011 et annonçait officiellement le lancement du débat sur la dépendance. Le 8 février 2011, il indiquait : « Le gouvernement élaborera son projet de réforme avant la fin de l’été prochain, en vue d’un examen par le Parlement à l’automne ». Projet tombé dans les oubliettes ! Mais projet très controversé aussi, car n'était-il pas question de confier au privé - ne parlait-on pas de risque ? - à des assurances privées donc, au moins dans le cadre d'un financement mixte, un marché important rentable et en pleine expansion.... Plus de projet. Autrement dit, tout reste à faire, car le marché des personnes âgées s’il rapporte beaucoup à certains, coûte très cher à de très nombreuses familles, multipliant les inégalités et les angoisses.
Il faut renégocier le contrat social, c'est ce sur quoi il faut travailler. Comment le faire en tenant compte de nos différences ? Bernard Ennuyer a terminé en lançant un appel : C’est le challenge qui est devant nous et je vous invite à y travailler tous »
Quelques chiffres pour cerner le dossier :
Liliane Capelle, adjointe au maire de Paris, chargée des séniors et du lien intergénérationnel a donné quelques chiffres intéressants :
420 000 Parisiens sont âgés de plus de 60 ans, ils représentent 20% de la population parisienne.
Le budget que la Ville leur a consacré en 2009 : 452 millions d'€ et qu’elle a augmenté depuis.
La mairie de Paris condamne le désengagement de l’état, les budgets en baisse.
Un sujet grave : l’APA, l’allocation pour personne âgée. Le coût annuel se monte à 128 millions d’euros, quand l'état doit à ce jour 800 millions...
Malgré la vision dorée qu’on en a souvent de la capitale, c’est à Paris qu'on trouve le plus d'habitants pauvres dans toute l'Île-de-France, voire en France. Dans les départements, l'APA est compensée à hauteur de 30% environ, ici l’état ne compense qu’à hauteur de 6%... car il part du principe que Paris est une ville riche, ce qui n'est pas faux, mais la péréquation devient fortement injuste.
Autre coût lié à la vieillesse : la carte Émeraude coûte 50 millions au budget parisien, c'est beaucoup. Elles bénéficient aux personnes âgées de plus de 65 ans (ou de plus de 60 ans si elles sont reconnues inaptes au travail). Il s'agit de disposer d'un titre de transport leur permettant de voyager gratuitement sur l'ensemble du réseau RATP - SNCF, à Paris, voire en proche banlieue (zones 1 à 2).
Dépendance : il existe peu d’établissements pour les personnes dépendantes dans le 10e, où la faiblesse du foncier disponible pose problème. Mais on construit ailleurs : 2 200 places seront créées d'ici à la fin de la mandature en 2014.
Autre sujet évoqué qui a fait écho dans l’assistance : le cas des mutuelles, ponctionnées comme jamais, restera l'un des plus grands scandales du quinquennat qui s’achève. C'est une régression, socialement et humainement. La CAS (centre d'action sociale) va investir, a promis l’élue." La santé est un droit absolu et universel. Mais si l'état continue à se désengager, comme il l’a fait tout au long des dernières années, on ne pourra pas tout !"
Les structures en place dans le 10e :
1- Le Conseil des Seniors a trois missions:
- vie quotidienne. On analyse les besoins et on propose des solutions
- culture et convivialité
- intergénérations (avec les crèches, les collèges, lycées)
Il s'intègre au relais info familles tous les 15 jours le 2e et 4e mercredi du mois de 10h30 à 14h30.
Des appartements intergénérationnels existent rue de Chabrol. Il s’agit d’une expérience d’habitat partagé. Des jeunes à faibles revenus et des personnes âgées isolées, ou bien des familles monoparentales peuvent partager un même logement en colocation. Ainsi qu’on peut le lire dans le rapport 2010 de l’association Habitat et Humanisme (page 15) : "une famille kurde, un étudiant, une jeune travailleuse et un sénior partagent en colocation un appartement de 190 m², rue de Chabrol, à quelques pas de la gare de l’Est. L’habitat partagé se veut respectueux de la vie et de l’autonomie de chacun. Cette démarche implique, de la part de ceux qui veulent vivre cette expérience, une volonté de participer au développement de relations intergénérationnelles dans un esprit d’attention mutuelle, de tolérance et de respect de l’intimité de chacun. Une bénévole de l’association, logée à proximité, veille à l’harmonie de la cohabitation. En avril 2011, un second appartement accueillera de nouveaux locataires, avec la même mixité générationnelle."
2- Le point émeraude se concentre sur l’information des aînés : accueillir, informer, conseiller, orienter les Parisiens âgés et leur famille. Le Département de Paris a mis en place des Centres Locaux d’Information et de Coordination gérontologique (les CLIC) sur l’ensemble du territoire parisien. Dédiés aux séniors et à leurs proches, ils peuvent aider à trouver une aide à domicile, renseigner sur les associations de l arrondissement, informer des droits, orienter vers des activités sportives adaptées ou sur des loisirs, ou encore dispenser des conseils utiles sur les maisons de retraite.
Le 10e est bien doté en résidences logements mais Rémi Féraud, le maire du 10e, est intervenu pour préciser une règle : habiter le 10e ne donne pas priorité. Les établissements sont pour l'ensemble des Parisiens. Ils dépendent d'ailleurs du Conseil général. On reste vigilant : pas d'iniquité entre Parisiens selon leur arrondissement de résidence.
Véronique Dubarry, adjointe au Maire de Paris chargée des personnes en situation de handicap, a fait remarquer en conclusion que l’information des personnes âgées participe de l’accessibilité. La loi de 2005 a donc permis de franchir une étape en faveur des séniors.
Pour appronfondir, s'informer, se former...... on peut consulter le site de Paris.fr : Un cycle de conférences sur l’intergénérationnel sera proposé par le Centre d’action sociale de la Ville de Paris via l’Université Permanente de Paris , destinée aux seniors parisiens. Et ne pas oublier le rapport d'information récent de Marianne Dubois, députée, sur le genre et la dépendance, enregistré en novembre dernier à l'Assemblée Nationale. Une mine !