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Rencontre avec une Femen au Lavoir Moderne Parisien

Après une prise de contact rapide cet été, nous sommes convenus d'une rencontre avec le groupe de Femen, installé dans les locaux du Lavoir Moderne Parisien, rue Léon et actuellement en plein travaux.

C'est Pauline qui a accepté l'interview malheureusement écourtée à l'annonce d'une arrestation de Femen en Ukraine : elles sont accusées de détenir une bombe et des armes. (à voir sur Le Parisien d'hier). L'actualité n'attend pas ! Elle a tenu à poser avec les symboles du collectif.

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AB : Depuis quand êtes-vous dans ce lieu et pourquoi ?

Nous fêterons notre première année d'occupation le 20 septembre. A cette date, en 2012, nous avions organisé une marche de Château-rouge au LMP avec des Ukrainiennes, des Françaises et des sympathisantes. 

De nombreux journalistes avaient fait le déplacement ; nous n'avions pas eu de réaction agressive mais cette manifestation avait créé la surprise parmi la population rencontrée.

Nous n'avons pas ciblé un quartier en particulier; l'équipe du LMP nous a proposé de nous installer alors même qu'elle tentait de sauver ce lieu.
 

AB : Depuis votre installation, comment ont évolué les contacts avec la population du quartier?

Pas de problème particulier. Notre présence ne génère pas de conflits mais lors de certaines actions (comme des séances de photos seins nus), une certaine tension est perceptible. Mais c'est aussi un quartier qui nous a protègées lorsque nous nous sommes opposées aux groupuscules néo-nazis et aux intégristes catholiques. Par contre, l'action consistant à brûler un drapeau salafiste a été mal perçue, pourtant, ce sont bien les seuls intégristes que nous visons.

Soutien étonnant aussi lorsque nous avons défendu la militante tunisienne Amina Sboui, libérée début août après deux mois et demi de détention en Tunisie. J'ai moi-même été incarcérée pendant un mois et j'ai été étonnée de la solidarité des habitants (presque exclusivement des hommes) et commerçants du quartier, « nous avions osé traverser la Méditerranée » et cela apportait comme une reconnaissance.

On peut dire que le fait d'être associées au LMP nous protège.
 

AB : Et avec la mairie et d'autres associations de la Goutte d'Or?

Les élus du 18e ont témoigné leur soutien lors de l'incendie. Nous souhaitons ne pas politiser notre mouvement, nous n'avons donc pas de contact avec la mairie. Nos seuls liens associatifs sont avec Procréart qui gère le LMP.
 

AB : Avec les associations féministes peut-être ? Avez vous participé à la manifestation sur la Panthéonisation des femmes lundi 26 août?

J'y étais à titre personnel car nous n'y avons pas été invitées. C'est un projet que nous soutenons. Des contacts existent avec Osez le féminisme, la Barbe, mais pas de travail mutualisé. Ces associations se sont mobilisées lors de notre incarcération.

 

AB : Quelles sont vos grandes différences?

 On est dans du plus radical à la fois dans les propos et dans les actions. Radicalité sur les idéaux : rejet de la religion, abolition de la prostitution, interdiction du port du voile (tout ce qui cache la femme en fait).

Certaines d'entre nous sont militantes 24h/24 et 7 jours/7. Ce qui signifie qu'elles n'ont pas d'emploi et se consacrent entièrement à la cause. Ici, nous sommes deux permanentes.

 

AB : Comment faites-vous alors, financièrement ?

Nous logeons sur place et nous vivons très chichement. Cet engagement radical conduit souvent à des ruptures familiales, à des situations de galère. L'adhésion est fixée à 10€. Et certaines de nos actions ont un coût. Heureusement, nous avons des apports avec la vente de produits dérivés sur notre site internet et parfois des dons. Pas de financement occulte ou étranger comme on a pu le lire dans la presse. Nous soupçonnons la Voix de la Russie d'être à l'origine de la diffusion de cette rumeur.

Nous ne sommes pas encore très nombreuses en France mais le réseau se développe dans le monde.
 

AB : Quel bilan depuis la mise en place du nouveau ministère des Droits des Femmes?

Je reconnais qu'il y a une volonté d'agir contre les violences faites aux femmes et pour l'égalité, mais cela ne va pas assez loin, même si c'est encore un peu tôt pour faire un bilan.
 

AB : Vos locaux ont subi un incendie le 21 juillet. Y-a-t-il du nouveau dans l'enquête ?

Nous devrions connaitre les conclusions de l'enquête à la fin du mois. La police n'exclut aucune piste accidentelle ou criminelle. Peu d'espoir quant au résultat.

J'étais présente le jour de l'incendie qui s'est déclaré tôt le matin et je tiens à souligner que là aussi les habitants se sont très vite mobilisés pour nous apporter vêtements et chaussures.

AB : Certaines de nos adhérentes nous ont fait part de leur exaspération à propos du harcèlement à caractère sexuel qu'elles subissent aux abords de la station Barbès de la part d' hommes qui stationnent là. Vous y avez sans doute été confrontées ?

C'est un phénomène très perceptible. Je dirai que le secteur s'étend de Barbès à la rue de Goutte d'Or. Notre attitude consiste à répondre, ne pas nous laisser faire. C'est ce que devrait faire toutes les jeunes femmes concernées. Il n'y a pas que de simples insultes mais également des attouchements. On nous a même craché dessus. Ce n'est pas tolérable. Je n'ai pas de solution contre ce harcèlement dans la rue. Nous constatons que ce phénomène touche aussi de jeunes ados. Les comportements sexistes s'ancrent très tôt et c'est inquiétant. Ils s'accaparent la rue qui devient leur territoire alors qu'on y voit beaucoup moins de filles. Il faudrait verbaliser de tels comportements et prendre des sanctions. C'est plus calme à Chateau-rouge. Là, on trouve malheureusement des prostituées qui « travaillent » pour une misère. Les policiers présents ont souvent une attitude méprisante. Il n'y a pas de rapports de proximité. Ils viennent juste faire la régulation de la station de métro et chasser les petits vendeurs à la sauvette.

Nous avons toutefois conseillé la lecture de notre blog dans les pages consacrées à la zone de sécurité prioritaire Barbès Château-Rouge.

Pour info, le LMP rouvrira ses portes le 4 septembre.

Pour contacter Femen France  : joinfemenfrance@gmail.com

 

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