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Urbain trop urbain

Afin de répondre aux attentes des Parisiens en matière d’écologie et de qualité de vie, la ville de Paris a lancé un appel à projets qui invite à voir l’avenir en vert.

Paris je t’aime …

Paris, telle une belle courtisane, s’étire avec paresse sur les bords de la Seine. Pleine de grâce, et sûre de son charme, elle exhibe avec langueur ses trésors impérissables. Mais ses véritables secrets, nichés dans ses méandres les plus intimes, elle ne les dévoile qu’à ceux qui s’y laissent guider par l’amour de la beauté et de la … Stop ! Ceci n’est pas un guide touristique ! Et ce n’est pas non plus ce que vivent les Parisiens au quotidien, en tout cas, cela ne suffit plus à les retenir, ceux d’entre eux qui sont en mal de grands espaces et de verdure. Alors, revenons-y à la réalité du quotidien, aux préoccupations des Parisiens.

images?q=tbn:ANd9GcQwu11gpkYntltiJB9MkOFy59pxEzONA1P_NjROsYgP8Em3zQdmRgIls aiment leur ville, Ils y sont attachés, mais ils s’accordent souvent à dire qu’on y respire mal, qu’on y circule mal, qu’on y est souvent mal logé et qu’on y mange pas toujours très bien. Bref, ils aimeraient que leur qualité de vie soit meilleure. Alors, ils rêvent de campagne, d’alimentation bio, de logement durable, de biodiversité… Ils voient du bio partout.

Les édiles de la ville de Paris, soucieux de la bonne santé physique et mentale de leurs administrés, ont donc fini par se dire : « Et si la campagne s’installait à Paris, plutôt que l’inverse ? » Malheureusement, il ne s'agit pas ici de remettre au goût du jour les belles utopies de nos ancêtres, mais Charles Fourier (1772-1837), qui imagina le phalanstère, aurait peut-être soulevé un sourcil approbateur en découvrant l'initiative de nos élus qui, le 29 mars 2013, ont lancé un appel à projets intitulé « Végétalisations Innovantes », en association avec le Paris Région Lab*. Trente des quarante dossiers reçus ont été présélectionnés. Quinze d’entre eux ont trait à l’agriculture urbaine, sept à l’architecture et à la qualité environnementale des bâtiments, cinq concernent la gestion de l’eau et trois la biodiversité.

« Végétalisations Innovantes »  … Kesako ?

Que trouve-t-on dans ces projets ? Du vert, du vert, et encore du vert. Leurs concepteurs voient absolument tout en vert, sauf les géants et on ne s’en plaindra pas. La végétalisation y est verticale, horizontale et souterraine. Tout ce qui peut être couvert de végétation l’est. Les murs, les toits, les friches urbaines, les tunnels ferroviaires, les pieds d’immeubles, les trottoirs, les lignes de tramway … Chaque espace s’y prêtant est investi par ces doux dingues qui veulent nous mettre au vert, et nous en faire manger, de la verdure.

Utopie ou projet d’avenir ?

Vous voulez peut-être avoir un avant-goût de ce à quoi Paris pourrait ressembler dans un avenir proche. Me croirez-vous si je vous dis que des pleurotes sortiront des tunnels ferroviaires de la petite couronne, que des potagers fleuriront sur le toit de la Générale du Nord-Est dans le 11e arrondissement, qu’on y fera pousser des fraises, des plantes aromatiques, des arbres fruitiers ? On peut aussi s’attendre à voir circuler dans les rues des mini-potagers sur roues ou à s’approvisionner dans des fermes urbaines bio installées sur des toitures et des terrasses. Une application vous renseignera peut-être sur l’adresse du site de compostage le plus proche de chez vous, et vous vous procurerez des fruits frais, donc de saison, dans une forêt fruitière au cœur du 18e. Les graffitis pourraient devenir végétaux, des îlots de dépollution des nitrates sur lesquels on fera pousser des plantes nitrophiles flotteront sur la Seine ou sur le bassin de la Villette. Des bocages urbains en pied d’immeuble filtreront les eaux de pluie avant qu’elles pénètrent dans le sol. Mais ce n’est pas tout, vous pourriez bien vous réveiller avec le chant du coq si, comme le souhaite un porteur de projet, des poulaillers voient le jour dans des copropriétés, des maisons de quartier ou des parcs. On n’y est pas encore me direz-vous. Cela prendra certainement plus de temps pour arriver à ce résultat, si on y arrive, qu’il n’en faut pour le dire. Et encore faut-il que nos élus ne jugent pas ces projets trop farfelus pour être pris au sérieux.

Quel impact pour les Parisiens ?

Certes, la question de l’écologie n’est pas une problématique qui peut se réduire à un territoire aussi ciblé qu’une ville, fut-elle une capitale, mais il ne faut rien négliger ; ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières de la planète Terre. Ces projets pilotes, du moins ceux qui seront sélectionnés, seront testés sur une période de trois ans. Ils se veulent participatifs et éco-citoyens. On parle de SCOP, de créations d’emplois et de lien social, de gestion collective. On se soucie des modes de production, on propose des plantations réalisées à partir de déchets produits localement, des cultures alimentées par des engrais biologiques. L’exploitation et la commercialisation en circuits courts de proximité, réduisant le nombre d’intermédiaires entre le producteur et le consommateur, sont à l’ordre du jour. Au-delà des enjeux écologiques, ce qui rejaillit de ces projets, c’est une volonté de développer un modèle économique différent, local, rationnel et humain ; l’humain au service de l’humain. Une entreprise qui, dans la durée, viserait également une plus grande autonomie alimentaire des citadins.

Des projets vraiment innovants?

D’où vient ce vent nouveau qui souffle sur la capitale ? Non point un vent mauvais, on ne peut que se réjouir à l’idée de voir la capitale verdir, et perdre au passage quelques degrés en été. Mais regardons chez nos voisins, proches ou lointains. Athènes s’est déjà mis au vert avec ses jardins-refuges implantés sur des terrains en friche du quartier d'Exarchia. A Seattle, un collectif vient de faire l'acquisition d'un terrain de trois hectares pour le transformer en forêt comestible où pousseront fruits et légumes. A terme, elle approvisionnera les habitants de la ville. Des micro-jardins ont vu le jour à Dakar, et à Bangkok, le béton disparaît sous la végétation depuis longtemps.

Au regard des expériences déjà menées en la matière sur différents points du globe, on est tentés de dire qu’une fois de plus, la France arrive après la bataille, même si celle de l’écologie, espérons-le, n’est pas perdue. Alors plutôt que le vocable « innovant », qui devient indigeste tant il est mis à toutes les sauces, aussi indigeste que « durable », « bio » ou encore « présumé » lorsque les médias parlent d’un coupable, ou d’une victime, peut-être devrions-nous nous contenter d’utiliser le terme « inédit ». En effet, nous sommes à la traîne, alors qu’il y a tant à faire. Ce qui serait vraiment innovant serait que les décideurs s’enhardissent et fassent confiance aux porteurs de projets en adoptant ceux qui aujourd’hui paraissent les plus audacieux, voire les moins réalistes. S’il est un domaine où la compétition serait bénéfique à la population et à la planète, c’est bien celui de l 'écologie. Alors mesdames et messieurs les élus, osez ! Osez soutenir la créativité sans réserve ! Laissez-nous nous enthousiasmer ! On veut y croire à cette utopie toute verte car il y a péril en la demeure. Souhaitons que vous ayez pris toute la mesure du danger qui nous guette et que cette floraison de projets ne se soldera pas par l’adoption timide d’une succession de mesurettes. Les Parisiens ne se satisferont pas d’un pétard mouillé. C’est un feu d’artifice qu’ils veulent car, qu’on se le dise, le 21e siècle sera vert ou ne sera pas.

*Créé à l’initiative de la Ville de Paris et de la Région Ile-de-France, Paris Région Lab a pour vocation d’accompagner les collectivités dans leurs démarches d’innovation, d'identifier, en partenariat avec les services de la ville, des terrains d’expérimentations pour les porteurs de projets. Voirie, immeubles, équipements municipaux, espaces verts…

_/_/ Pour illustrer le propos nous avons trouvé cette petite vidéo du Mouvement Colibris qui résume la situation de façon didactique et donne des pistes... 


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