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La mixité sociale

Samedi dernier s’est tenu à l’auditorium de l’Hôtel de Ville un séminaire organisé par l’Observatoire Parisien de la Démocratie Locale et qui avait pour thème "La mixité sociale est elle une utopie ?", sous titre "le peule de Paris XIXème – XXème siècles". Nous vous en avions donné le programme.

Dans sa présentation introductive, le programme indiquait plus précisément la question : la mixité sociale est un idéal affiché, depuis plusieurs années, par divers partenaires de la ville. Ne serait-ce pas toujours un mythe ?

Francine Mercier, ethnologue de formation et pianiste de profession, a introduit le débat par un rappel utile du sens des mots. Que signifient aujourd’hui les mots population, habitant, peuple ? Quel sens ont-ils eu au cours des temps ? Il est clair que les termes « population parisienne » et « peuple de Paris » n’ont pas exactement le même sens. Le mot peuple lui-même a pris au cours du temps une signification particulière et un sens politique certain. La Révolution française a été un tournant à cet égard et que penser des expressions « le petit peuple » ou bien « fille du peuple ». Les mots ne sont pas indifférents.

Michel Pinçon, sociologue au CNRS nous a rapidement brossé un tableau de Paris tel qu’il est aujourd’hui, ses repères spatiaux et ses enjeux sociaux. Paris reste aujourd’hui une capitale de petite taille (87km²) comparée à Londres (350km²) ou Moscou (900km²). La population (un peu plus de 2 millions d’habitants) ne représente qu’une faible partie de la population totale de l’agglomération (11 millions d’habitants) mais sa petite taille fait de la ville une des plus dense en habitants au km². Paris souffre d’être enserré dans une ceinture physique qui empêche son extension comme le périphérique mais aussi les grandes infrastructures comme le parc des expositions de la porte de Versailles par exemple. Il y a une espèce de discontinuité entre la ville et les communes voisines. Dans sa sociologie, il convient aussi de noter sa répartition hétérogène d’un point de vue social, chacun connaissant la différence de composition entre la population résidant à l’Ouest et celle résidant à l’Est.

Alain Faure, historien à l’Université de Nanterre, nous a parlé du mélange des classes sociales dans le Paris des 18ème au 20ème siècle, en considérant ce mélange au niveau des immeubles et des rues d’une part, des quartiers d’autre part. Au cliché d’immeubles présentant une sédimentation verticale des couches sociales, boutiquiers au rez-de-chaussée, bourgeois au premier, domestiques et ouvriers dans les étages supérieurs, il oppose la notion de répartition par immeuble dans chaque rue. L’évolution des quartiers elle-même est intéressante à regarder. Notre 9ème en est un bel exemple avec successivement la création du quartier de la Chaussée d’Antin et ses riches hôtels particuliers dans la seconde moitié du 18ème siècle et les lotissements par construction des immeubles de rapport de la Nouvelle Athènes au milieu du 19ème siècle.

Monique Pinçon-Charlot, sociologue au CNRS, s’est elle attachée à montrer la pérennité du comportement des classes aisées au cours des temps. Libre de son choix de résidence par le simple fait d’avoir hérité d’un patrimoine familial, cette catégorie particulière de la population parisienne se regroupe dans ce qu’il est convenu d’appeler les "beaux quartiers", et fonctionne en cercle fermé. Le titre de son intervention est à lui seul le résumé de son intervention : l’entre soi de la bourgeoisie, une forme de Conseil de quartier.

Saïd Bouzini, Président de l’association Générique, a traité la question du point de vue des étrangers venus s’installer à Paris pour reconnaître que la mixité sociale n’était pas un problème spécifique aux étrangers mais devait bien se placer au niveau "universel" dans un cadre social.

L’assistance, très studieuse, a bien sûr pu intervenir et retenons de ses interventions deux observations majeures sous forme de questions.

Contrairement à d’autres métropoles, Paris ne s’est pas agrandi de manière concentrique mais s’est transformé en démolissant et reconstruisant sur de l’existant, s’est transformé sur lui-même. Résultat de son histoire, on peut néanmoins se poser la question du pourquoi ?

La mixité sociale, pourquoi la mixité sociale ? Est elle quelque chose de vraiment recherché ? Est elle naturelle ? Chaque classe sociale a d’évidence le souci de se protéger et ses membres à rester entre eux. Est elle un concept ? difficile à mettre en place ? Est elle une nécessité pour une ville dont la vie dépend de sa diversité et ne la faisant pas, Paris n’est il pas menacé de nécrose ?

Toutes de très bon niveau, les interventions ont apporté beaucoup d’informations. On a beaucoup parlé de classes sociales pour constater qu’il est aussi assez difficile d’en parler dans un environnement socio-économique très différent de celui du passé. Les questions de la « boboïsation » de Paris, de l’attrait pour les vieilles pierres de la part d’une catégorie de population au profil encore flou, de la possible transformation de notre capitale en ville musée, etc. … restent cruciales pour l’avenir.

A noter qu’organisée par l’Observatoire de la Démocratie Locale, cette réunion n'a pas abordé le sujet des moyens démocratiques pour réaliser cette mixité sociale que beaucoup appellent de leurs vœux.

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